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Guerre de Sept ans

Par sasalom   •  9 Janvier 2022  •  Dissertation  •  959 Mots (4 Pages)  •  1 058 Vues

Dissertation HGGSP Guerre de Sept Ans

En 1756, la Guerre de Sept Ans éclate. Parfois qualifiée comme étant le premier conflit d’échelle mondiale, on assiste en effet à une guerre d’un nouveau genre avec des combats qui ont lieu sur l’ensemble de la planète (Europe, Amérique, Asie). Ce conflit a inspiré au théoricien de la guerre Clausewitz son traité De la guerre , qui reste aujourd’hui encore un classique de la théorie stratégique moderne. Certaines de ses idées sont restées célèbres jusqu’à nos jours. Nous nous demanderons alors en quoi la Guerre de Sept Ans pourrait correspondre à cette célèbre citation de Carl von Clausewitz : « La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens. » C’est en effet ainsi que Clausewitz définit la guerre, comme un moyen de prolonger la politique des Etats, mais à travers des affrontements qui leur permettraient de parvenir à leurs fins politiques, le but de la guerre étant rarement l’anéantissement pure et simple de l’adversaire. Tout d’abord, nous verrons que des tensions européennes génèrent des alliances à l’échelle mondiale, puis nous nous intéresserons au poids de la dimension politique dans la conduite de la guerre de Sept Ans et enfin nous aborderons les conséquences géopolitiques de ce conflit.

Dès 1954, des tensions se font ressentir entre certaines puissances européennes menant ainsi à l’élaboration d’alliances à l’échelle mondiale.

Sur le continent européen, des tensions apparaissent entre la Prusse et l’Autriche concernant le contrôle d’une région frontalière, la Silésie. Cette escalade des tensions se concrétise par la formation d’alliances : le 16 janvier 1756, la Prusse et la Grande-Bretagne s’allient et le 1 er  mai de la même année, la France et l’Autriche s’allient contre la Prusse. La tension atteint son paroxysme  lorsque la Prusse prend possession de la Silésie et déclenche par la même occasion la guerre de Sept Ans, soulignant ainsi l’origine européenne de ce conflit mondial.

A l’échelle mondiale, les relations entre la France et la Grande-Bretagne sont extrêmement tendues. Les deux pays se font en effet concurrence dans la constitution de leurs empires coloniaux. Des affrontements entre les armées britanniques et françaises, qui n’hésitent pas à constituer des alliances avec les populations locales, ont lieu en Amérique, dans les Caraïbes, en Asie (Inde). On constate ainsi que ce conflit dont les origines sont européennes, a pris des proportions mondiales dans une atmosphère générale déjà particulièrement tendue.

Les motivations de la Guerre de Sept Ans reposent sur une dimension politique importante, chaque pays ayant ses raisons propres de conduire cette guerre.

D’abord, la France et l’Angleterre se font la guerre car elles sont dans une situation de concurrence dans un contexte d’expansion des empires coloniaux. Pour chacun des deux pays, il s’agit d’asseoir son influence et sa puissance sur l’ensemble de la planète. Les enjeux sont ainsi politiques mais également économiques, pour établir des relations commerciales avec les colonies, qui seront très profitables à l’économie de la métropole.

Par ailleurs, la Russie quant à elle entre dans la guerre, alliée à la France et à l’Autriche, avec une volonté de s’opposer à la montée en puissance de la Prusse sur le continent européen, qu’elle perçoit comme une menace pour sa propre puissance.

Enfin, entre l’Autriche et la Prusse, les tensions et les motivations politiques de la guerre reposent sur un différend territorial concernant la possession d’une région, la Silésie. On voit ainsi que chacun des acteurs du conflit a ses propres motivations politiques pour déclencher et s’investir dans une guerre de si grande ampleur, car les enjeux sont en effet d’une importance majeure.

L'ouvrage coup de cœur de mars : Atavi : Le Labyrinthe de Fundokolia par Arslan Cherr

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Accueil » Histoire Moderne » La guerre de Sept Ans (1756-1763) : premier conflit mondialisé

La guerre de Sept Ans (1756-1763) : premier conflit mondialisé

  • Histoire Moderne

La prise de Québec - Hervey Smith | Domaine public

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Souvent peu connue et peu étudiée des programmes scolaires, la guerre de Sept Ans est pourtant majeure dans l’histoire de l’Europe, à l’aube de la Révolution française.

Un climat européen entre rivalités territoriales et ambitions de puissance

La guerre de Sept Ans se déroule entre 1756 et 1763, majoritairement en Europe. Dans cette guerre, deux camps s’opposent : une coalition de belligérants composée de la France, de l’Autriche et de la Russie, gouvernés respectivement à l’époque par Louis XV, Marie-Thérèse I et Elizabeth I. La seconde coalition est formée de la Prusse, du Royaume-Uni et du Portugal. Elle est dirigée par l’empereur prussien Frédéric II le Grand et par le Premier ministre britannique William Pitt l’Ancien. 

Cette guerre s’inscrit dans un contexte de rivalités entre les nations européennes. D’abord, entre la France et l’Angleterre. En effet, à cette époque les deux puissances possèdent notamment des colonies en Amérique du Nord, et souhaitent s’y imposer. Par exemple, le territoire de l’Ohio faisait déjà l’objet de tensions entre les deux pays avant le début de la guerre.

La Prusse et l’Autriche sont également en mauvais termes. En amont de la guerre de Sept Ans, deux conflits les ont déjà opposé au sujet de la Silésie. Cette région est historiquement rattachée à l’Autriche mais fut acquise par la Prusse en 1745 lors du traité de Dresde. La Silésie étant une région peuplée et développée, elle représente un enjeu majeur pour les deux puissances européennes. Ainsi, l’impératrice Marie-Thérèse I s’allie notamment à la France et à la Russie pour reconquérir la Silésie.

L’alliance entre la France des Bourbons et l’Autriche des Habsbourg est inédite puisque les deux maisons s’opposaient jusqu’à présent depuis deux siècles. L’objectif poursuivi est de récupérer la Silésie, et plus généralement, d’affaiblir la Prusse de Frédéric II, qui est une puissance montante.

Le déroulement du conflit en Europe et l’inversion du rapport de force

La Prusse lance les premières offensives en Saxe, qui est un Lander actuel de l’est de l’Allemagne, mais l’armée autrichienne prend le dessus. La bataille de Kolin, en juin 1757, est marquée par la défaite de Frédéric II. Vient ensuite une contre-offensive simultanée de la Russie en Prusse orientale, de la France dans le Hanovre, qui est un territoire appartenant à l’Angleterre, et de la Suède, ayant rejoint l’alliance un peu plus tard, depuis la côte nord de la Prusse. L’armée française remporte les batailles dans le Hanovre et contraint les Anglais à signer la capitulation de Kloster-Zeven en septembre 1757.

À la fin de cette même année, Frédéric II de Prusse sort victorieux face aux Français en Saxe, mais également en Silésie. En effet, la région, bien qu’annexée par la Prusse en 1745, était encore en grande partie occupée par les autrichiens. Cette victoire est donc une reprise réelle du contrôle prussien sur la Silésie. Plus tard, plusieurs défaites de Frédéric II face aux armées autrichienne et russe, marquent l’arrivée de ces dernières sur le territoire prussien. Berlin, la capitale du royaume de Prusse, est occupée du 9 au 12 octobre 1760. Enfin, la dernière grande défaite de Frédéric II est le siège puis la capitulation de la ville de Kolberg, en décembre 1761, face à l’armée impériale russe.

Chute de la ville prussienne de Kolberg en 1761 - Alexander Kotzebue | Domaine public

Deux ans plus tard, alors que la Prusse semble dominée, la guerre connaît un renversement avec la mort de l’impératrice russe Elisabeth II. Le nouveau tsar, Pierre III, est germanophile et souhaite se retirer de la guerre, par admiration pour Frédéric II de Prusse. Par conséquent, les deux États signent un traité de paix et le rapport de forces de la guerre en est changé. Après la victoire prussienne lors de la bataille de Burkersdorf en Silésie, en juillet 1762, l’Autriche est épuisée financièrement et se résout à engager des négociations de paix pour mettre fin au conflit.

Les conflits franco-britanniques, hors du sol européen

Carte des positions françaises et britanniques à la veille de la guerre- Auteur inconnu | Domaine public

Les premières batailles débutent en 1754, en Amérique du Nord. La France, menée par le Marquis de Montcalm, connaît une série de victoires, conclut par l’arrivée à Fort Oswego en août 1756.

Cependant, à partir de 1758, la supériorité numérique des Anglais inverse la tendance. Les territoires de Louisbourg, Fort Duquesne, Québec et Montréal sont perdus un à un entre 1758 et 1760 et marquent la capitulation française dans la région. Dans les Antilles, le résultat est similaire avec les victoires anglaises en Guadeloupe et en Martinique. Enfin, en Inde, les possessions françaises sont toutes reprises. La défaite de 1761 à Pondichéry, au sud-est du pays, marque la victoire anglaise.

Des aspects nouveaux

Au milieu du XVIIIe siècle, un conflit à échelle mondiale est inédit. Toutefois, d’autres éléments rendent la guerre de Sept Ans encore plus particulière. L’opposition des deux coalitions est une opposition entre deux systèmes politiques. D’un côté, les monarchies absolues de la France, de l’Autriche, de la Russie et de la Suède et de l’autre la monarchie dite « éclairée » de Frédéric II de Prusse et la monarchie limitée de l’Angleterre.

De plus, l’Amérique anglaise et française s’opposent en tous points. Les colonies anglaises sont majoritairement protestantes alors que celles des Français sont catholiques et le pouvoir très centralisé en Nouvelle France se distingue de la politique beaucoup moins centralisée de l’Angleterre sur ses possessions américaines. Ainsi, par ses motifs politico-religieux, la guerre de Sept Ans dépasse les conflits classiques de son époque.

L’ampleur des pertes humaines est également sans précédent. On dénombre plus d’un million trois cent mille victimes dont de nombreux civils. Les batailles furent très meurtrières, à l’instar de la bataille de Zorndolf en 1758 entre la Russie et la Prusse. Cette dernière aurait perdu 10 % de sa population totale dans cette guerre.

Durant la guerre de Sept Ans, la forte mobilisation économique et militaire des États ainsi que le développement d’un patriotisme chez les nations européennes ont entraîné une « montée aux extrêmes ». Cette idée d’une utilisation de tous les moyens possibles pour arriver à la victoire et d’un idéal unissant les politiques et la nation vient de l’ouvrage De la guerre , publié en 1832 par l’officier prussien Carl Von Clausewitz, dans lequel il tente de théoriser la guerre, ayant lui-même participer pendant plusieurs années aux guerres révolutionnaires et napoléoniennes.

Enfin, la violence de ce conflit est aussi marquée par la déportation du peuple des Acadiens. En effet, les colons britanniques imposent au peuple de quitter l’Acadie dès leurs premières victoires au Canada. Ainsi, entre 1755 et 1762, environ douze mille Acadiens ont été emmenés loin de leurs terres par navire. Nombre d’entre eux sont alors morts en mer, de maladie, de faim ou de noyade. Aujourd’hui encore, l’Acadie commémore chaque année cet événement tragique de leur histoire. Cette opération de nettoyage ethnique britannique, aussi appelée « Le Grand Dérangement », est un point de rupture dans le degré de violence atteint dans une guerre du XVIIIe siècle.

Issue et conséquences du conflit

Les affrontements entre la France et l’Angleterre prennent fin avec la signature du traité de Paris en 1763. La France perd le Canada mais conserve ses îles antillaises et ses comptoirs indiens. Cependant, le contrôle français en Inde est très largement réduit au profit de celui de l’Angleterre. Cette dernière sort victorieuse et s’impose comme thalassocratie, c’est-à-dire comme une puissance qui domine par le contrôle des espaces maritimes. La fin de la guerre Sept Ans marque ainsi les prémices de la suprématie britannique du XIXe siècle au début du XXe siècle. Le traité d’Hubertsbourg est quant à lui signé par l’Autriche et la Prusse, cette dernière conservant la région de la Silésie tant convoitée.

Ce premier conflit mondialisé a accéléré les mutations politiques en Europe et en Amérique. Ce conflit a véritablement mené à la révolte en Amérique, pour l’indépendance. Et, en France, le peuple exprime un mécontentement croissant envers les élites, dû aux défaites répétées de Louis XV dans cette guerre. Pour l’historien français Edmond Dziembowski, un « nouveau patriotisme » se développe, puisque après 1763 de nombreux Français souhaitent jouer un rôle actif pour leur nation et se revendiquent désormais comme citoyen.

Quelques liens et sources utiles

Pour une lecture détaillée et une meilleure compréhension du conflit :

Dziembowski, Edmond.  La guerre de Sept Ans. 1756-1763 .  Perrin, 2015

Pour une lecture plus spécialisée sur les relations internationales au XVIIIe siècle :

Belissa, Marc, Edmond Dziembowski, et Jean-Yves Guiomar. « De la guerre de Sept ans aux révolutions : regards sur les relations internationales »,  Annales historiques de la Révolution française , vol. 349, no. 3, 2007, pp. 179-202.

Les Arènes du Savoir. (2021, 14 décembre).  La guerre de Sept Ans : une guerre mondiale  [ Vidéo ]. 

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dissertation guerre de sept ans

La guerre de Sept Ans est la première guerre véritablement mondiale : on se bat sur plusieurs fronts, en Europe, en Amérique et en Inde. C’est un renversement des alliances qui voit s’opposer principalement la France, alliée à l’Autriche, contre la Prusse, alliée à l’Angleterre. Le Prussien Frédéric II est en infériorité numérique, mais son armée, très bien équipée, est la mieux entraînée. De cette longue lutte, la Prusse sort grandie et la France abaissée. Frédéric II doit la victoire à son génie militaire et à sa ténacité autant qu’à la médiocrité de ses adversaires, qui n’ont pas su combiner leurs efforts et saisir les occasions décisives. La fin de la guerre, en 1763, consacre l’échec des prétentions françaises et couronne la volonté britannique : la France est évincée du continent nord-américain et perd l’essentiel de ses possessions aux Indes. Cette guerre s’avère désastreuse pour Louis XV, qui a sacrifié 200 000 hommes en Allemagne pendant qu’il perdait ses colonies faute de troupes pour les défendre.  EN SAVOIR PLUS > La guerre de succession d'Autriche (1740-1748)  > Le traité de Paris (1763) 

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dissertation guerre de sept ans

Guerre de 7 ans

Série de conflits armés qui s’étendent de 1756 à 1763, auxquels participent les principales puissances du XVIIIe siècle et plusieurs de leurs colonies d’Asie, d’Amérique et d’Afrique.

Qu’est-ce que la guerre de 7 ans ?

La Guerre des 7 (sept) ans fut une série de conflits armés qui s’étendirent de 1756 à 1763 , auxquels participèrent les principales puissances du XVIIIe siècle et plusieurs de leurs colonies d’Asie, d’Amérique et d’Afrique.

Dans cette guerre, deux grandes factions se sont affrontées :

  • La Grande-Bretagne , le royaume de Prusse, le royaume du Portugal, Hanovre et d’autres états allemands : ce camp était dirigé par l’empereur prussien Frédéric II le Grand et le Premier ministre britannique William Pitt l’Ancien.
  • La France, l’Empire autrichien, l’Espagne, la Suède, Naples, le Piémont-Sardaigne, le Royaume de Saxe , l’Empire moghol et l’ Empire russe (qui changea de camp en 1762, après l’accession au trône du tsar Pierre III) : les dirigeants de cette bloc étaient l’impératrice autrichienne Marie-Thérèse I, le roi de France Louis XV et l’impératrice russe Elizabeth I.

Ce conflit débuta lorsque la dynastie des Habsbourg, souveraine de l’Empire autrichien, décida de récupérer le territoire de Silésie , qu’elle avait perdu au profit de la Prusse lors de la guerre de Succession d’Autriche (1740-1748). Ce différend territorial a ajouté à la rivalité entre la Grande-Bretagne et la France pour le contrôle du commerce mondial et la domination de l’Inde, du Canada et de la Louisiane . Comme la Grande-Bretagne était un allié de la Prusse et de la France, de l’Autriche, plusieurs conflits de guerre simultanés se sont déclenchés, auxquels l’Espagne s’est également jointe, en tant qu’alliée de la France.

Cette guerre avait une portée mondiale , puisqu’elle n’était pas seulement menée en Europe, mais aussi en Amérique, au Sénégal, en Inde et dans l’archipel des Philippines. Il comprenait plus de 70 conflits armés dans presque tout le monde. C’était à la fois un conflit pour l’hégémonie continentale entre l’Autriche, la Prusse et la Russie et une guerre pour le contrôle du monde colonial entre la France, l’Espagne et la Grande-Bretagne.

Elle est connue sous des noms différents selon les pays : guerre franco-indienne aux États-Unis, guerre de conquête au Canada, troisième guerre carnatique en Inde, troisième guerre de Silésie en Allemagne, etc.

La guerre de 7 ans, dont les vainqueurs furent la Prusse et la Grande-Bretagne , se termina en 1763 par le traité de Paris , signé entre la France, l’Espagne et la Grande-Bretagne, et le traité d’Hubertusburg , scellé entre la Saxe, l’Autriche et la Prusse. La Suède et la Russie ont signé des traités de paix séparés avec la Prusse.

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Développement de la guerre de 7 ans

La guerre de 7 ans s’est déroulée sur quatre fronts différents :

  • Front européen – Dans lequel la Prusse a affronté la Saxe, l’Autriche, la Russie et la Suède, tandis que la France a combattu la Grande-Bretagne et Hanovre. De son côté, l’Espagne, renforcée par les troupes françaises, envahit le Portugal.
  • Front américain : En Amérique du Nord, la France et la Grande-Bretagne se sont battues au Canada et en Louisiane dans un conflit qui a également impliqué les Iroquois ; en Amérique centrale, les Britanniques ont attaqué Cuba et occupé La Havane ; en Amérique du Sud, l’Espagne et le Portugal se sont battus pour le contrôle de la Banda Oriental et du Río Grande. Les Espagnols ont réussi à prendre Colonia del Sacramento, Maldonado et les forteresses de Santa Teresa et San Miguel.
  • Front asiatique – En Inde, la Grande-Bretagne a combattu la France, qui était soutenue par l’Empire moghol, tandis que les Britanniques attaquaient la colonie espagnole des Philippines et s’emparaient de Manille.
  • Front Africain : La Grande-Bretagne s’empare du Sénégal, qui était une colonie de la France, pour reprendre le commerce du caoutchouc et des esclaves.

Causes et conséquences de la guerre de 7 ans

Les principales causes de la guerre de 7 ans étaient les suivantes :

  • Le différend sur le contrôle de la région de Silésie entre le Royaume de Prusse et l’Empire autrichien. La Silésie faisait partie de l’État autrichien, mais passa aux mains de la Prusse après la fin de la guerre de Succession d’Autriche (1740-1748).
  • La rivalité entre la France et la Grande-Bretagne pour le contrôle du commerce mondial et des possessions d’outre-mer en Inde et en Amérique du Nord. Ces colonies fournissaient d’importantes matières premières telles que le thé, le coton, le poisson et les fourrures.
  • Volonté de la Grande-Bretagne d’ affaiblir l’empire colonial espagnol . Cela a entraîné des attaques répétées de navires britanniques contre la flotte espagnole, l’augmentation de la contrebande dans les colonies hispano-américaines et l’occupation britannique de territoires en Amérique centrale.
  • Le désir de la Russie et de la Suède d’ arrêter l’expansion de la Prusse sur les rives de la mer Baltique.
  • La rivalité entre l’Espagne et le Portugal pour le contrôle des deux rives du Río de la Plata et de la région des missions jésuites .

Conséquences

Les principales conséquences de la guerre de 7 ans sont les suivantes :

  • La France a dû céder à l’Espagne la Louisiane à l’ouest du fleuve Mississippi ainsi que la Nouvelle-Orléans et céder le Sénégal, le Canada, l’est de la Louisiane, la quasi-totalité de ses colonies en Inde et les îles de Minorque, Dominique, Grenade, Saint-Vincent et Tobago à Grande-Bretagne. .
  • L’Espagne reçut l’ouest de la Louisiane, récupéra La Havane et Manille et dut céder la Floride à la Grande-Bretagne. Il a également dû rendre Colonia del Sacramento, Santa Teresa et San Miguel au Portugal.
  • La Grande-Bretagne, la plus favorisée, a reçu le Sénégal, le Canada, l’est de la Louisiane, la Floride, une partie de l’Inde, Minorque et plusieurs îles des Caraïbes.
  • La signature du traité d’Hubertusburgo (1763) , entre la Saxe, l’Autriche et la Prusse. Cet accord consacre le renforcement de la Prusse, qui conserve la Silésie et devient l’État le plus puissant du bassin baltique et du Saint-Empire romain germanique .
  • L’ affaiblissement de la France , dû à la perte de contrôle de routes commerciales cruciales et à la cession de territoires qui étaient la source d’importantes matières premières. Cette situation préparait le terrain pour le déclenchement de la Révolution française , en 1789.
  • Le renforcement de la Grande-Bretagne qui, en prenant le contrôle du commerce mondial, s’est procuré les matières premières et les marchés nécessaires au développement de la révolution industrielle .
  • La rupture de la loyauté des colons nord-américains envers la Couronne britannique, due au fait qu’ils considéraient que le roi et le Parlement ne reconnaissaient pas dûment leur participation à la guerre. Cela a déclenché la guerre d’indépendance (1776-1783), qui se conclurait par la reconnaissance par la Grande-Bretagne de l’  indépendance des États-Unis . Dans cette guerre, la France et l’Espagne ont soutenu les États-Unis pour se venger de la Grande-Bretagne et tenter de récupérer les territoires perdus pendant la guerre de 7 ans.
  • La mort de 400 000 personnes entre civils et militaires, dans tous les conflits armés de la guerre.

Histoire

La guerre de Sept Ans (1756-1763)

plaines abraham

La guerre de Sept Ans, premier conflit à l'échelle mondiale

La paix instauré à l'issue de la Guerre de Succession d'Autriche avait laissé tous les belligérants sur leur faim. La paix conclue au traité d’Aix-la-Chapelle en 1748 n’avait été que de courte durée, et il ne s'était agi que d’une trêve dans le conflit qui opposait les puissances européennes. Les hostilités allaient renaître en 1756 et durer sept ans. Mais, depuis la guerre de la succession d’Autriche, les relations entre nations avaient évolué et le renversement des alliances avait transformé les rapports entre États. La crise européenne qui débuta en 1756 avait en fait deux raisons principales : la rivalité maritime et coloniale opposait la France et l’Angleterre en amérique du Nord et dans l’Inde ; l’inquiétude de de l’Autriche devant les progrès de la Prusse et la volonté qu’avait Marie-Thérèse de reprendre la Silésie à Frédéric II.

Depuis le XVIIe siècle, les Français avaient pénétré à l’intérieur du Canada et possédaient, du Saint-Laurent au Mississippi, un territoire très vaste. Ils avaient construit dans la vallée de l’Ohio des forts pour barrer la route aux Anglais, qui disposaient de forces militaires supérieures aux leurs. La lutte s’engagea sérieusement aores le traité d’Aix-la-Chapelle le long du cours de l’Ohio. En 1754, des miliciens de Virginie, commandés par le jeune George Washington, tuèrent dans des conditions obscures un officier français, Jumonville, et les Français ripostèrent en prenant le fort Necessity, où les colons britanniques étaient installés.

L’année suivante, le 10 juin 1755, deux vaisseaux français, l'Alcide et le Lys, victimes de « l’attentat de Boscawen », furent capturés près des bancs de Terre-Neuve par les Anglais. Peu de temps après, trois cents navires français et leurs cargaisons estimées à 30 millions étaient pris par les corsaires anglais. Mais, alors que l’Angleterre se préparait activement à combattre, le roi de France Louis XV se résignait difficilement à accepter une guerre qui lui répugnait.

1756 : le renversement des alliances

L’Angleterre se préoccupait de nouer des alliances en Europe. Le 16 janvier 1756, Frédéric de Prusse conclut un accord de garantie militaire avec le souverain britannique George II. Ce traité provoqua la rupture entre la Prusse et la France et, craignant de se trouver isolé devant une coalition dirigée contre lui, Louis XV décida d’accepter les propositions d’entente que lui faisait depuis plusieurs années Marie-Thérèse d'Autriche. L’ambassadeur de cette dernière, Kaunitz, avait su gagner la confiance de Mme de Pompadour, qui avait chargé son ami, l’abbé de Bernis, de négocier avec l’Autriche.

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Grâce au renversement des alliances, la France et l’Autriche étaient désormais alliées et obtenaient l’appui de l’impératrice de Russie, du roi de Suède, de l’Électeur de Saxe et de la plupart des princes allemands. Afin de prévenir les effets de cette coalition, Frédéric II prit l’initiative et se jeta sur la Saxe en août 1756. Dès lors, deux guerres allaient se dérouler simultanément, l’une entre la Prusse et la coalition européenne en Allemagne et aux frontières de la Bohême et de la Pologne, et de l’autre sur mer et dans les colonies entre la France et l’Angleterre.

Succès et revers français dans la guerre de Sept Ans

Les premiers affrontements sur mer furent favorables à la France. Après avoir appareillé à Toulon le 12 avril 1756, l’escadre française, placée sous le commandement de La Galissonière, arriva à Minorque et vainquit la flotte de l’ amiral anglais Byng , ce qui permit au maréchal de Richelieu de s’emparer du Port-Mahon, une place réputée inexpugnable.

Mais ces victoires qui enlevaient aux Anglais le contrôle de la Méditerranée n’eurent qu’un effet momentané, car, dans les années qui suivirent, la flotte anglaise reprit l’avantage sur les côtes de France et infligèrent de lourdes défaites aux navire» français, en particulier à Quiberon, ou, en 1759, l’amiral de Conflans fut défait par l’amiral Hawke.

Sur le continent, Frédéric de Prusse privé de l’aide de l’Angleterre qui avait consacré ses forces à la lutte sur mer, se trouvait seul face aux armées coalisées. Avec son armée d’environ 150 000 hommes, il prit l’initiative en Bohême et en Saxe en tentant d’empêcher la jonction entre les troupes de Marie-Thérèse et de celles de l'électeur de Saxe. Mais la guerre commença par une série de défaites pour le roi de Prusse et ses alliés : vaincu à Kolin le 18 juin 1757, Frédéric dut évacuer la Bohême, tandis que la Prusse orientale fut envahie par la Russie et la Poméranie par les Suédois. Les Français étaient entrés en Westphalie.

Le maréchal de Richelieu occupa le Hanovre et contraignit l’armée anglo-hanovrienne du duc de Cumberland à signer la capitulation de Kloster-Zeven (8 septembre 1757). Cependant, Richelieu ne profita pas de son avantage et se contenta de soumettre le pays à un pillage réglé, ce qui lui valut le surnom peu flatteur de « Père la Maraude ».

Frédéric II de Prusse l'emporte difficilement en Europe

Bataille de Zorndorf

Deux mois plus tard, Frédéric de Prusse dispersait les Autrichiens à Leuthen en Silésie. Pendant les années qui suivirent, le roi prussien dut faire face, sur trois fronts différents, à trois groupes d’armées qui convergeaient vers Berlin. Les Français furent vaincus à Krefeld en juin 1758 et perdirent le Hanovre qui ne put être repris, malgré les efforts du maréchal de Broglie. Un an plus tard, en août 1759, ils étaient de nouveau défaits à Minden.

Mais bientôt la Prusse succomba sous les forces de la coalition qui se resserraient autour d’elle. Le 12 août 1759, les Austro-Russes lui infligeaient la défaite de Kunersdorf et entraient à Berlin en octobre 1760. Les Impériaux occupaient la Saxe et les Autrichiens la Silésie. La France elle-même remportait une victoire à Clostercamp le 15 octobre 1760, et cette bataille fut illustrée par un acte de courage rapporté par Voltaire : le jeune chevalier d’Assas tomba, au cours de la nuit qui précédait la bataille, sur une colonne ennemie qui l’entoura et le menaça de mort s’il avertissait les Français.

Mais Assas n’hésita pas à sauver ses compatriotes en criant à son régiment : « À nous, Auvergne, ce sont nos ennemis ! », et tomba, percé de coups. Mais, malgré d’autres épisodes glorieux comme la prise de Cassel par le comte de Broglie ou la défense victorieuse de Gottingen, les armées françaises n’étaient point capables d’affronter durablement les troupes prussiennes, remarquablement entraînées, et manquaient de chefs de valeur comparables à Maurice de Saxe.

Malgré son habileté stratégique et la valeur de ses soldats, Frédéric II se trouvait dans une situation particulièrement critique lorsque le hasard vint à son secours. Le 5 janvier 1762, la tsarine Élisabeth mourait et son successeur, Pierre III, admirateur du roi de Prusse, signait avec lui une paix séparée le 5 mai 1762. Il lui rendait par ce traité toutes les conquêtes réalisées par les Russes depuis le début de la guerre. La Suède suivait immédiatement l’exemple de la Russie.

En remportant le 21 juillet 1762 la victoire de Burkersdorf sur les Autrichiens, Frédéric II parvenait à reconquérir presque toute la Silésie. Privée de l’aide de la Russie, l’Autriche était disposée à traiter avec la Prusse. Quant aux Français, les revers qu’ils avaient essuyés aux colonies les poussaient à la négociation et la désagrégation de la coalition antiprussienne prépara la conclusion de la paix.

Vers la victoire anglaise outremer

Alors que les débuts de la guerre de Sept Ans avaient été désastreux sur mer pour les Anglais, ces derniers ne tardèrent pas à reprendre l’avantage grâce au sursaut national suscité par le Premier ministre, William Pitt. L'essentiel des forces anglaises fut consacré à la défense des colonies en Amérique du Nord et en Inde, alors que le gouvernement français ne se préoccupait guère que des opérations menées en Europe. Le ministre français de la Marine ne déclarait-il pas : « Quand le feu est à la maison, on ne s’occupe pas des écuries ! » Il faut dire que le Canada, où se déroulèrent les plus graves affrontements, ne fournissait pas de produits coloniaux et rares étaient les Français qui s’intéressaient à ce pays lointain. Aussi se contenta-t-on d’envoyer en renfort un peu plus de 8 000 hommes, alors que Pitt, décidé à occuper la vallée de l’Ohio, fit partir plus de 30 000 Anglais vers l’Amérique.

chute de .quebec.

Après un combat acharné dans les plaines d’Abraham le 13 septembre, la ville était obligée de capituler le 18 septembre, les deux généraux Montcalm et Wolfe ayant été tués au cours de la bataille. En 1760, Montréal tombait à son tour au pouvoir des Anglais. Ceux-ci s’étaient aussi emparés de la Guadeloupe en 1759. C’était la fin de l’Empire colonial français en Amérique.

La situation en Inde n’était pas plus brillante. Après le départ de Dupleix, les Anglais s’étaient installés à Chandernagor. Pour défendre les Français des Indes, on envoya un corps expéditionnaire commandé par Lally-Tollendal qui remporta d’abord quelques succès. Mais Lally-Tollendal ne connaissait rien aux affaires de l’Inde et n’avait que mépris pour « ces misérables Noirs». S’aliénant les alliés indigènes et mécontentant les officiers français, il se trouva très vite en difficulté. Il échoua d’abord dans le siège de Madras en 1758, puis se laissa enfermer dans Pondichéry avec une petite troupe de 700 hommes et résista héroïquement contre l’armée ennemie forte de plus de 20 000 soldats.

Au bout d’un an, Pondichéry tombait entre les mains des Anglais. Injustement rendu responsable de la défaite française aux Indes, Lally-Tollendal fut accusé de trahison et fut condamné en 1766 à avoir la tête tranchée.

Fin de la guerre de Sept Ans : le traité de Paris

Devant les échecs essuyés par les armées françaises, Louis XV pensa à renforcer ses alliances et, sous l'instigation de son ministre Choiseul, conclut avec les Bourbons d’Espagne et de Naples ce que l’on appela le « pacte de Famille» : par cette convention signée le 15 août 1761, les rois de France et d’Espagne se garantissaient mutuellement leur assistance. Le 1er mai 1762, l’Espagne déclarait la guerre à l’Angleterre. Les Anglais continuaient à remporter des victoires et avaient conquis La Havane en 1762. Cependant Pitt, partisan de la guerre à outrance, avait été renversé le 5 octobre 1761 et son successeur, lord Bute, ainsi que le nouveau roi d’Angleterre, George III, se montraient moins intraitables.

D'ailleurs l’Europe entière était fatiguée de la guerre et, le 3 novembre 1762, des préliminaires de paix furent signés à Fontainebleau. Par le traité de Paris, le 10 février 1763, la France abandonnait à l’Angleterre le Canada, la partie de la Louisiane à l’est du Mississippi, la vallée de l’Ohio, la Dominique, Saint-Vincent, Tobago, la Grenade et le Sénégal à l’exception de Gorée. Elle cédait son empire des Indes et ne gardait que les cinq comptoirs de Chandernagor, Yanaon, Karikal, Mahe et Pondichéry. Pour dédommager l’Espagne, qui avait dû céder la Floride aux Anglais, Louis XV lui donnait l’autre partie de la Louisiane et La Nouvelle-Orléans.

La France ne conservait en Amérique que la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Domingue et les îlots de Saint Pierre-et-Miquelon. Cinq jours après la conclusion du traité de Paris, Frédéric II et Marie-Thérèse signaient la paix de Hubertsbourg qui confirmait à la Prusse la possession de la Silésie. La guerre de Sept Ans avait fait de la Prusse la première des puissances militaires de l’Europe et de l'Angleterre la maîtresse d’un vaste empire colonial.

Le traité de Paris était particulièrement humiliant pour la France, qui se trouvait amputée de ses plus belles possessions d’outre-mer. Cependant l’opinion publique ne s’émut guère de la perte du Canada, car pourquoi, ainsi que le disait Voltaire, s’intéresser à ces «quelques arpents de neige» ? L’essentiel semblait avoir été de conserver la plupart des îles à sucre. Mais, si on considérait avec désinvolture la perte de l’empire colonial, on était plus sensible en France à l’humiliation des nombreuses défaites essuyées sur terre et sur mer et on se moquait en chansons de l'incapacité des officiers et de la faiblesse des ministres. Il est certain que la France avait perdu plus de deux cent mille hommes pour conserver à Frédéric de Prusse la Silésie et, comme le dira le diplomate français Bernis, dans la guerre de Sept Ans, « notre rôle avait été extravagant et honteux ».

Bibliographie

-  La Guerre de Sept Ans : Histoire navale, politique et diplomatique , de Jonathan R. Dull, Jean-Yves Guioma. Les Perséides, 2009.

-  La guerre de Sept Ans en Nouvelle-France , de Laurent Veyssière et Bertrand Fonck. Pups, 2011.

-  La guerre de Sept AnsLa guerre de Sept Ans , de Edmond Dziembowski. Tempus, 2018.

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La guerre de Sept Ans (1756 – 1763)

Clément Chapon est un ancien étudiant de Sciences po, passionné par l’Histoire !

De 1756 à 1763, la Guerre de sept ans a embrasé l’Europe, l’Amérique du Nord et le sous-continent indien. Ce conflit opposa deux blocs :

  • Le premier était composé de la France, l’Autriche, la Suède, la Russie et plus tard l’Espagne.
  • Le deuxième de la Prusse alliée à la Grande-Bretagne.

Toutes les grandes puissances européennes de l’époque étaient ainsi engagées dans cette guerre. Chacun de ces pays avait ses propres objectifs, parfois sans aucun lien avec ceux de ses alliés, ce qui donna à la guerre de Sept Ans son caractère complexe . Cette guerre se termina sur un statu quo territorial en Europe mais accoucha d’un nouveau rapport de force entre ses États , consacrant la montée en puissance de l’Angleterre et l’entrée en scène de la Russie à l’Est du continent, de même qu’un affaiblissement relatif de la France jusqu’alors considérée comme la première puissance du continent.

L’Europe avant la guerre de Sept Ans : un fragile équilibre des forces

Carte de l'Europe guerre de Cent Ans

L’ordre européen avec la guerre de Sept Ans

L’ordre européen de 1750 repose sur un équilibre des forces entre plusieurs puissances à la légitimité variable. La France des Bourbons et l’ Autriche des Habsbourg sont ainsi des puissances établies dont le rôle majeur a notamment été consacré par les traités d’Utrecht de 1713 et de Rastatt de 1714. La première doit faire face à la montée de la Grande-Bretagne , désormais stable politiquement et dont la forte expansion coloniale menace ses possessions en Amérique du Nord.  À l’inverse, l’Espagne , appauvrie et loin de sa gloire passée, est désormais une puissance de second rang sur le continent  malgré son vaste empire colonial et une marine efficace. Ayant perdu ses possessions italiennes et néerlandaises, elle souffre désormais d’une position excentrée.

La montée en puissance de la Russie

Au cours de la première moitié du XVIIIe siècle, de nouveaux États émergent et contestent l’ordre établi. C’est d’abord le cas de la Russie qui, grâce à sa guerre contre la Suède, de 1700 à 1721, remplace cette dernière comme principale puissance de la mer Baltique . Dans les décennies suivantes, c’est au détriment de l’Empire Ottoman que les souverains russes poursuivent leur expansion vers le Sud.

La montée en puissance de la Prusse

Toutefois, c’est avant tout la montée en puissance de la Prusse, au sein de l’espace germanique, qui perturbe l’équilibre sur lequel repose la paix de l’Europe. En effet, en 1740, profitant de la succession contestée de l’empereur Charles VI par sa fille Marie Thérèse, Frédéric II de Prusse attaque sa voisine par surprise . À l’issue d’un conflit de huit ans, il lui arrache la riche province de Silésie bien que l’impératrice parvienne à conserver sa couronne en envahissant son rival bavarois. Un nouvel affrontement entre l’Autriche et la Prusse apparaît dès lors plausible, d’autant que la première se lance dans une frénésie de réformes afin de moderniser son administration et son armée.

Un renversement d’alliance qui annonce la guerre de Sept Ans

La guerre de Sept Ans

Une alliance Autriche – Angleterre fragilisée

Au cours de cette la guerre de succession d’Autriche (1740-1748) , la France avait combattu avec la Prusse tandis que l’Autriche avait bénéficié de l’aide de la Grande-Bretagne. Cette dernière alliance reste toutefois fragile. En effet, les Britanniques ne sont intervenus que tardivement pour éviter une victoire française en Allemagne, d’autant que le Hanovre, dont l’électeur était aussi le roi d’Angleterre, pouvait être menacé. En outre, Marie-Thérèse leur reproche de ne lui avoir apporté qu’un soutien tiède. Dans le même temps, la France n’a plus guère de contentieux avec la maison de Habsbourg, ce qui ouvre la voie à une alliance entre les deux principales puissances catholiques du continent.

Vers le renversement d’alliance 

C’est le très francophile chancelier Wenzel von Kaunitz, l’ambassadeur autrichien à Paris Starhemberg et le cardinal de Bernis qui opèrent ce rapprochement qui ne peut qu’inquiéter la Prusse. Celle-ci doit alors se mettre en quête de nouveaux alliés et se tourne naturellement vers l’Angleterre, principale rivale de la France et pays protestant dont le roi Georges II est l’oncle de Frédéric II. Les conditions sont alors réunies pour un retournement d’alliance , bien que celui-ci soit vu avec réticences par de nombreux membres des cours de Vienne et Versailles.

Le renversement définitif

Les événements s’accélèrent en 1756. En janvier, la Prusse et la Grande-Bretagne signent un accord. En mai, c’est au tour de la France et de l’Autriche d’officialiser leur alliance par le traité de Versailles. Désormais, les deux plus puissantes familles d’Europe entendent agir de concert, même si l’accord qu’elles signent reste, pour l’heure, purement défensif.

Le début de la guerre de Sept Ans

L’offensive prussienne.

Le roi de Prusse n’a guère de doute sur les intentions belliqueuses de l’Autriche, qui seules justifient son alliance avec la France. Frédéric II, sachant ses ressources limitées, opte pour une stratégie agressive visant à rapidement envahir la Bohême et au-delà, l’Autriche. Pour cela, il estime toutefois avoir besoin de neutraliser la Saxe, qui pourrait menacer son flanc durant son offensive contre les Habsbourg. Surtout, les ressources de cette région, l’une des plus riches d’Allemagne, doivent lui permettre de soutenir un conflit majeur contre l’alliance franco-autrichienne. L’armée prussienne prend dès lors les devants. À la fin de l’été 1756, elle envahit la Saxe qui est incapable de lui résister longtemps. Une armée autrichienne, dirigée par Browne, tente de secourir les Saxons mais elle est battue à la bataille de Lobositz le 1 er  octobre . Toutefois, l’affrontement est indécis et les pertes prussiennes y sont lourdes. Frédéric II pressent dès cet instant que le nouveau conflit sera bien plus difficile que la guerre de succession d’Autriche.

Le début du conflit franco-anglais en Europe

Au même moment, de l’autre côté de l’Atlantique, la Grande-Bretagne et la France se disputent la domination de l’Amérique du Nord , où les combats, en réalité, ont commencé dès 1754. Le début de la guerre de Sept Ans a pour effet de les lier au conflit en Europe. La stratégie de Louis XV, en effet, est d’y obtenir des gains territoriaux en profitant de la supériorité numérique de son armée, alors que la suprématie navale britannique rend difficile l’approvisionnement du Canada. Les territoires occupés pourraient ensuite être échangés contre des colonies. La France cherche en particulier à occuper le Hanovre. En 1757, l’armée française, après la victoire de Hastenbeck , parvient à imposer ses propres conditions au Hanovre, au Hesse et au Brunswick avec la convention de Klosterzeven . Toutefois, l’Angleterre refuse de ratifier ce traité, qui ne sera jamais appliqué, et la guerre se poursuit donc.

L’enlisement de la guerre de Sept Ans en Europe orientale

guerre de cent ans frederic II

Panique en Prusse

La Prusse doit attendre 1757 pour reprendre l’offensive, dirigée cette fois-ci contre les territoires des Habsbourg. Frédéric II vise en particulier la capitale de la Bohême, Prague. Il assiège la ville mais doit ensuite faire face à une contre-attaque dirigée par le maréchal autrichien Daun qui l’oblige à accepter une bataille rangée. Contre toute attente, la bataille de Kolin , en juin 1757 se conclut par une nette victoire autrichienne et met fin à la réputation d’invincibilité de la Prusse. Défait, le roi Frédéric doit se replier mais il n’est pas poursuivi par l’armée autrichienne du fait d’une prudence sans doute excessive de Daun.

Au même moment, la Russie entre en guerre contre la Prusse , occupe la ville de Memel et bouscule un corps prussien à la bataille de Gross-Jägersdorf. Elle ne peut ensuite assiéger Könisberg et doit se replier et abandonner tous ses gains. Cependant, l’entrée en guerre de ce nouvel État, disposant d’une immense armée, constitue une lourde menace pour Frédéric II. En outre, profitant de son apparente faiblesse, la Suède l’attaque à son tour, en envoyant ses forces en Poméranie tandis que la France avance vers l’est.

La Prusse renverse la situation

A la fin de l’année 1757, alors qu’il semble sur le point de perdre, le roi de Prusse renverse pourtant magistralement la situation . Le 5 novembre, il écrase une armée française à Rossbach , avant de battre les Autrichiens dirigés par le médiocre Charles Alexandre de Lorraine à Leuthen . En utilisant ses lignes intérieures, il est parvenu à rapidement déplacer son armée d’un front à l’autre tandis que sa tactique audacieuse de l’ordre oblique , visant à percer les lignes adverses en un seul point, lui a permis de remporter des victoires sur des forces numériquement supérieures.

L’enlisement de la guerre de Sept Ans

En 1758, pourtant, le conflit s’enlise. Les Prussiens assiègent la ville bohémienne d’Olmütz mais doivent se replier après une défaite de l’un de leurs corps à Domstadtl. En août, Frédéric II doit à nouveau déplacer son armée sur un autre front, afin de repousser les Russes qui ont occupé la Prusse-Orientale au début de l’année. Il y parvient à la bataille de Zorndorf , non sans subir de lourdes pertes. En revanche, en octobre, le roi de Prusse subit une défaite sévère face aux Autrichiens de Daun à Hochkirch . À la fin de l’année, sa situation est donc loin de s’être améliorée. 

Poursuite de la guerre de Sept Ans en Amérique

guerre de sept ans bataille de carillon montcalm

Accalmie en Allemagne

Après Rossbach, l’armée française ne se bat plus contre la Prusse, mais se contente d’attaquer les forces hanovriennes, renforcées par un contingent britannique et des troupes prussiennes, en Allemagne de l’Ouest. Elle n’obtient toutefois que peu de succès et est battue par Ferdinand de Brunswick-Lünebourg à Krefeld en juin 1758. Les Français parviennent cependant à conserver des positions sur le Rhin.

Les victoires du marquis de Montcalm en Amérique

La situation en Amérique du Nord paraît nettement plus prometteuse pour le royaume des Bourbons malgré son infériorité numérique face à l’ennemi britannique. En 1756, l’armée française, dirigée par le marquis de Montcalm , anéantit un corps britannique commandé par le général Braddock. L’année suivante, il déclenche une offensive et prend le fort William-Henry , qui semble lui ouvrir la porte d’Albany (aujourd’hui située dans l’État de New York). S’il ne peut lancer d’offensive faute d’hommes, Montcalm remporte un nouveau succès en 1758 à la bataille de fort Carillon où il parvient à repousser une armée anglaise cinq fois supérieure en nombre.

Un changement du rapport de force

Toutefois, l’avenir s’assombrit rapidement après cette victoire. Le principal ministre français, le marquis de Choiseul, décide de se concentrer sur l’Europe à partir de 1758 d’autant que l’action de la Royal Navy entrave l’approvisionnement des colonies françaises d’Amérique. Au moment où les Français se concentrent sur la possibilité d’une invasion de la Grande-Bretagne, dans un mouvement inverse, les Britanniques renforcent leurs propres positions en Amérique du Nord. Ce rapport de force sans cesse plus défavorable à Montcalm l’empêche de lancer une grande offensive contre les colonies britanniques et le contraint rapidement à mener une guerre défensive.

L’année 1759, tournant de la guerre de Sept Ans

guerre de sept ans bataille des cardinaux ou baie de quiberon

Une Prusse acculée…

À l’est, l’année 1759 semble consacrer la défaite de la Prusse, de plus en plus acculée par ses adversaires. En août, elle subit un très lourd revers à la bataille de Kunersdorf contre des Autrichiens et des Russes qui parviennent enfin à coordonner leur action. En effet, l’armée qui inflige à Frédéric la plus importante défaite de sa carrière est constituée d’environ deux tiers de Russes et d’un tiers d’Autrichiens, et c’est le contingent de l’Empire Habsbourg, dirigé par l’agressif Ernst von Laudon, qui procède à la manœuvre décisive entraînant la débandade prussienne.

…mais qui résiste

L’alliance a cependant subi de lourdes pertes (environ 15 000 tués et blessés sur 60 000 hommes au total) elle aussi et se révèle incapable de poursuivre son avantage tandis que dans les jours suivant la bataille, le roi de Prusse parvient à progressivement rallier ses troupes, tout en obtenant des renforts venus d’autres fronts. Si les Prussiens ne peuvent désormais plus songer à une victoire décisive dans le conflit, ils parviennent encore à tenir leur territoire. En octobre 1759, ils défendent ainsi avec succès la forteresse de Kolberg en Poméranie contre une armée russe. Ils subissent toutefois un nouveau revers important contre l’Autriche à Maxen, où un corps d’armée prussien d’environ 15 000 hommes est capturé par les forces de Laudon.

L’annus mirabilis pour la Grande-Bretagne

Sur le front ouest, les Prussiens sont soulagés par les succès de Ferdinand de Brunswick contre les Français. Après avoir d’abord dû reculer à Bergen, son armée anglo-hanovrienne remporte un succès décisif à Minden le 1 er août . Ce succès écarte définitivement toute menace sur le Hanovre et il conforte l’effort de guerre britannique. 1759, de fait, est surnommée l’ annus mirabilis en Grande-Bretagne . En effet, celle-ci remporte également deux victoires décisives sur les mers à la bataille de la baie de Quiberon, qui met fin à toute possibilité pour la France d’intervenir militairement dans les îles britanniques, et à Lagos au large du Portugal.

La chute du Canada français

Surtout, 1759 est l’année de la chute du Canada français. Face à une armée désormais très supérieure en nombre, le marquis de Montcalm ne peut plus défendre la ville de Québec qui tombe en septembre après un siège de plusieurs mois et d’une bataille de quelques heures au cours de laquelle le général français et son homologue anglais, James Wolfe, sont tous les deux tués. Peu de temps après cette défaite décisive, l’armée française perd également la bataille de Niagara tandis qu’un dernier succès à Sainte-Foy en 1760 ne permet pas de reprendre la capitale du Canada français. À l’automne, les Britanniques envahissent Montréal sans résistance. Le rêve américain des Bourbons a vécu.

Match nul en Europe centrale

Attentisme russe.

Après son retrait suite à la bataille de Kunersdorf en 1759, l’armée russe se montre largement passive durant deux ans , à l’exception d’une nouvelle tentative manquée de prendre Kolberg en 1760. Cela permet à Frédéric II de se concentrer sur l’Autriche. Son armée subit pourtant une succession de revers durant de long mois : défaite du général prussien Fouqué à Landshut en juin, siège manqué de Dresde en juillet et perte de Glatz en Silésie peu de temps après.

Victoire prusse à la bataille de Torgau

Frédéric II va pourtant retourner la situation. Le 15 août, il remporte une franche victoire contre Laudon à Liegnitz, tandis qu’une autre armée autrichienne, dirigée par Daun, campe inexplicablement sur ses positions et ne participe pas à la bataille.

En octobre 1760, le roi de Prusse doit retourner vers sa capitale, Berlin, brièvement occupée par un corps austro-russe dirigé par les généraux Lacy et Tottleben, mais il se remet ensuite en marche vers la Saxe où il remporte la victoire de Torgau le 3 novembre sur l’armée du maréchal Daun.

Cette bataille, l’une des plus sanglantes du XVIIIe siècle , apparaît alors comme une victoire à la Pyrrhus : les Prussiens sont passés proches du désastre et ont subi des pertes encore plus lourdes que les Autrichiens  qui se sont repliés en bon ordre. L’échec de ceux-ci, en réalité, est essentiellement dû à une blessure de Daun qui a désorganisé leur armée alors qu’elle était proche de l’emporter.

Épuisement des forces

La bataille convainc toutefois Marie-Thérèse de l’impossibilité d’obtenir un succès décisif qui lui permettrait de reprendre la Silésie , sauf en cas d’intervention russe massive. En effet, à la fin de l’année 1760, les positions des deux belligérants n’ont pratiquement pas changé tandis que la trésorerie autrichienne, déjà mal en point, souffre d’une diminution de l’aide financière française. L’armée des Habsbourg, qui par ailleurs n’ose pas recourir à la conscription, doit alors réduire la taille de ses unités, au moment où la Prusse, bien que très affaiblie, mobilise ses dernières réserves.

Cette situation explique la relative inaction qui caractérise la majeure partie de l’année 1761, au cours de laquelle les Autrichiens doivent se contenter de prendre la forteresse de Schweidnitz (Silésie) grâce à une opération audacieuse du maréchal von Laudon.

Offensive russe

La Russie, moins épuisée par le conflit, semble alors en mesure de faire basculer le rapport de force à l’avantage de son alliée. En effet, elle lance finalement une nouvelle offensive contre Kolberg en juillet 1761. Le siège de la forteresse se prolonge et dure plus de cinq mois, tandis que les Russes sont considérablement gênés par l’action du général Platen qui attaque leurs arrières et remporte plusieurs succès, notamment à Göstin et Posen. Toutefois, il ne parvient pas à libérer Kolberg et la garnison prussienne doit capituler le 16 décembre. Si cette victoire doit permettre à l’armée russe d’attaquer directement le Brandebourg, elle est obtenue trop tard pour qu’elle puisse le faire avant le printemps 1762.

De Pierre III et Catherine II

Or, la tsarine Elisabeth de Russie meurt peu de temps après la fin du siège de Kolberg. Son successeur Pierre III est un admirateur de Frédéric II . Prince d’origine allemande, il souhaite s’allier à la Prusse afin d’affronter le Danemark, ce qui ne peut manquer d’alarmer Marie-Thérèse. Heureusement pour l’Autriche, Pierre III est déposé et tué en juillet 1762 et Catherine II – pourtant elle-même fille d’un général prussien – qui lui succède n’a aucunement l’intention d’honorer la nouvelle alliance de la Russie avec la Prusse. Restée largement inactive durant plusieurs années, la Suède met également fin à son intervention en Allemagne en 1762.

Rétablissement de la situation pour la Prusse

Ces événements revigorent Frédéric II qui remporte la bataille de Burkersdorf (Silésie) contre le maréchal Daun en juillet 1762, permettant la reprise de Schweidnitz peu de temps après. Enfin, le 29 octobre de la même année, son frère Henri de Prusse bat une autre armée autrichienne à Freiberg en Saxe. À la fin de l’année, la Prusse a ainsi repris presque tous les territoires qu’elle avait perdus depuis 1760 à l’exception de Glatz. Elle ne peut toutefois déloger les Autrichiens du sud de la Saxe ou attaquer leur territoire.

Quand la guerre de Sept Ans devient un calvaire pour la France

Une armée française inefficace .

Si, en 1760 et 1761, la Prusse lutte pour sa survie en tant que puissance, elle peut toutefois compter sur une action efficace de ses alliés britannique et hanovrien qui tiennent en échec une armée française décidément inefficace et l’empêche d’opérer la moindre jonction avec l’Autriche. Ferdinand de Brunswick continue en effet de remporter des victoires. Le 31 juillet 1760, il bat les Français à Warburg. Avec le soutien d’un corps prussien, il récidive à Langensalza le 15 février 1761 avant d’avancer sur Cassel. S’il ne peut alors prendre la ville, le duc de Brunswick remporte une victoire décisive sur les armées des ducs de Soubise et de Broglie à Vellinghausen en Westphalie. Cette terrible défaite met définitivement fin aux espoirs français d’obtenir un succès sur le front allemand et, à la fin de l’année 1762, Cassel finit également par tomber.

La France battue en Inde

À plusieurs milliers de kilomètres du continent européen, en Asie, la France est également battue en Inde. Elle perd en effet la bataille de Wandiwash en 1760 et la ville de Pondichéry en 1761 ainsi que toutes ses autres possessions indiennes. Il faut alors noter que sur ce front très secondaire, les forces françaises sont encore plus limitées en nombre et mal approvisionnée qu’en Amérique du Nord. Leur isolement explique largement leur incapacité à s’opposer à la compagnie britannique des Indes orientales disposant de davantage de ressources et du soutien de la Royal Navy .

Désastre au Portugal

En désespoir de cause, le pouvoir français parvient à engager son allié espagnol dans le conflit. En 1762, les forces franco-espagnoles se lancent ainsi à l’assaut du Portugal mais leur offensive se termine en véritable désastre. En effet, elles sont anéanties au bout de quelques mois par une armée anglo-portugaise commandée par un général allemand, le comte de Schaumbourg-Lippe. Cette nouvelle humiliation sonne le glas de l’effort militaire français lors de la Guerre de Sept Ans.

La fin de la guerre de Sept Ans : nouveau rapport de forces

La guerre de sept ans, deux conflits.

Le terme de  « guerre de Sept Ans » désigne en réalité deux conflits , devenus de plus en plus distincts au cours des opérations militaires. D’une part, une lutte entre la Prusse et l’alliance austro-russe (renforcée de manière accessoire par la Suède) pour la suprématie en Europe centrale. D’autre part, un affrontement impitoyable à l’échelle mondiale entre la France et la Grande-Bretagne, celle-ci s’appuyant largement sur les forces de l’électorat du Hanovre et ses alliés allemands en Europe.

En Europe centrale, une guerre de Sept Ans sans grand impact territorial

Le premier conflit de la guerre de Sept Ans se solde finalement par un match nul. En 1763, alors que des négociations se tiennent entre les belligérants, la Prusse occupe presque tous les territoires qu’elle tenait à la fin de 1756, comprenant notamment le nord de la Saxe et la Silésie à l’exception de Glatz. Elle est toutefois épuisée et dévastée tandis qu’en face, l’Autriche, en difficulté financière, est toutefois solidement retranchée en Saxe du sud (y compris la capitale de l’État, Dresde) et en Bohême. Cette situation pousse au statu quo ante bellum . Marie-Thérèse d’Autriche essaie un temps de conserver le contrôle de Glatz mais elle n’insiste pas devant le refus prussien. Au traité d’Hubertsbourg (1763), elle n’obtient que deux concessions de la part de Frédéric II : le repli prussien de la Saxe occupée en 1756 et la promesse (finalement tenue) du roi de Prusse de voter pour son fils Joseph lors de la prochaine élection impériale.

Une victoire de la Prusse ? 

Ce conflit en Europe centrale est généralement considérée comme une victoire prussienne , la Prusse parvenant à conserver la Silésie et étant définitivement reconnue comme une grande puissance européenne. L e pays termine pourtant le conflit très affaibli et dévasté, avec d’importantes pertes démographiques. Cette situation, et la bonne tenue de l’armée autrichienne au cours du conflit, semble influer sur le comportement du roi Frédéric après la guerre. Si le roi de Prusse conserve des velléités expansionnistes, comme en atteste le partage de la Pologne en 1772, il ne se risquera plus jamais à tenter une bataille rangée contre l’Autriche, ni à un conflit contre la Russie.

De son côté, malgré ses difficultés à partir de la fin de 1760, l’Empire Habsbourg termine la guerre en meilleur état que son rival du Nord mais Marie-Thérèse prend conscience de la nécessité de poursuivre son effort de modernisation administrative et militaire qui n’a pas pleinement porté ses fruits.

Si la Russie n’a rien gagné en termes de territoire, son intervention remarquée en Allemagne lui confère définitivement un statut de grande puissance européenne, que Catherine consolidera d’ailleurs considérablement.

La guerre de Sept Ans : l’autonomie de l’ordre est-européen

Enfin, d’une manière générale, la guerre de Sept Ans consacre l’apparition d’un ordre est-européen autonome , reposant sur ces trois États qui peuvent désormais agir sans le soutien des pays occidentaux. La première victime de ce nouveau système diplomatique sera la Pologne à partir des années 1770.

À l’Ouest, victoire anglaise décisive

Quant à l’affrontement franco-anglais, il se termine par une victoire sans appel de ces derniers. Au traité de Paris, signé le 10 février 1763 , la France perd l’ensemble de ses possessions canadiennes et cède également la Louisiane orientale (à l’est du Mississipi) et plusieurs îles des Caraïbes à la Grande-Bretagne. En réalité, dès 1762, elle avait également cédé la Louisiane à l’Espagne afin de l’attirer dans le conflit. Une intervention qui au demeurant s’était révélée désastreuse…Les Britanniques obtiennent aussi la Floride, au détriment de l’Espagne, mais rendent à la France ses possessions indiennes occupées pendant la guerre.

Au-delà des pertes territoriales, le prestige de la monarchie française est sérieusement atteint lors de ce conflit. Vaincue en Amérique et en Inde, son armée a également subi une succession de défaites embarrassantes contre le Hanovre, il est vrai appuyé par des troupes britanniques et parfois prussiennes, en Allemagne. Alors que l’Autriche comptait sur la France dans sa lutte contre la Prusse, elle a rapidement dû se tourner vers la Russie dont l’intervention s’est révélée plus efficace. Enfin, le traité de Paris met de facto fin à l’expansion coloniale du royaume de France, au moment même où la Grande-Bretagne se lance à la conquête de la majeure partie de l’Inde.

Conseils de lecture

  • La Guerre de Sept Ans , Edmond Dziembowski  
  • La Guerre de Sept ans : Histoire, navale, politique et diplomatique , Jonathan R. Dull et Jean-Yves Guiomar  
  • Frédéric II , Jean-Paul Bled
  • Marie-Thérèse d’Autriche , Jean-Paul Bled
  • The Emergence of Eastern powers, 1756-1775, H.M Scott

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La Guerre de Sept ans (1756-1763)

Résumé du document.

La Guerre de Sept ans a peut-être été la première guerre mondiale avant la lettre, puisqu'elle s'est jouée en même temps au cœur du continent européen et dans les lointaines colonies d'Amérique et des Indes. Ses causes sont complexes et nous ramènent à une autre guerre, celle dite de la succession d'Autriche. L'enjeu de la guerre de Sept ans aura finalement été de décider qui de la couronne des Hohenzollern ou des Habsbourg dirigerait le monde allemand. En 1703, Léopold 1er — l'empereur du Saint-Empire romain germanique — règle dans sa « Disposition Léopoldine » la succession du patrimoine habsbourgeois : son fils aîné, Joseph, devait lui succéder. Or, celui-ci n'a pas de fils. Dans le cas de la mort de Joseph, la couronne irait au frère de Joseph, Charles. Léopold, en homme prudent, prévoit toute éventualité. Ainsi, dans le cas où Charles n'aurait pas d'héritier, l'héritage habsbourgeois irait aux filles de Joseph : Marie-Joseph et Marie-Émilie.

  • La disposition Léopoldine
  • Le Traité de Nymphenburg (1741)
  • Un conflit franco-anglais
  • Un conflit prusso-autrichien
  • La paix de Hubertsburg

[...] La Saxe, elle, gagnerait la Moravie. Tandis que la Prusse conserverait la Silésie. Mais Frédéric II se méfie des Français et signe en secret un accord avec Marie-Thérèse qui lui laisse la Silésie. Des troupes formées d'éléments français et bavarois occupent alors la Haute-Autriche et la Bohème. Prague est occupée par les Français, où Charles-Albert de Bavière est élu roi de Bohème en décembre 1741. Puis, en janvier 1742, Charles-Albert est couronné empereur à Francfort. L'Angleterre ne voit pas d'un bon œil la nouvelle politique de la France en Europe centrale. [...]

[...] Mary et Guillaume n'auront pas d'enfants et Mary étant morte avant Guillaume, la succession échue à la princesse Anne, deuxième fille de Jacques II, elle aussi restée protestante. Mais celle-ci ayant perdu tous ses enfants, et l'ordre de succession protestant excluant la descendance mâle de Jacques II, fidèle au catholicisme, appelle à régner l'Électeur du Hanovre Georges-Louis de Hanovre, petit-fils d'une fille de Jacques Ier d'Angleterre. Ce Georges de Hanovre montre donc sur le trône en 1714 et prend le nom de Georges Ier. [...]

[...] Pierre III et Frédéric II signent la paix le 5 mai 1762. Évaluant le danger que représente un Frédéric II débarrassé de la menace russe, la Suède retire ses troupes. Frédéric II peut alors concentrer ses forces dans la région qui l'a toujours intéressé: la Silésie. Marie-Thérèse ne peut pas lui tenir tête. C. La paix de Hubertsburg La paix de Hubertsburg (15 février 1763) laisse la Silésie à la Prusse, en échange de quoi, Frédéric II s'engage à donner sa voix au fils de Marie- Thérèse, Joseph II. [...]

[...] De leur côté, les Français s'emparent à l'ouest du Duché de Clèves et battent les troupes hessoises et hanovriennes. Tandis que les Suédois débarquent en Poméranie et les Autrichiens envahissent la Silésie. Frédéric II reste calme et, grâce à son génie militaire, reprend la Silésie. À l'ouest, les troupes anglo-hanovriennes se reprennent et repoussent les Français vers le Rhin. Frédéric entre en Moravie, mais il doit faire front contre les Russes qui se sont emparés de Königsberg et avancent vers l'Oder (1758). [...]

[...] Conclusion La guerre de Sept ans trouve ses origines dans un conflit territorial entre les couronnes de Prusse et celle d'Autriche, plus précisément sur la question de la Silésie. L'intervention des Anglais et des Français dans le conflit continental va le transformer et lui donner une dimension mondiale. C'est ce conflit que l'on appelle la Guerre de Sept ans. Bibliographie Bogdan, Henry. Histoire de l'Allemagne : de la Germanie à nos jours. Paris, Perrin Dull, Jonathan R. La Guerre de Sept ans : histoire navale, politique et diplomatique, Rennes, Les Perséides Rovan, Joseph. Histoire de l'Allemagne. [...]

  • Nombre de pages 4 pages
  • Langue français
  • Format .doc
  • Date de publication 08/12/2009
  • Consulté 14 fois
  • Date de mise à jour 08/12/2009

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Clio Lycée > La guerre de Sept ans en schéma pour la dissertation

La guerre de Sept ans en schéma pour la dissertation

Jalon obligatoire :.

Cécile Dunouhaud |  Nov 24, 2022 |  Axe 1 - La dimension politique de la guerre : des conflits interétatiques aux enjeux transnationaux |  0 | 

La guerre de Sept ans en schéma pour la dissertation

LA GUERRE DE SEPT ANS- SCHÉMATISATION

Pour aborder la Guerre de Sept ans de manière originale, j’ai tenté une approche géographique en traduisant la guerre sous la forme d’un schéma de dissertation, celui-ci étant valorisé par les correcteurs lors de l’épreuve de spécialité. L’exercice en lui-même n’est pas censé être compliqué, ni être une nouveauté pour les élèves dans la mesure où l’ancien programme demandait ce type d’exercice en géographie dans les trois filières. Il demande malgré tout un certain entrainement de la part des élèves mais ceux qui ont l »oeil un peu plus graphique s’épanouiront plus volontiers ici.

Je précise que je n’ai pas utilisé de logiciel de cartographie. En effet (et ceci est un débat), les élèves n’ont pas le jour de l’épreuve de logiciels à leur disposition pour réaliser le schéma. Il est bon qu’ils se réhabituent aussi à la réalisation manuelle et qu’on leur prouve que cela est possible de le faire à la main.

Voici par étapes la réalisation du schéma.

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Presses universitaires de Franche-Comté

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Citoyenneté et éducation par la société, première partie. de la cité à la patrie. les discours produits par la société sur la citoyenneté.

La guerre de Sept Ans (1756-1763) et l’affirmation du citoyen français

La guerre de Sept Ans (1756-1763) et l’affirmation du citoyen français

Texte intégral, introduction.

  • 1 W. Churchill, A History of the English-Speaking Peoples , vol. 3 : The Age of Revolution , New York, (...)

2 Anderson 2000 ; 2005. Voir aussi Dziembowski 2015, p. 534-544.

3 Peters 1980 ; Wilson 1998 ; Harris 2002 ; Dziembowski 2015.

1 Premier conflit mondial de l’histoire selon Winston Churchill 1 , la guerre de Sept Ans (1756-1763) confirme de manière éclatante la suprématie maritime et coloniale de la Grande-Bretagne. Comme l’a montré la recherche anglo-saxonne, ce conflit inaugure également l’ère des révolutions démocratiques de la fin du xviii e  siècle. À tout seigneur, tout honneur : la révolution de l’Amérique du Nord qui ouvre ces temps nouveaux plonge ses racines dans la guerre de Sept Ans 2 . En Grande-Bretagne, le radicalisme politique qui prend forme pendant les années 1760 ne peut, lui aussi, se comprendre sans le legs politique de la guerre 3 . La France, enfin, est également touchée par le wind of change . La guerre y agit comme un catalyseur. Elle accélère les mutations de la culture politique en favorisant l’émergence d’un patriotisme qui met nettement en exergue la figure du citoyen.

I. Le traumatisme des défaites et les « mauvais propos »

  • 4 Pendant ses premiers mois, la guerre de Sept Ans a été un conflit exclusivement colonial opposant l (...)

2 Cette transformation de la culture politique hexagonale a pour toile de fond un conflit qui a tourné au cauchemar pour les armées de Louis XV. La guerre avait pourtant commencé sous les meilleurs auspices. Le 28 juin 1756, les Français s’emparent de l’île de Minorque, sous contrôle britannique depuis le traité d’Utrecht de 1713. Au même moment, ils infligent de sérieux revers aux redcoats en Amérique du Nord. Mais tout bascule le 5 novembre 1757 lorsque Frédéric II de Prusse écrase à Rossbach les troupes du Prince de Soubise 4 . Dès lors, en Europe comme outre-mer, s’égrène un chapelet de revers humiliants pour l’armée du roi de France. L’année 1759 se montre à ce titre particulièrement cruelle : le 13 septembre, les Français sont vaincus devant Québec. Cette défaite ouvre aux Britanniques les portes du Canada. Privé de forces navales suffisantes après les deux défaites de Lagos (19 août) et des Cardinaux (20 novembre), Louis XV n’est plus en mesure d’assurer la défense de la Nouvelle-France. Un an plus tard, le 8 septembre 1760, Montréal se rend aux forces britanniques. Le Canada français a vécu. Conclue le 10 février 1763 entre la France et la Grande-Bretagne, la paix de Paris résume éloquemment le rapport de force qui s’est imposé pendant les hostilités. Amputée de ses possessions d’Amérique du Nord et réduite en Inde à quelques comptoirs, la France contemple un désastre. La primauté maritime est désormais le fait incontestable de la Grande-Bretagne.

  • 5 « Our bells are worn threadbare with ringing for victories », Horace Walpole à Sir George Montagu, (...)

6 Dziembowski 1998, p. 215-262.

  • 7 [Mopinot de la Chapotte, Antoine-Rigobert], Sous Louis le Bien-Aimé. Correspondance amoureuse et mi (...)

3 Pour reprendre le bon mot d’Horace Walpole, les cloches d’Angleterre se seraient usées prématurément à force de sonner la victoire 5 . Tandis qu’Albion savoure son triomphe, la France broie du noir. Rares sont les français qui prennent alors conscience du bouleversement profond du rapport de force à l’échelle planétaire 6 . Il n’en reste pas moins que la suite presque ininterrompue de revers ainsi que les clauses du traité ne les laissent pas indifférents. À la fin du conflit, écrivant à son ami qui combat en Allemagne, une observatrice rend compte de l’atmosphère pesante régnant à Paris : « On n’entrevoit plus de ressources, on ne voit en perspective qu’un bouleversement général, on ne se console point, on ne se parle que pour dire : “Il faut tous périr” ; on ne pense plus à la paix, elle paraît même impossible. Enfin, une révolution générale est le seul événement que l’on attend. J’ai vu quelques circonstances critiques, mais je n’ai jamais vu un tel accablement 7 . »

4 Le destinataire de cette lettre, Antoine Rigobert Mopinot de la Chapotte, n’est guère en mesure d’éclaircir l’humeur morose des parisiens. À lire sa correspondance, le délabrement moral qui sévit dans l’armée d’Allemagne a en effet atteint un stade très préoccupant :

8 Ibid. , p. 400-401, Mopinot à Mme de ***, au camp de Krumback, 4 août 1762. Il semble que chaque particulier de la nation se soit donné le mot pour coopérer à son anéantissement ; l’état-major est immense mais je ne le vois jamais que dormir, jouer et manger. S’ils montent à cheval, c’est pour éviter les coups et être plus prêts à faire retraite. Si quelqu’un d’entre eux veut servir, il est raillé, vilipendé. C’est un imbécile insupportable pour la bonne compagnie. […] Nous ne sommes plus une nation propre à la guerre 8 .
  • 9 L’engouement pour le roi de Prusse s’explique pour deux raisons majeures. Contrairement à la guerre (...)

10 Correspondance amoureuse , p. 157, Mme de *** à Mopinot, 5 juin 1758.

  • 11 Cité par Auguste Filon, L’ambassade de Choiseul à Vienne en 1757 et 1758. D’après des documents iné (...)
  • 12 Archives de la Bastille, documents inédits , éd. F. Ravaisson-Mollien, Paris, 1866, XVIIII, p. 227 : (...)

5 Venant d’un militaire, les derniers mots sonnent comme un verdict sans appel. L’effondrement moral dont fait état Mopinot doit beaucoup au choc de la défaite de Rossbach et aux déboires ultérieurs subis par l’armée du roi de France. Ces revers à répétition ont également des effets politiques. Dès les premières défaites, s’élèvent dans le royaume des « mauvais propos » attaquant le ministère, la marquise de Pompadour et Louis XV. Bien qu’ennemi et peut-être aussi parce qu’il est l’ennemi de la France et qu’à la tête de son armée, il remporte des victoires 9 , Frédéric II de Prusse est l’objet d’une adulation sans bornes de la part de certains Français : « À Paris, le nombre des Prussiens est plus grand que celui des Français. C’est un mal qui gagne tous les états », remarque l’amie de Mopinot 10 . Au sommet de l’État, l’inquiétude ne cesse de grandir devant cette prussomanie. En septembre 1758, le maréchal de Belle-Isle estime que « la moitié de ce qui habite Paris » est infectée par l’épidémie 11 . Si l’estimation du ministre de Louis XV est exagérée, le constat n’en est pas moins fondé sur des faits avérés. Et ceux-ci sont de nature à alerter l’autorité. En avril 1760, un certain Claude Guétard, négociant à Paris, se fait connaître des « mouches » de la police par ses propos subversifs sur la guerre, le roi de Prusse et le roi de France. Surnommé « le Prussien » dans les cafés qu’il fréquente, Guétard ne fait pas dans la demi-mesure. C’est non seulement un inconditionnel de Frédéric qui s’exprime 12 mais aussi un Parisien qui ne dissimule pas son mépris pour le gouvernement monarchique :

13 Ibid , p. 227-228. De tout temps, les princes n’ont travaillé qu’à satisfaire leurs ambitions et leurs intérêts et n’ont jamais cherché le bonheur de leurs peuples. Nous en voyons l’exemple aujourd’hui : notre roi a-t-il cherché à faire notre bonheur dans cette guerre ? Non ; s’il avait eu se [ sic ] dessein, il n’avait qu’à fortifier notre marine pour détruire celle des Anglais et les empêcher de nous enlever nos colonies. Qu’avait-il à faire de mettre sur pied une armée aussi considérable pour ne rien faire de bon ? 13
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6 Cette position catégorique sur l’inutilité, voire la nocivité des « princes » pose la question de l’antimonarchisme 14 qui émane, tantôt diffus, tantôt plus explicite, de certains écrits du temps. Phénomène marginal ou partie émergée d’un immense iceberg appelé à se révéler au grand jour à la fin du siècle ? Le problème reste entier et le restera sans doute à jamais, faute de sources suffisamment probantes. Reste que le pouvoir royal, comme l’atteste par exemple l’attitude du publiciste gouvernemental Jacob-Nicolas Moreau, prend très au sérieux la montée en puissance de ces « mauvais propos » 15 . Et avec raison : sans aller jusqu’à la dénonciation franche de la monarchie comme le fait Guétard, les mécontents, dont le nombre semble grandir régulièrement avec les revers, se montrent très critiques envers l’autorité. Le responsable des désastres militaires ? Louis XV, roi indolent, dont la soumission à la marquise est telle qu’il lui aurait abandonné le pouvoir. Les chansonniers et les faiseurs d’épigrammes s’en donnent à cœur joie :

16 BN, mss fr., 10479, f. 587. Passant arreste icy et considère Ce grand incestueux, cet yvrogne adultère Qui fut pendant vingt ans le valet d’un prestre Et qui mériteroit aujourd’hui d’être Non de l’Europe le Potentat Mais de Frédéric le goujat 16 .

17 Van Kley 1975, 1984 et 2002 ; Merrick 1990.

18 Chartier 1990, p. 149-151.

7 Défendue par Dale Van Kley et Jeffrey Merrick 17 , l’idée d’une désacralisation de la monarchie pendant le règne de Louis XV a fait l’objet d’un débat important chez les historiens 18 . Même s’il convient de se méfier de la lecture téléologique que cette thèse véhicule, il n’en demeure pas moins que l’image, si ce n’est de la monarchie, mais du moins celle du souverain régnant, est sortie très affectée du conflit. Bien que plus mesurés dans le ton que ceux qu’on vient de lire, les vers du poète Écouchard Le Brun attaquent eux aussi sans ménagement Louis XV, la cour et le ministère :

19 P. D. Écouchard, dit Le Brun, Sur l’état de décadence de la Monarchie française durant la dernière (...) Ici, la Honte est couronnée ; La Vertu rampe profanée Sous le char du Vice insolent : Nul frein à l’aveugle licence ; Thémis y flétrit l’Innocence ; Tout meurt sous un sceptre indolent. […] Partout, à la cour, à l’armée, Règne un dédain de renommée Qui fait la chute des États. Il n’est plus de gloire unanime ; Plus de cet espoir magnanime Qu’enflamme l’aspect du danger. O Nation vile et flétrie, Tu ne connais plus la Patrie ! Comment saurais-tu la venger ? 19

II. Former des citoyens

20 G. F. Coyer, J. N. Moreau, Écrits sur le patriotisme , 1997, p. 41.

21 Ibid ., p. 42-43.

8 Outre ses flèches décochées à l’encontre du pouvoir, le poème d’Écouchard Le Brun développe un thème qui se montre de plus en plus insistant dans les sources à mesure que s’enchaînent les défaites : la nécessité de faire renaître l’amour de la patrie. Cette réflexion sur le patriotisme a commencé à prendre forme en France quelques mois avant l’ouverture des hostilités. Au début de l’année 1755, l’abbé Gabriel-François Coyer fait paraître une petite brochure intitulée Dissertation sur le vieux mot de patrie . L’auteur part d’un constat, celui du déclin du mot « patrie » dans le vocabulaire du temps : « Qu’est-ce que le mot patrie avait de bas ou de dur pour le retrancher de langue ? On ne l’entend plus ou presque plus ni dans les campagnes, ni dans les villes, ni dans la province, ni dans la capitale, encore moins à la Cour 20 ». Pour l’écrivain, la disparition du mot est la conséquence directe du déclin de l’idée même de patrie. De l’Antiquité au xvii e  siècle, la faveur de « patrie », nous dit Coyer, n’a pour ainsi dire jamais cessé. « Je le retrouve encore sous Louis XIII dans les cahiers des derniers États généraux. Il s’est perdu sous le ministère de Richelieu. […] Colbert était bien fait pour le rétablir, mais il se méprit. Il crut que Royaume et Patrie signifiaient la même chose 21 ». En d’autres termes, le mot a décliné à mesure que s’est affirmée la monarchie absolue.

22 Voir Pettit 2004 ; Pocock 1997 et 1998 ; Robbins 1959 ; Skinner 2001.

  • 23 Sur les idées politiques de Coyer, voir Cheminade 1990. Rappelons ici que ce même Coyer est l’auteu (...)

24 G. F. Coyer, J. N. Moreau, Écrits sur le patriotisme , 1997, p. 42.

9 Doit-on en conclure que l’amour de la patrie est fondamentalement incompatible avec la nature du régime ? Coyer est un de ces auteurs qui se rattachent au courant de pensée qui, grâce aux remarquables études dont il a fait l’objet outre-Manche, est mieux connu dans sa variante insulaire que dans son expression hexagonale : le républicanisme classique 22 . La fascination pour la vertu des « républiques » de l’Antiquité est omniprésente dans l’œuvre de ce représentant discret des Lumières 23 . C’est, d’après lui, dans les cités grecques et dans la république romaine que le patriotisme s’est manifesté avec le plus d’éclat : « C’était un des premiers mots que les enfants bégayaient, c’était l’âme des conversations et le cri de guerre. Il embellissait la poésie ; il échauffait les orateurs ; il présidait au Sénat ; il retentissait au théâtre et dans les assemblées du peuple ; il était gravé sur les monuments publics 24 ». Ce parti-pris républicain mènerait logiquement l’auteur à conclure qu’en raison du triomphe de la monarchie absolue, le mot et l’idée de patrie seraient bel et bien morts et enterrés au royaume de France. Mais, aussi étrange que cela puisse paraître de prime abord, il n’en est rien. Dans la suite de son ouvrage, Coyer s’interroge en effet très sérieusement sur les moyens de faire revivre le mot et l’idée dans la France de Louis XV :

Il y avait chez les Grecs et chez les Romains des usages qui rappelaient sans cesse l’idée de la patrie avec le mot : des couronnes, des triomphes, des statues, des tombeaux, des oraisons funèbres. C’était autant de ressorts pour le patriotisme. Il y avait encore des spectacles vraiment publics où tous les ordres rassemblés se délassaient, se réjouissaient en commun, des tribunes où la patrie par la bouche des orateurs consultait avec ses enfants sur les moyens de les rendre heureux et glorieux.
25 Ibid ., p. 48. De tout cela nous n’avons retenu que les oraisons funèbres. Encore faut-il être né avec un très grand nom, ou avoir occupé une très grande place pour avoir ces vertus après sa mort. Tous nos autres discours ne roulent que sur des points de science ou d’histoire qui restent souvent aussi douteux après que le discoureur a parlé. Cette éloquence ne serait-elle pas mieux employée à remercier, à louer publiquement au nom de la patrie quiconque se serait distingué dans les arts, dans le commerce, dans la guerre, dans la magistrature, dans la politique ? L’orateur de la patrie, en célébrant les grands talents, les grandes vertus, formerait des citoyens. Qu’on ne me vante point un grand nom, il est très petit si celui qui le porte est inutile à l’État 25 .
  • 26 Le comptage effectué concerne les titres d’ouvrages figurant dans la bibliographie du siècle des Lu (...)
  • 27 À l’exception notable, dans ces dérivés, de « patriotisme », qui est un néologisme emprunté de l’an (...)

28 Dziembowski 1998, p. 350-368 et p. 508-528.

10 Former des citoyens : le programme de Coyer ne tarde pas à être mis en pratique. C’est ici que la guerre et les défaites militaires agissent comme un catalyseur des mutations en cours. En témoigne en tout premier lieu l’essor remarquable du vocabulaire ayant trait au sentiment national 26 . De 1716 à 1769, l’on relève 207 termes liés à la conscience nationale dans les titres d’ouvrages. L’assertion de Coyer, selon laquelle le mot « patrie » aurait presque disparu du vocabulaire du premier xviii e  siècle, se vérifie. Sur ce total de 207 termes, près des trois-quarts proviennent en effet de livres parus après 1750. Mieux : c’est pendant la guerre de Sept Ans que se situent les temps forts de cette expression patriotique, entre 1759 et 1763. Ce vocabulaire, du reste, n’est pas inerte dans le temps. Jusqu’aux années 1740, seuls « patrie » et ses dérivés 27 , ainsi que « nation », sont présents dans les titres. « Citoyen », dans l’acception qui nous concerne, c’est-à-dire de dévouement pour la communauté, ne fait sa première apparition qu’en 1748. Mais le succès de l’expression nouvelle est immédiat. À lui seul, « citoyen » constitue près du tiers des expressions « patriotiques » figurant dans les titres de livres parus entre 1750 et 1760 28 .

11 En 1748, l’ouvrage qui a contribué à populariser l’acception patriotique de « citoyen » est une brochure de Denis Diderot intitulée Première lettre d’un citoyen zélé, qui n’est ni médecin, ni chirurgien . Diderot y propose une réforme du statut des deux professions. En prenant la plume et en demandant à la communauté de prendre position sur son projet, Diderot n’agit plus simplement en sujet qui se contenterait d’obéir aux lois et aux directives du roi ; il agit en « citoyen zélé », en prenant part activement et spontanément à une œuvre qu’il juge utile pour le bien public.

12 Dès les premiers temps de la guerre, le mot et le programme qu’il porte implicitement en lui, rencontrent les faveurs du public. Un bel exemple de cette aspiration à servir l’État en citoyen nous est donné par la lettre d’un particulier publiée dans l’ Année littéraire à la fin de l’année 1756. Son contenu est on ne peut plus éclairant sur la conception du citoyen qui commence alors à émerger et, partant, sur les contours de ce nouveau patriotisme qui prend forme au royaume de Louis XV :

La guerre injuste que les Anglois nous font aujourd’hui, la perfidie avec laquelle ils s’y sont préparés et l’ont commencée, sont bien capables d’exciter tout François à la vengeance. Il y a des guerres où la nation ne prend intérêt que par soumission pour son Prince ; celle-ci est d’une autre nature ; c’est la nation Angloise qui, d’un accord unanime, attaque la nôtre pour lui enlever un bien propre à chacun de nous. […]
Une partie de la nation agit, combat et expose ses jours pour repousser l’ennemi ; l’autre contribue par le payement des subsides, mais jouit tranquillement du reste de son revenu ou des fruits de son industrie auxquels l’anéantissement du commerce causeroit une grande diminution. L’on n’ignore point que ces subsides ne suffisent pas pour fournir aux dépenses de la guerre, et ne peuvent mettre le Roi en état de faire les établissements que la nature de celle-ci sembleroit désirer.
29 Année Littéraire , 1756, VI, p. 42-44. Il s’agiroit donc d’engager la nation, je veux dire les gens aisés, à faire un effort digne de patriotes vraiment François, en donnant volontairement ce qu’ils pourroient se retrancher […] ce qui cependant feroit un honneur infini à la nation et en particulier à chaque contribuant […] On ose penser que cette contribution se feroit avec plus de succès, si elle étoit destinée à un monument propre à perpétuer l’amour des François envers leur auguste Monarque, et en même temps glorieux et utile à l’État ; tel, par exemple, que l’établissement d’un Port à la Hougue sur le plan qu’en viennent de dresser les Ingénieurs de Sa Majesté 29 .

13 Le caractère exceptionnel du conflit – une guerre de nation à nation, selon l’auteur – appelle une réponse exceptionnelle. De ce fait, l’époque où le sujet attendait patiemment les ordres du souverain pour servir la patrie est révolue. La France ne restera puissante qu’à la condition expresse que les sujets passifs se transforment en citoyens actifs. Mais pour quelle entreprise ? C’est ici que le propos de l’auteur se fait audacieux : loin de se cantonner au paiement de l’impôt, le rôle du troisième Ordre du royaume est de seconder par un élan volontaire la noblesse qui verse son sang pour la patrie. Cette citoyenneté active a pour mission d’œuvrer pour le bien public, en offrant au roi un « monument glorieux et utile à l’État ». Gloire et utilité publique : l’appel de Coyer a bel et bien été entendu. Tout se passe comme si la guerre unissait pour la première fois, dans une même lutte, la noblesse militaire et la roture. Une roture en quelque sorte ennoblie par son action citoyenne.

30 Dziembowski 1998, p. 398-405.

14 Cette citoyenneté active se doit également d’être exemplaire pour susciter des émules. Et ici, à nouveau, Coyer a été écouté. Dès le début du conflit, le théâtre voit naître des pièces qui arborent avec fierté leur message patriotique. À la comédie de la foire, fleurissent des œuvrettes mettant en scène des soldats aux mœurs exemplaires 30 . Puis, le théâtre dans sa forme la plus noble, la tragédie, est lui aussi touché, comme le montre cet Asdrubal, ou l’amour de la Patrie . Coyer demandait des héros dignes d’émulation. L’auteur anonyme d’Asdrubal a répondu à sa requête :

31 Asdrubal, ou l’Amour de la Patrie. Tragédie tirée des Décades de Tite-Live. Par E. A. F. , La Haye, (...) Si j’ai fait mon devoir, si mon zèle est utile, Combien de citoyens, dans une grande ville, Dans l’art de commander, plus habiles que moi, Rempliront les devoirs d’un glorieux emploi 31 .

32 François Charles Vallier, comte du Saussay, Le Citoyen , Nancy, 1759, p. VII.

15 La poésie n’est pas en reste. Dès 1756, des auteurs prennent la plume pour soutenir le roi et ses armées dans le conflit en cours. Le titre de ces œuvres ne laisse pas d’équivoque sur leur contenu. En 1757, l’abbé Porquet publie une Épître à la Nation  ; en 1759, l’abbé Desjardins fait paraître Le Patriotisme  ; en 1760, Alexis Piron écrit une héroïde intitulée Un vieillard à ses compatriotes . Mais c’est sans doute le poème du colonel Vallier paru en 1759 qui résume le mieux les temps nouveaux. Intitulé sobrement Le Citoyen , il est précédé d’une préface très éclairante sur les intentions de son auteur. « C’est un Militaire qui écrit », rappelle Vallier comme pour excuser la rugosité de son style. Mais ce militaire « écrit en Citoyen et pour le Citoyen ». Vallier veut instruire et former ses lecteurs. De son œuvre, « l’on reconnoîtra l’utilité et la gloire qu’un État peut retirer des vrais talens d’un citoyen, appliqués au bien public 32 ». L’obéissance ne suffit plus à définir le véritable patriote. Celui-ci se caractérise par un dévouement spontané à la chose publique. Le sujet s’est fait citoyen. Coyer, à nouveau, a été entendu.

  • 33 Pour un examen détaillé de cette réforme, voir Bonnet 1998, p. 53-66 et, pour sa place dans le cont (...)

16 À la date où paraît le poème de Vallier, la nécessité de former des citoyens a atteint le sommet de la république des Lettres. En 1758, sensible au vent nouveau qui s’est levé dans le pays, Charles Pinot Duclos propose une réforme du concours d’éloquence de l’Académie française dont il est le secrétaire perpétuel. Consacré jusqu’alors à des sujets religieux ou de morale, le concours portera désormais sur « l’éloge des hommes célèbres de la nation » 33 . En 1759, le choix des Quarante pour le sujet du premier concours se porte sur le Maréchal de Saxe. Compte tenu du contexte militaire et politique, on ne pouvait trouver mieux. L’exemple du brillant commandant des troupes françaises pendant la guerre de Succession d’Autriche doit soigner les plaies d’une France durement éprouvée par le conflit en cours. Les mânes du vainqueur de Fontenoy effaceront l’ignominie de la déculottée de Rossbach. Deux ans plus tard, l’actualité militaire guide à nouveau le choix de l’Académie. Après les désastres subis par la marine de Louis XV, c’est au tour de René Duguay-Trouin, symbole de la puissance navale française du temps de Louis XIV, d’être le sujet du concours. Le vainqueur, le poète Antoine-Léonard Thomas, a bien compris la finalité pédagogique de cette éloquence au service de la nation tout entière. Au terme de son éloge, inspiré très certainement par une des meilleures pages du premier Discours de Rousseau, la prosopopée de Fabricius, Thomas fait parler son héros. Et celui-ci, pour redonner du courage aux Français, n’hésite pas à revenir sur les événements dramatiques que vient de connaître la marine de guerre :

34 Antoine-Léonard Thomas, Éloge de René Duguay-Trouin, Lieutenant Général des Armées navales, Command (...) Ah, s’il revenait aujourd’hui, s’il errait parmi nos ports et nos arsenaux, quelle serait sa douleur ! Français, s’écrierait-il, que sont devenus ces vaisseaux que j’ai commandés, ces flottes victorieuses qui dominaient sur l’Océan ? Mes yeux cherchent en vain : je n’aperçois que des ruines. Un triste silence règne dans nos ports. Eh quoi, n’êtes-vous plus le même peuple ? N’avez-vous plus les mêmes ennemis à combattre ? […] Vous avez versé tant de sang pour maintenir la balance de l’Europe ; l’ambition a changé d’objet. Portez, portez cette balance sur les mers. C’est là qu’il faut établir l’équilibre du pouvoir. Si un seul peuple y domine, il sera tyran et vous serez esclaves […] Français, considérez ces mers qui, de trois côtés, baignent votre Patrie. Voyez vos riches provinces qui vous offrent à l’envi tout ce qui sert à la construction. Voyez ces ports creusés pour recevoir vos vaisseaux. La gloire, l’intérêt, la nécessité, la nature, tout vous appelle, Français, soyez grands comme vos ancêtres. Régnez sur la mer, et mon ombre, en apprenant vos triomphes sur les peuples que j’ai vaincus, se réjouira encore dans son tombeau 34 .

17 En s’exprimant de la sorte, Thomas s’est fait poète-citoyen. S’adressant à ses compatriotes par la bouche de Duguay-Trouin, le poète entend lutter contre le défaitisme ambiant, stimuler le patriotisme français pour offrir au roi et à son ministre Choiseul le soutien dont ils ont besoin dans leur lutte contre l’ennemi.

35 Sur le rôle du Monitor dans la politique britannique, voir Peters 1980.

36 Coyer, Moreau, Écrits sur le patriotisme , 1997, p. 59-60.

37 Ibid ., p. 70 et suiv.

18 La propagande gouvernementale emboîte le pas. Pilier du dispositif de persuasion publique pendant la guerre, Jacob-Nicolas Moreau lance en 1760 un périodique dont le titre, le Moniteur français , est ostensiblement emprunté au journal qui soutient la politique du ministre britannique William Pitt, le Monitor , et que Moreau regarde avec raison comme l’un des vecteurs essentiels du patriotisme qui s’épanouit alors outre-Manche 35 . Son Moniteur français entend parvenir au même résultat. La France, nous dit Moreau, possède des potentialités gigantesques mais inexploitées, en raison notamment de l’apathie de la majorité des sujets du roi de France, apathie qui contraste cruellement avec l’enthousiasme qui saisit au même moment la nation britannique 36 . D’où l’objectif de Moreau : que son Moniteur français devienne une tribune patriotique dans laquelle tout Français attaché à son roi et à sa patrie pourra s’exprimer 37 . Moreau, ce publiciste défenseur des fondements traditionnels de la monarchie française, tire un trait sur un passé à jamais révolu, celui d’une France constituée exclusivement de sujets, et ouvre la porte à une France nouvelle, une France de citoyens :

38 Ibid ., p. 73. Puissent nos efforts encourager des écrivains plus dignes d’instruire et plus en état de le faire avec fruit ! Puissions-nous par ce faible essai exciter leur émulation et ranimer leur zèle ! Puisse notre recueil devenir un dépôt précieux où se conserveront toutes les idées honnêtes et toutes les vues utiles de nos concitoyens ! […] Telle est l’idée que nous nous sommes formée à nous-même du Moniteur français . Puisse-t-il justifier le titre que nous lui avons donné ! Puisse-t-il avertir sans aigreur, instruire sans ostentation, reprendre sans malignité, et blâmer sans invective ! Puisse-t-il plaire par la vérité plus que par l’art de la présenter, et prouver, en intéressant le lecteur, que le lecteur est citoyen 38 .

III. Une citoyenneté compatible avec la monarchie absolue ?

19 Mais cette France de lecteurs-citoyens est-elle compatible avec les bases du régime ? Moreau estime très certainement que la conciliation est réalisable. D’autres auteurs partagent son point de vue, comme le poète Charles Pierre Colardeau qui commente dans son poème Le Patriotisme un événement qui a fait grand bruit au cours de l’hiver 1761-1762 : la souscription patriotique lancée pour reconstruire la marine de guerre :

39 Charles-Pierre Colardeau, Le Patriotisme , 1762, p. 6. On les voit, ces François, ces zélés Citoyens, Prodiguer à leur Prince et leur sang et leurs biens ! On porte au pied du Trône un tribut volontaire ; Et Paris a donné quand Londres délibère 39 .

20 À lire le dernier vers, tout se passe comme si un incroyable miracle politique s’était accompli dans la France de Louis XV. N’y verrait-on pas en effet une monarchie absolue, que d’aucuns critiquent pour son « despotisme », prendre l’avantage sur la monarchie limitée d’Angleterre réduite à des délibérations stériles ? N’aurait-on pas vu, lors de la souscription patriotique qui vient d’animer la nation, les « zélés Citoyens » verser un « tribut volontaire » pour reconstruire la marine ? En somme, Louis XV ne régnerait plus simplement sur ses sujets. Il gouvernerait également avec le concours des citoyens. Tel est le message qu’entend diffuser le poète. La réalité, pourtant, est bien plus complexe. Et cette complexité montre à quel point, pour l’autorité, s’avère délicat de transformer les sujets d’un monarque, qui, jusqu’à preuve du contraire, continue de se regarder comme absolu, en citoyens dotés d’une volonté autonome.

40 Supplément de la gazette du 5 décembre 1761 , 49, p. 604-606.

21 En apparence, tout se serait déroulé comme le chante le poète : le 26 novembre 1761, les États de Languedoc, sur la proposition de leur président, l’archevêque de Narbonne Charles-Antoine de La Roche-Aymon, offrent une somme d’argent pour la construction d’un vaisseau de ligne. Officiellement, l’initiative est spontanée. Du moins c’est ce qu’en dit la Gazette de France , qui s’empresse de rapporter cet acte de dévouement patriotique en louant l’esprit citoyen qui en émane 40 .

22 Ce que la Gazette omet cependant de signaler, c’est que cette citoyenneté prétendue spontanée a été provoquée et encadrée en haut lieu. L’initiateur et l’ordonnateur de cette remarquable campagne de persuasion publique n’est autre que le ministre de Louis XV, Étienne-François, duc de Choiseul. Observateur sagace de l’humeur publique, Choiseul est conscient comme Moreau des potentialités morales des Français, qui brûlent de se dévouer pour le bien public. Mais le ministre, et toujours comme Moreau, a réalisé que ces mêmes Français qui ont hâte de participer à la vie publique en citoyens, ne souhaitent pas qu’on leur force la main, qu’on les considère comme des sujets en leur intimant l’ordre de donner leur argent.

41 Lacour-Gayet 1902, p. 388-390 ; Dziembowski 1998, p. 458-462.

  • 42 Jean-Henri Maubert de Gouvest, Lettres du Chevalier Robert Talbot, de la suite du duc de Bedford à (...)

23 Il en découle le stratagème des dons de vaisseaux monté par le ministre. Présenté officiellement dans la presse comme une initiative spontanée, le don gratuit des États de Languedoc a en réalité été décidé à Versailles. Choiseul a demandé à La Roche-Aymon de faire sa proposition d’obole patriotique en la présentant comme une initiative spontanée 41 . Et, comme l’écrit un contemporain, « la mèche a pris » sans délai 42 . Relayée par la presse, la proposition des États de Languedoc déchaîne un enthousiasme extraordinaire. Tout d’abord, les autres États provinciaux ne veulent pas être en reste. Puis, les grands corps du royaume, les fermiers généraux, les chevaliers du Saint-Esprit emboîtent le pas. Enfin, et c’est capital, une foule de particuliers qui, se sentant enfin utiles à la patrie, endossent le costume flambant neuf du citoyen et offrent leur obole au roi. Le résultat de l’opération est saisissant. Grâce à l’argent amassé, ce sont seize vaisseaux de ligne qui peuvent être mis en chantier. Le nom de ces vaisseaux, qui atteste de leur origine patriotique, mérite notre attention. Les uns rappellent l’origine géographique ou corporative des dons qui ont permis leur construction, comme Le Languedoc , La Bourgogne , La Ville de Paris , Le Bordelais , Le Marseillais , Les Six Corps ou encore La Ferme . Mais ce sont surtout les noms de deux d’entre eux qui nous font mesurer le basculement qui est en train de s’opérer dans cette France qui n’est plus tout à fait une France de sujets. Jamais dans l’histoire de la monarchie l’on n’a vu des vaisseaux nommés L’Utile ou Le Citoyen.

24 La conception contemporaine du citoyen, telle que la Révolution française l’élèvera à la postérité, naît dans les dernières décennies de l’Ancien Régime à la faveur d’une réflexion menée par certains philosophes : Diderot, tout d’abord, mais surtout Gabriel-François Coyer. Cette réflexion se trouve presque aussitôt confrontée à un test grandeur nature : une guerre exceptionnelle, qui, comme le souligne le citoyen du Havre dont on a lu le projet, doit intéresser la nation tout entière et non point simplement le second Ordre. La poussée brutale du vocabulaire patriotique constitue un bel indicateur de la mutation affectant la culture politique de ces années médianes du xviii e  siècle. Les Français font l’expérience d’un langage nouveau d’où émergent les mots magiques de « patriote », de « patriotisme », de « nation » et de « citoyen ». Magiques ces expressions le sont car elles portent en elles tout un programme. Constituée exclusivement jusqu’ici de sujets du monarque, la France voit apparaître un être étrange : le citoyen. Citoyen qui, certes, se regarde comme un fidèle sujet, mais qui, en devançant l’ordre du souverain pour offrir spontanément ses services, porte atteinte à l’édifice politique et social de la France d’Ancien Régime.

  • 43 Bien que critiquable sur des points de détail, la lecture qu’a faite Jürgen Habermas de l’espace pu (...)

25 Apparu dans la sphère publique politique 43 , échappant dans ses premiers temps au contrôle du pouvoir, le nouveau citoyen, à mesure que s’affirme la vague de patriotisme, est regardé avec une attention croissante par l’autorité monarchique. Mais avec quel résultat ? En d’autres termes, est-il possible de discipliner cette France de citoyens pour la rendre compatible avec les bases d’une monarchie absolue ? Le stratagème des dons de vaisseaux mis sur pied par Choiseul nous donne déjà un élément de réponse. Le ton de certaines œuvres citoyennes confirme cette première impression.

  • 44 Le thème des sillons ensanglantés, en particulier, est très présent dans cette poésie de fer et de (...)

26 Rien n’est plus éloquent que cette espèce de Marseillaise en pièces détachées qui se découvre dans la poésie guerrière de l’époque de la guerre de Sept Ans 44 . En 1762, commentant les dons de vaisseaux, Écouchard Le Brun va à l’essentiel : cette France de citoyens ne devrait pas, à l’en croire, se contenter d’offrir son argent pour relever la marine. C’est un appel à la citoyenneté en armes qu’il lance à ses compatriotes, toutes conditions confondues :

45 P. D. Écouchard, dit Le Brun, Ode aux Français sur la guerre présente, par un citoyen (1762), dans (...) Français, ressaisissez le char de la victoire ; Aux armes, Citoyens ! il faut tenter le sort. Il n’est que deux sentiers dans les champs de la gloire : Le triomphe ou la Mort 45 .

27 À la lecture de ces œuvres de circonstance, force est de reconnaître que ce nouveau patriotisme à la fois porteur et promoteur d’une citoyenneté active s’avère difficilement soluble dans ce que l’on nommera quelques décennies plus tard l’Ancien Régime.

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1 W. Churchill, A History of the English-Speaking Peoples , vol. 3 : The Age of Revolution , New York, 1957, p. 127-135 : Ch. 11 : « The First World War ».

4 Pendant ses premiers mois, la guerre de Sept Ans a été un conflit exclusivement colonial opposant la France à la Grande-Bretagne. Mais la signature le 16 janvier 1756 de la convention anglo-prussienne de Westminster, puis le traité de Versailles conclu le 1 er mai 1756 entre la France et la maison d’Autriche modifient totalement la donne diplomatique. Le 29 août 1756, Frédéric II de Prusse envahit la Saxe et menace la Bohême. Mettant en branle l’engrenage des alliances, le conflit se propage alors à l’Europe. En 1757, tandis que la guerre continue de faire rage en Amérique et en Inde, l’armée de Louis XV intervient massivement en Allemagne dans une coalition dirigée contre la Prusse. Cette dispersion des forces françaises est une des causes des défaites en série qui commencent avec celle de Rossbach.

5 « Our bells are worn threadbare with ringing for victories », Horace Walpole à Sir George Montagu, 21 octobre 1759 ( Letters from the Hon. Horace Walpole to George Montagu, Esq., from the Year 1736 to the Year 1770 , Londres, 1818, p. 180).

7 [Mopinot de la Chapotte, Antoine-Rigobert], Sous Louis le Bien-Aimé. Correspondance amoureuse et militaire d’un officier pendant la guerre de Sept Ans (1757-1765  [après : Correspondance amoureuse ], éd. Jean Lemoine, Paris, 1905, p. 345, Madame de *** à Mopinot, Paris, 30 juillet 1761.

8 Ibid. , p. 400-401, Mopinot à Mme de ***, au camp de Krumback, 4 août 1762.

9 L’engouement pour le roi de Prusse s’explique pour deux raisons majeures. Contrairement à la guerre de Succession d’Autriche (1744-1748), au cours de laquelle il prit part aux campagnes militaires, Louis XV n’est pas présent à la tête de son armée pendant la guerre de Sept Ans. Comme par un jeu de vases communicants, l’absence du roi de France du lieu des combats profite au roi de Prusse, souverain qui risque quotidiennement sa vie sur le champ de bataille. Tandis que la popularité de Louis XV décline, celle de Frédéric ne cesse de croître auprès de Français émerveillés par sa bravoure et ses succès militaires. La vague de prussomanie est aussi le résultat d’une habile campagne de propagande par voie imprimée lancée par Frédéric II en direction de l’opinion française. Sur ce dernier point, voir Dziembowski 2015, p. 445-450.

11 Cité par Auguste Filon, L’ambassade de Choiseul à Vienne en 1757 et 1758. D’après des documents inédits , Paris, 1872, p. 143, le maréchal de Belle-Isle au duc de Choiseul, Versailles, 16 septembre 1758.

12 Archives de la Bastille, documents inédits , éd. F. Ravaisson-Mollien, Paris, 1866, XVIIII, p. 227 : Guétard « se plaignait de la mauvaise administration de la France et faisait l’éloge du roi de Prusse qui, disait-il, ne fait pas tuer les hommes pour rien, comme on fait en France ».

13 Ibid , p. 227-228.

14 Il convient de distinguer l’antimonarchisme, c’est-à-dire l’hostilité viscérale et farouche à la monarchie, du républicanisme classique, qui, au xviii e  siècle, imprègne la pensée de certains penseurs français (pensons, par exemple à Montesquieu). Comme l’a bien montré John Pocock, ce républicanisme classique peut très bien s’accommoder de la présence d’un roi. C’est plus un discours qu’un programme (J. G. A. Pocock, préface de James Harrington, Océana , Paris, 1995, p. 24).

15 G. F. Coyer, J. N. Moreau, Écrits sur le patriotisme, l’esprit public et la propagande au milieu du xviii e  siècle , éd. E. Dziembowski, La Rochelle, 1997, p. 57-61.

16 BN, mss fr., 10479, f. 587.

19 P. D. Écouchard, dit Le Brun, Sur l’état de décadence de la Monarchie française durant la dernière moitié du règne de Louis XV , dans Œuvres , Paris, 1811, I, p. 153-154.

23 Sur les idées politiques de Coyer, voir Cheminade 1990. Rappelons ici que ce même Coyer est l’auteur en 1756 de La noblesse commerçante , ouvrage qui a fait grand bruit à sa sortie. Coyer y exhorte la noblesse à se rendre utile à la patrie en se lançant dans le négoce.

25 Ibid ., p. 48.

26 Le comptage effectué concerne les titres d’ouvrages figurant dans la bibliographie du siècle des Lumières publiée par Pierre M. Conlon (P. M. Conlon, Le siècle des Lumières. Bibliographie chronologique , Genève, 1983-2009, 32 vols). J’ai retenu les occurrences de termes ayant rapport avec la conscience nationale : « patrie », « patriote », « compatriote » et « patriotisme » ; « nation » et « national » et, enfin, « citoyen », en prenant soin, pour ce dernier terme, d’exclure son acception bourgeoise, comme, par exemple, dans « J. J. Rousseau, citoyen de Genève ».

27 À l’exception notable, dans ces dérivés, de « patriotisme », qui est un néologisme emprunté de l’anglais. Sa première occurrence en titre d’ouvrage date de 1750, avec la traduction par Claude de Thiard, comte de Bissy, des Letters on the Spirit of Patriotism de lord Bolingbroke.

29 Année Littéraire , 1756, VI, p. 42-44.

31 Asdrubal, ou l’Amour de la Patrie. Tragédie tirée des Décades de Tite-Live. Par E. A. F. , La Haye, 1757, p. 41, acte III, scène 5.

33 Pour un examen détaillé de cette réforme, voir Bonnet 1998, p. 53-66 et, pour sa place dans le contexte de la guerre de Sept Ans, Dziembowski 1998, p. 414-421.

34 Antoine-Léonard Thomas, Éloge de René Duguay-Trouin, Lieutenant Général des Armées navales, Commandeur de l’Ordre royal et militaire de St. Louis. Discours qui a remporté le prix de l’Académie Françoise en 1761 , Paris, 1761, p. 41-42.

38 Ibid ., p. 73.

39 Charles-Pierre Colardeau, Le Patriotisme , 1762, p. 6.

42 Jean-Henri Maubert de Gouvest, Lettres du Chevalier Robert Talbot, de la suite du duc de Bedford à Paris en 1762, sur la France comme elle est dans ses divers départemens avec nombre de particularités intéressantes touchant les hommes en place , Amsterdam, 1766, II, p. 122.

43 Bien que critiquable sur des points de détail, la lecture qu’a faite Jürgen Habermas de l’espace public de la France d’Ancien Régime s’avère pertinente, notamment son analyse d’une sphère publique politique de plus en plus autonome de la sphère du pouvoir public. Voir Habermas 1986.

44 Le thème des sillons ensanglantés, en particulier, est très présent dans cette poésie de fer et de feu. Un bel exemple nous en est fourni par l’ Adresse à la nation anglaise de Pierre Lefebvre de Beauvray : « Et dans tes murs, au gré de ta fureur extrême/Sans cesse chaque jour te tourmentant toi-même/Va pour t’entre-détruire armer tes bataillons/Et de ton sang impur abreuver tes sillons. » ( Adresse à la Nation Angloise, poème patriotique, par un citoyen, sur la guerre présente , Amsterdam, 1757, p. 11-12).

45 P. D. Écouchard, dit Le Brun, Ode aux Français sur la guerre présente, par un citoyen (1762), dans Œuvres , Paris, 1811, I, p. 222-223.

Professeur d’histoire moderne à l’Université de Bourgogne Franche-Comté, Centre Lucien Febvre (EA 2273).

Du même auteur

  • Le legs politique de la guerre de Sept Ans en Grande-Bretagne : du patriotisme au radicalisme in Vers un nouveau monde atlantique , , 2016
  • Remarques sur les transferts culturels franco-britanniques au XVIII e siècle in Les circulations internationales en Europe , , 2010
  • La place des années médianes du XVIII e siècle dans l’histoire politique de la Grande-Bretagne in Les âges de Britannia , , 2015
  • Tous les textes

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La guerre de Sept Ans (1756-1763) et l’affirmation du citoyen français

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dissertation guerre de sept ans

La guerre de Sept Ans : première guerre mondiale ?

La guerre de Sept Ans (1756-1763) ne se limite pas à l’Europe. Son champ de bataille est le monde des empires coloniaux. Outre l’Amérique et l’Europe, l’Inde, l’Asie et l’Afrique furent affectées par un conflit dont ces espaces n’étaient pas seulement le théâtre mais aussi l’enjeu.

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La guerre de Sept Ans se déroule officiellement entre 1756 (date de l’attaque de la Saxe par la Prusse de Frédéric II) et 1763 (date du traité de Paris, le 10 février). En réalité, elle s’enchâsse dans une série de conflits qui ont commencé peu après 1690 entre Hollandais, Français et Anglais pour se terminer le 18 juin 1815, à la bataille de Waterloo, par la défaite surprise mais cuisante de Napoléon et la victoire définitive des Anglais dans la maîtrise de la domination d’un « espace-monde ».

Dans cette seconde guerre de Cent Ans, entrecoupée de guerre froide et de conflits de plus en plus violents, toutes les périodes ne se ressemblent pas. De 1690 à 1740 , la guerre des rois se construit sur des alliances classiques dont le traité d’Utrecht a fixé la ligne en 1713. Puis, de la guerre de Succession d’Autriche ( 1740 - 1748 ) à la guerre d’Indépendance américaine ( 1776 - 1783 ), le monde européen et ses empires coloniaux en Afrique, en Asie, en Amérique basculent dans une nouvelle dimension économique, stratégique et diplomatique.

La guerre de Sept Ans marque un paroxysme notamment car elle fut une guerre mondiale par l’ampleur des champs de bataille choisis ou imposés par les protagonistes sur presque tous les continents du monde, comme nous pouvons le voir sur cette carte.

La guerre de Sept Ans a également enfanté une conception contemporaine de la guerre : la recherche du démantèlement des forces de l’adversaire dans sa capitulation. Le traité de Paris signé par George III d’Angleterre, Louis XV et Charles III d’Espagne est une catastrophe pour la France , qui perd presque toutes ses possessions coloniales : Louisbourg au Canada, le Sénégal, Chandernagor, Pondichéry en Inde, ses forts autour des Grands Lacs américains, mais sauve de justesse Saint-Domingue.

Texte issu de l'article «  1763 : la catastrophe française  », Pierre Serna, L'Histoire n°393, novembre 2013 à lire ici .

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  • Géopolitique
  • Cours : La dimension politique de la guerre : des conflits interétatiques aux enjeux transnationaux

La dimension politique de la guerre : des conflits interétatiques aux enjeux transnationaux Cours

L'analyse de la guerre de Sept Ans (1756-1763) et des guerres révolutionnaires et napoléoniennes (1792-1815) permet de comprendre des conflits interétatiques et de saisir la rupture fondamentale opérée par la Révolution française. Carl von Clausewitz, militaire prussien, propose un ouvrage majeur sur la guerre et sur cette rupture. La réflexion de Carl von Clausewitz est soucieuse de formuler les principes fondamentaux de la guerre tout en prenant en compte les exceptions à ces principes. L'étude comparative des guerres irrégulières de la fin du XX e siècle et le début du XXI e siècle avec les critères de Carl von Clausewitz permet de poser les questions suivantes. Au-delà des mutations historiques, la guerre a-t-elle changé de nature ou simplement de forme ? Dans quelle mesure, en l'espace de plus de deux siècles et demi, la guerre a-t-elle connu des mutations, la transformant de conflits essentiellement entre des États en des conflits irréguliers et marqués par la dimension transnationale ? Quels en sont les facteurs explicatifs et dans quelle mesure le développement de nouveaux acteurs a-t-il contribué à ce changement ?

chronologie de la dimension politique de la guerre

De la guerre de Sept Ans aux guerres napoléoniennes

Pour Clausewitz, la guerre est la « continuation de la politique par d'autres moyens ». C'est ce que l'on observe, selon lui, des guerres jusqu'à la période révolutionnaire, à la fin du XVIII e siècle. La guerre de Sept Ans en est un exemple intéressant du fait de sa conduite par des chefs d'État dans un souci d'adapter l'outil militaire à des objectifs politiques précis, les vainqueurs étant ceux qui arrivèrent le mieux à conjuguer les deux.

La guerre de Sept Ans

La guerre de Sept Ans est une des premières guerres aux dimensions mondiales. C'est une guerre classique , entre batailles, renversement d'alliances et négociations diplomatiques.

D'une guerre interétatique à une guerre mondiale

La guerre de Sept Ans (1756-1763) est une guerre interétatique, opposant deux coalitions. En réalité, il y a deux guerres parallèles : l'une, continentale et européenne, et l'autre, maritime et coloniale, qui transforme la première en guerre mondiale. Les causes sont d'abord une volonté d'extension territoriale, mais aussi de domination des mondes extra-européens.

Deux coalitions s'opposent durant la guerre de Sept Ans :

  • La première coalition est l'alliance entre l'Angleterre et la Prusse par le traité de Westminster en 1756. L'enjeu est de protéger le Hanovre, une terre allemande importante pour l'Angleterre car la dynastie régnante d'Angleterre est originaire du Hanovre.
  • La seconde coalition regroupe la France, l'Autriche et la Russie (deux traités de Versailles, 1756 et 1757) puis l'Espagne (1761). L'objectif est de démembrer la Prusse.

En réalité, les enjeux sont bien plus vastes et les causes de la guerre de Sept Ans sont doubles :

  • l'extension des conquêtes territoriales des royaumes d'Europe centrale, notamment la Prusse face à l'Autriche et à la Russie ;
  • l'affirmation des ambitions économiques et coloniales de l'Angleterre face à la France.

la guerre de Sept Ans, guerre interétatique puis guerre mondiale

Les alliances de la guerre de Sept Ans

d'après Wikimedia Commons

La guerre de Sept Ans est une guerre mondiale dans le sens où les territoires impliqués sont répartis partout dans le monde, de l'Europe à l'Inde et à l'Amérique du Nord :

  • La guerre est terrestre en Europe centrale, et maritime en Méditerranée et sur la façade atlantique.
  • L'Inde est concernée par les conquêtes de points d'appui commerciaux afin de s'étendre vers l'intérieur des terres.
  • Le véritable enjeu se situe en Amérique du Nord avec le Canada français, convoité par les Britanniques.

La guerre de Sept Ans est une guerre maritime qui contribue à la mondialisation du conflit pour deux raisons :

  • La supériorité de l'Angleterre dans ce domaine est le résultat d'une politique navale menée depuis 1688 (« blue water policy ») et d'une véritable politique impériale de guerre.
  • Les dimensions géographiques du conflit : les colonies ne peuvent être reliées à l'Europe que par la voie maritime, en temps de paix comme en temps de guerre.

Durant la guerre de Sept Ans, le rapport de force est nettement favorable à l'Angleterre :

  • 4 fois plus de vaisseaux que la France ;
  • 5 fois plus d'hommes ;
  • 25 fois plus d'argent.

Une guerre classique

La guerre de Sept Ans est une guerre classique marquée par de nombreuses batailles, des renversements d'alliances et des négociations diplomatiques.

La guerre de Sept Ans est marquée par de nombreuses batailles dont les victoires sont décisives dans l'issue du conflit.

  • Victoire de la France sur l'Angleterre à Klosterzeven (1757)
  • Victoire du roi de Prusse Frédéric II à Rossbach (1757)

Cette guerre est marquée par des renversements d'alliances. Dès le départ, l'alliance entre la France et l'Autriche, adversaires depuis 250 ans, crée une surprise. Puis, à la fin de la guerre, en 1762, la tsarine de Russie, Elisabeth, meurt, et son successeur, Pierre III, admirateur du roi de Prusse, arrête la guerre et va jusqu'à s'allier avec lui.

Enfin, comme toute guerre interétatique de cette époque, des négociations sont lancées alors même que le conflit n'est pas achevé, une fois les objectifs plus ou moins atteints. La paix est signée par deux traités :

  • le traité de Paris (février 1763) : entre la France et l'Angleterre ;
  • le traité de Hubertsbourg (février 1763) : entre l'Autriche et la Prusse.

Par ailleurs, la guerre a affaibli la population et a coûté beaucoup aux royaumes impliqués.

En Angleterre, le coût de la guerre de Sept Ans a été le double de la précédente, la guerre de Succession d'Autriche (1740-1748).

Cette guerre concrétise la suprématie maritime, économique et coloniale de l'Angleterre ainsi que l'affirmation de la puissance de la Prusse en Europe (qui sera le royaume fondateur de l'Allemagne au XIX e siècle) et le recul de la puissance coloniale française.

C'est une guerre interétatique régulière mais également, déjà, irrégulière en mer par la « guerre de course ». La guerre de course consiste à utiliser des corsaires, c'est-à-dire de marins mandatés par un roi pour attaquer les navires des adversaires, très souvent marchands (à ne pas confondre avec les pirates qui, eux, sont bandits indépendants). La guerre irrégulière – conflit qui oppose des adversaires de taille et de capacités inégales – s'oppose à un conflit régulier où l'égalité est de mise.

Les guerres révolutionnaires et napoléoniennes

Les guerres révolutionnaires et les guerres napoléoniennes bouleversent l'Europe. Elles ont des spécificités qui les distinguent des guerres passées.

L'Europe bouleversée par la Révolution et l'Empire

La Révolution française de 1789 puis les guerres de conquête napoléoniennes, menées sous la Révolution puis sous l'Empire, vont bouleverser l'Europe du XIX e siècle.

La Révolution française est porteuse de nouvelles idées politiques : liberté, égalité, Droits de l'homme, etc. Ces idées sont accueillies avec un certain enthousiasme en Europe par les élites éclairées, mais aussi avec une grande méfiance puis une ferme opposition de la part des monarchies.

L'internationalisation de la Révolution française se transforme en conflit à l'échelle européenne : les guerres entre les révolutionnaires français et les monarchies européennes à partir de 1792 sont d'abord des défaites françaises puis des victoires dont la première, et la plus célèbre, est celle Valmy, le 20 septembre 1792.

l'Europe bouleversée par la Révolution et l'Empire

© Wikimédia Commons

Aux guerres révolutionnaires succèdent les conquêtes de Napoléon Bonaparte (1796-1799) puis de Napoléon I er (1805-1814). Le territoire de la France atteint son maximum en 1811. D'abord considérée comme libératrice, la présence française est aussi répressive et violente. En réaction, on observe des mouvements de guérilla comme en Espagne à partir de 1808. Entre 1792 et 1815, à cause des deux Napoléon, l'Europe connaît une guerre quasi-permanente.

Les spécificités de ces guerres

Ces guerres ont des spécificités par rapport aux précédentes. Les guerres après la Révolution et les guerres napoléoniennes ont une dimension idéologique. Le nombre de soldats est beaucoup plus important, l'armée française est plus jeune et réorganisée.

Ces guerres ont une dimension idéologique :

  • Les guerres qui ont lieu au moment de la Révolution française et ensuite lors de la I re République ont notamment pour but la défense de la République et des Droits de l'homme.
  • Les guerres napoléoniennes sont surtout des guerres de conquête de Napoléon, héritier de la Révolution mais également chef d'un nouvel empire.

Les effectifs de l'armée sont nettement plus importants. Cela s'explique par :

  • les levées en masse des hommes ;
  • l'imposition de la conscription, c'est-à-dire du service militaire obligatoire à partir de 1793, renouvelé en 1798 ;
  • le recrutement européen de la Grande Armée (armée de Napoléon I er ).

Effectifs de l'armée française :

C'est une armée nouvelle, marquée par le rajeunissement des officiers et par une réorganisation, qui contribue à une mutation de la guerre. En effet, avec la Révolution française, une grande partie des officiers nobles, par conviction politique, ont fui et émigré, remplacés par des jeunes sous-officiers et officiers chez lesquels l'expérience sur le terrain et une plus grande place à l'esprit d'initiative sont valorisées.

  • Napoléon Bonaparte est général de brigade à 24 ans.
  • Lazare Hoche, sergent en 1789, devient général à 25 ans en 1793.

L'armée est réorganisée :

  • création d'un état-major général, du principe de la division, unité militaire mêlant des troupes d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie ;
  • nouvelle tactique où l'offensive et la poursuite de l'adversaire jusqu'à l'anéantissement, sont privilégiées.

Penser la guerre : la révolution clausewitzienne

Ces guerres ont été une source de réflexion pour Carl von Clausewitz, qui y a participé. Les réflexions de ce militaire prussien ont été déterminantes pour penser la guerre depuis le XIX e siècle.

Carl Von Clausewitz (1780-1831)

Carl Von Clausewitz est un militaire prussien issu d'un milieu modeste. Il rédige un ouvrage politique important au moment des guerres napoléoniennes, De la guerre .

Né en 1780, dans une famille d'origine modeste, Clausewitz commence très jeune à servir dans l'armée et participe à la campagne du Rhin en 1793-1794. Grâce à un travail assidu, il intègre l'Académie militaire de Berlin en 1801, dirigée par Gerhard von Scharnhorst (1755-1813), qui deviendra son mentor et protecteur.

Pendant la campagne de 1806, il sert en tant que capitaine et aide de camp du prince Auguste de Prusse. Il est capturé lors de la bataille d'Auerstedt et passe sa captivité en France et en Suisse. À son retour, il devient l'adjoint de Gerhard von Scharnhorst en 1809 et participe à la réforme de l'armée prussienne qui est une réforme en profondeur, pas seulement de l'armée, mais aussi intellectuelle et morale. Un an plus tard, il est en charge de la formation militaire du prince héritier de Prusse, le futur Guillaume I er .

Après un passage dans l'armée russe, par refus de collaborer avec Napoléon I er , il réintègre l'armée prussienne à des postes opérationnels et devient directeur administratif de l'Académie militaire de Berlin de 1818 à 1830. C'est durant cette période qu'il rédige son ouvrage De la guerre , publié entre 1832 et 1837 par sa veuve, après sa mort des suites du choléra en 1831.

Les idées révolutionnaires de Clausewitz sur la guerre

L'objectif de l'ouvrage De la guerre est de connaître la guerre. L'ouvrage est révolutionnaire, Clausewitz cherche à comprendre ce qu'est la guerre dans sa globalité, il la pense dans sa totalité. Sa théorie repose sur trois axes fondamentaux ainsi que sur une distinction entre « guerre absolue » et « guerre réelle ».

L'ouvrage est composé de huit livres répartis en trois parties. Le livre I, dans lequel il présente les définitions essentielles, est le seul que Clausewitz considérait comme achevé. L'auteur cherche à comprendre la guerre et construit une théorie de la guerre par une confrontation avec l'expérience. Dans son introduction de 1816-1817, il écrit :

« Il ne faut pas trop laisser croître les feuilles et les fleurs théoriques des arts pratiques, mais les approcher de l'expérience qui est leur terrain naturel. »

Carl von Clausewitz

De la guerre , Introduction

Clausewitz cherche à penser la guerre dans sa totalité, dans sa relation avec une globalité (situation historique, politique, poids du hasard, etc.). En cela, ses idées sont révolutionnaires.

« La guerre n'est rien d'autre qu'un duel à une plus vaste échelle. […] La guerre est donc un acte de violence destinée à contraindre l'adversaire à exécuter notre volonté. […] La violence, c'est-à-dire la violence physique […] est donc le moyen : la fin est d'imposer notre volonté à l'ennemi. […]

Nous répétons donc notre déclaration : la guerre est un acte de violence et il n'y a pas de limite à la manifestation de cette violence. Chacun des adversaires fait la loi de l'autre, d'où résulte une action réciproque qui, en tant que concept, doit aller aux extrêmes. […]

Nous voyons donc que la guerre n'est pas seulement un acte politique, mais un véritable instrument politique, une poursuite des relations politiques, une réalisation de celles-ci par d'autres moyens. […]

La guerre n'est donc pas seulement un véritable caméléon qui modifie quelque peu sa nature dans chaque cas concret, mais elle est aussi, […] une étonnante trinité où l'on retrouve d'abord la violence originelle de son élément, la haine et l'animosité, qu'il faut considérer comme une impulsion naturelle aveugle, puis un jeu des probabilités et du hasard qui font d'elle une libre activité de l'âme, et sa nature subordonnée d'instrument du politique, par laquelle elle appartient à l'entendement pur. »

De la guerre , première partie, livre I, La Nature de la guerre , chapitre 1, « Qu'est-ce que la guerre ? »

La théorie de Clausewitz repose sur trois axes fondamentaux :

  • La guerre est un « duel à grande échelle » opposant deux entités se reconnaissant comme ennemies.
  • La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens et est donc subordonnée au pouvoir politique.
  • La guerre est « un véritable caméléon qui modifie quelque peu sa nature dans chaque cas concret » : chaque guerre est à analyser en tant que telle.

Cela aboutit à « une étonnante trinité » que les spécialistes appellent aussi « la Formule » :

conception de la guerre Carl von Clausewitz

Par ailleurs, Clausewitz fait une distinction entre « guerre absolue » et « guerre réelle » :

  • La guerre absolue est la guerre de manière conceptuelle dans laquelle existe une ascension jusqu'aux extrêmes et donc une absence de limites.
  • La guerre réelle est celle telle qu'elle se déroule dans la réalité avec l'importance du contexte politique, du rôle des personnalités des chefs militaires, du hasard, etc.

La guerre réelle peut se rapprocher de sa forme absolue dans certains cas, notamment par la défaillance ou l'absence du pouvoir politique.

Les militaires prennent le pouvoir et le seul but devient l'écrasement de l'adversaire.

Pour Carl von Clausewitz, les guerres révolutionnaires et surtout napoléoniennes contribuent à ce rapprochement par la participation du peuple à la guerre, provoquant une radicalisation de la guerre :

  • par des armées numériquement plus nombreuses ;
  • par l'importance de l'idéologie.

Avec la Révolution française, « la guerre était soudain redevenue l'affaire du peuple et d'un peuple de 30 millions d'habitants qui se considéraient tous comme citoyens de l'État. »

De la guerre , troisième partie, livre VIII, Le Plan de la guerre , chapitre 1

L'analyse clausewitzienne est donc bien une tentative de penser la guerre dans sa totalité et une théorie générale de l'action raisonnable en milieu incertain.

Le modèle de Clausewitz à l'épreuve des « guerres irrégulières » : d'Al-Qaïda à Daech

L'apparition de réseaux et de groupes terroristes constitue une nouveauté du fait de ses dimensions mondialisées et de son fonctionnement en réseau. Al-Qaïda et l'Organisation de l'État islamique procèdent de stratégies différentes même si la seconde est un dérivé de la première. Ces organisations ont eu recours à la guerre irrégulière ou asymétrique.

D'Al-Qaïda à Daech : ressemblances et différences

Les réseaux terroristes Al-Qaïda et Daech livrent une guerre irrégulière et asymétrique à dimension idéologique (islamisme). Ils présentent des similitudes mais également des différences dans leur stratégie.

Al-Qaïda est née dans le combat contre les Soviétiques en Afghanistan, sa création officielle au Pakistan date de 1988. Il s'agit d'un réseau transnational de l'islam internationalisé, implanté dans des territoires peu accessibles géographiquement :

  • au Soudan en 1991 ;
  • en Afghanistan en 1996 ;
  • au « Af-Pak » (région frontalière au Pakistan, à proximité de l'Afghanistan) en 2001.

Le but d'Al-Qaïda est décrit dans Le Front islamique mondial contre les juifs et les croisés , un texte d'Oussama ben Laden et d'Ayman al-Zawahiri datant de 1988. Dans ce texte, deux cibles majeures sont citées :

  • « ennemi proche » : régimes politiques du monde arabo-musulman compromis avec l'Occident ;
  • « ennemi lointain » : les États-Unis et l'Europe, le monde occidental de manière générale.

Daech ou OEI (Organisation de l'État islamique) est né en Irak dans le combat contre les États-Unis en 2006. Il s'agit de la transformation d'une « filiale » régionale d'Al-Qaïda en centre leader du djihad mondial. Abou Bakr al-Baghdadi, tué en 2019, joue un rôle majeur dans la création de l'organisation, au printemps 2013. À partir de janvier 2014, on observe une extension territoriale importante à partir de Falloujah (lieu de naissance d'Al-Baghdadi) et avec la prise de Mossoul en juin 2014 (2 e ville d'Irak avec des ressources considérables). L'organisation change de nom et devient l'Organisation de l'État islamique (OEI). Le 29 juin 2014, Daech proclame le califat : Al-Baghdadi se proclame ainsi « successeur » de Mahomet.

Daech se différencie d'Al-Qaïda sur plusieurs points :

  • Le territoire : pour les dirigeants d'Al-Qaïda, avoir un territoire signifie être vulnérable, il faut rester dans le nomadisme djihadiste tant que l'Occident n'est pas assez affaibli. Daech, au contraire, construit un État avec des terres et a vocation à l'étendre.
  • Une des priorités de Daech est également la lutte contre les hérétiques, en l'occurrence les chiites, alors que ce n'est pas le cas d'Al-Qaïda.
  • La proclamation du califat marque une rupture idéologique définitive entre les deux organisations terroristes.

Avec les premières défaites, Daech opère un changement : la guerre contre l'Occident devient le seul espoir de se maintenir, d'autant qu'elle permet de mobiliser en Europe des jeunes qui ne peuvent plus se rendre en Syrie.

Les guerres d'Al-Qaïda et de Daech

Al-Qaïda et Daech sont des exemples emblématiques d'acteurs non étatiques maîtrisant les armes d'un conflit asymétrique. La force des réseaux terroristes réside dans leur infériorité en termes purement militaires, contrebalancée par leur souplesse, leur mobilité et leur capacité à affaiblir leurs adversaires par la terreur, relayée par les médias.

Des acteurs non-étatiques utilisant la guerre irrégulière

Al-Qaïda et Daech sont des acteurs non étatiques qui fonctionnent en réseau et utilisent une guerre irrégulière et/ou le terrorisme.

Al-Qaïda et Daech sont des organisations qui fonctionnent en réseau.

Un réseau est un ensemble de territoires, plus ou moins hiérarchisés, reliés par des flux variés.

Al-Qaïda et Daech sont présentes dans des territoires des marges de la planète ou en guerre (des régions au Pakistan, en Afghanistan, l'Irak, la Syrie, etc.) et ont des relais dans certains États arabo-musulmans et européens. Leur dimension transnationale se manifeste par leurs actions et leurs relations s'effectuant dans l'ignorance des frontières des États et en utilisant les moyens modernes de communication (notamment Internet).

La guerre irrégulière se définit doublement :

  • La non-appartenance à des forces armées d'un État et donc l'absence de distinction entre le combattant et le non-combattant. L'irrégularité est d'ordre juridique.
  • La manière de combattre : des méthodes de guérilla profitant de son infériorité numérique et donc d'une plus grande souplesse, de son absence de distinction entre combattants et non-combattants et de sa connaissance du terrain et de la population. L'irrégularité est ici d'ordre militaire. L'irrégularité se confond avec l'asymétrie.

Le terrorisme est un mode d'action utilisé par ces organisations.

Le terrorisme peut être défini comme « une séquence d'actes de violence, dûment planifiée et fortement médiatisée, prenant délibérément pour cible des objectifs non militaires afin de créer un climat de peur et d'insécurité, d'impressionner une population et d'influencer ses décideurs dans le but de modifier des processus décisionnels […] et satisfaire ainsi des objectifs […] préalablement définis. »

Jean-Marc Balencie, spécialiste du terrorisme

« Les Mille et Un Visages du terrorisme contemporain », Questions internationales , n° 8

juillet-août 2004

daech et Al-Qaïda non étatiques et guerre irrégulière

Le terrorisme : une forme de conflit asymétrique

Le terrorisme peut être considéré comme une forme de conflit asymétrique pour plusieurs raisons.

D'abord au niveau des logiques et de la nature des objectifs recherchés : en effet, contrairement à une opération militaire qui vise la destruction physique de l'adversaire, le terrorisme cherche un impact d'ordre psychologique.

« L'action terroriste cherche davantage à produire un impact psychologique fort […] qu'à infliger des pertes matérielles et physiques à la cible visée. Donner la mort n'est pas seulement une fin en soi, mais surtout un moyen de traumatiser les survivants »

« Les Mille et Un visages du terrorisme contemporain », Questions internationales , n° 8

D'où l'importance des médias qui transmettent ce traumatisme et donc le multiplie : le terrorisme trouve ses objectifs dans l'espace informationnel alors que les États luttent d'abord dans l'espace physique.

« L'important aujourd'hui n'est même plus de savoir si Ben Laden est vivant ou non. Des milliers de pages lui donnent vie, virtuellement. Et pour longtemps. »

Marc Sageman, psychiatre et spécialiste de la violence politique ayant travaillé pour la CIA

Le Monde 2 , p. 21

11 mars 2006

En ce sens, la prise d'otages et leur mise à mort sont révélatrices. C'est ce que l'historien américain Anthony H. Cordesman appelle des « atrocités utiles ». Grâce aux nouveaux moyens de communication, et surtout à Internet qui permet une accessibilité directe avec le public pour diffuser des images que les terroristes ont eux-mêmes fabriquées, ces atrocités offrent à ceux qui les perpétuent une puissance qui dépasse leur force réelle. Même sans exécution, la prise d'otages est une réussite dans la mesure où les médias occidentaux s'en font le relais.

« En étant fidèle à nos valeurs – qui nous imposent de ne pas oublier les otages et de se mobiliser – nous tombons dans le piège que nous tendent les terroristes : ils veulent cette médiatisation. »

Dominique Moïsi, géopolitologue

9 octobre 2004

Dans le cas d'une mise à mort, le soin des mises en scène des égorgements ou des décapitations est effectué pour marquer les esprits, dans le but d'effrayer les Occidentaux et d'obtenir le soutien des musulmans.

L'asymétrie est également perceptible au niveau des moyens financiers employés : c'est un coût relativement réduit.

Le coût de préparation des attentats du 11 septembre 2001 a été chiffré à environ 500 000 dollars alors que le coût financier des dégâts a été estimé à 120 milliards de dollars.

Enfin, l'asymétrie est aussi éthique : les terroristes utilisent des moyens que condamnent les démocraties. Or, celles-ci doivent les combattre tout en respectant les principes démocratiques qui les fondent, d'où les débats et les dérives concernant la pratique de la torture et la restriction des libertés au profit de la sécurité.

Les mouvements terroristes possèdent une capacité de mutation très rapide, ils sont nomades, fondus dans la population, transnationaux et implantés dans des espaces non ou peu accessibles. Mais ils ne sont pas déterritorialisés : ils ont besoin d'un espace et même de frontières.

Le terrorisme ne se combat pas par une guerre régulière, médiatisée comme contre un État, mais par un travail patient et discret de renseignement, d'espionnage doublé d'une élimination physique des terroristes et de consolidation de sa propre société face au fanatisme.

« L'intégriste croit que nous ne croyons en rien. Pour lui prouver qu'il a tort, il faut d'abord savoir qu'il a tort. Nous devons nous mettre d'accord sur ce qui compte : s'embrasser dans les lieux publics, les sandwichs au jambon, les différences d'opinion, la mode d'avant-garde, la littérature, la générosité, la distribution équitable des ressources de la planète, le cinéma, la musique, la liberté de pensée, la beauté, l'amour. C'est […] par la manière sans crainte dont nous choisissons de vivre que nous les vaincrons. »

Salman Rushdie

dans le New York Times

La question du dépassement des thèses de Clausewitz

Les guerres irrégulières menées par des organisations terroristes comme Al-Qaïda et Daech semblent prouver que les thèses de Clausewitz sont dépassées, car l'extrémisme des réseaux terroristes rompt le lien entre outil militaire et finalité politique. Toutefois, elles restent pertinentes par certains aspects.

La multiplication et la violence des attentats ont fini par voiler les véritables objectifs politiques des réseaux terroristes. Al-Qaïda et encore plus l'OEI ont multiplié les attentats sans pour autant atteindre leurs objectifs. La radicalisation de la violence est un frein puissant à une négociation avec l'adversaire, or la guerre n'est qu'un moyen au service de la construction d'une paix. De plus, on constate l'apparition d'acteurs de guerres irrégulières qui ne cherchent pas à fonder un État : Al-Qaïda en est le bon exemple. Les thèses de Carl von Clausewitz sont dépassées dans ce sens.

Toutefois, de manière générale, Clausewitz est conscient que la guerre peut se présenter sous des formes variées : la guerre est « un véritable caméléon ». Ensuite, en Espagne entre 1808 et 1814, il a observé que la guérilla, qu'il nomme « petite guerre », a été efficace face aux troupes napoléoniennes. Statistiquement, sur la longue durée (1816-1997), la grande majorité des conflits armés ont impliqué au moins un adversaire non étatique. Les guerres irrégulières ne sont pas si nouvelles.

Entre 1816 et 1997, 322 conflits armés sur 401 ont impliqué au moins un adversaire non étatique.

Par ailleurs, par sa distinction entre « guerre réelle » et « guerre absolue », Clausewitz a saisi que la montée aux extrêmes pouvait les faire se rapprocher : la radicalisation de la violence des uns (acteurs terroristes) engendre celle des autres (États qui subissent ces actes terroristes).

Enfin, les groupes terroristes ont clairement un objectif politique, même s'ils n'ont pas réussi à l'atteindre en raison même de la réaction des grandes puissances.

Pour Al-Qaïda, l'objectif politique était la restauration du califat et le départ des Occidentaux des terres d'islam.

HISTOIRE-GEOGRAPHIE

Seconde - première - terminale, terminale spécialité - thème 2 - faire la guerre, faire la paix. formes de conflits et modes de résolution.

INTRODUCTION DU THÈME INTRODUCTION : FORMES DE CONFLITS ET TENTATIVES DE PAIX DANS LE MONDE ACTUEL A. PANORAMA ET TYPOLOGIE DES CONFLITS ARMÉS ACTUELS B. MODES DE RÉSOLUTION DES CONFLITS ARMÉS I. LA DIMENSION POLITIQUE DE LA GUERRE : DES CONFLITS INTERÉTATIQUES AUX ENJEUX TRANSNATIONAUX (AXE 1) A. LA GUERRE, « CONTINUATION DE LA POLITIQUE PAR D’AUTRES MOYENS » (CLAUSEWITZ) : DE LA GUERRE DE SEPT ANS AUX GUERRES NAPOLÉONIENNES 1. La guerre de Sept Ans (1756-1763) 2. Les guerres napoléoniennes (1803-1815) B. LE MODÈLE DE CLAUSEWITZ À L’ÉPREUVE DES « GUERRES IRRÉGULIÈRES » : D’AL QAÏDA À DAECH 1. « Guerre irrégulière » et terrorisme 2. Pertinence et limites de la grille de lecture Clausewitzienne II. LE DÉFI DE LA CONSTRUCTION DE LA PAIX (AXE 2) A. FAIRE LA PAIX PAR LES TRAITÉS : LES TRAITÉS DE WESTPHALIE (1648) 1. Le contexte : une guerre longue et dévastatrice 2. Le temps des négociations 3. Un nouvel ordre international ? B. FAIRE LA PAIX PAR LA SÉCURITÉ COLLECTIVE : LES ACTIONS DE L’ONU SOUS LES MANDATS DE KOFI ANNAN (1997-2006) 1. Les ambitions de l’ONU sous le secrétariat de Kofi Annan 2. Face à la réalité des relations internationales Conclusion III. LE MOYEN-ORIENT : CONFLITS RÉGIONAUX ET TENTATIVES DE PAIX IMPLIQUANT DES ACTEURS INTERNATIONAUX ÉTATIQUES ET NON ÉTATIQUES (OBJET DE TRAVAIL CONCLUSIF) A. DU CONFLIT ISRAÉLO-ARABE AU CONFLIT ISRAÉLO-PALESTINIEN : LES TENTATIVES DE RÉSOLUTION, DE LA CRÉATION DE L’ÉTAT D’ISRAËL À NOS JOURS 1. Le conflit israélo-arabe 2. Le conflit israélo-palestinien B. LES DEUX GUERRES DU GOLFE (1991 ET 2003) ET LEURS PROLONGEMENTS : D’UNE GUERRE INTERÉTATIQUE À UN CONFLIT ASYMÉTRIQUE 1. La première guerre du Golfe et ses retombées 2. La Seconde guerre du Golfe et ses prolongements : d’une guerre interétatique à un conflit asymétrique

Manuel p.100-175

Introduction du thème

Repères p.106-107. Formes de conflits et tentatives de paix dans le monde actuel- De nos jours, la plupart des citoyens des pays occidentaux n'ont connu ni conflit dans leur pays ni mobilisation générale [1] . Au contraire, ils ont connu la fin de la conscription, l’effacement des soldats en uniforme de l'espace public [2] , et la disparition du risque de mourir au combat -y compris pour la plupart des militaires.

Mais alors que la violence de la guerre s'est éloignée de nous [3] , on nous assène que « nous sommes en guerre ». Cette déclaration solennelle, combien de fois l'avons-nous entendue ? et de quelle guerre s’agit-il ? Guerre de l’information, guerre informatique, guerre des câbles sous-marins, guerre de la 5G, guerre contre un virus (France, 2020) ? Depuis le 11 septembre 2001, chaque attentat est vu comme un « acte de guerre », et la « guerre contre le terrorisme » menée en retour semble interminable. La guerre est omniprésente sur nos écrans, provoquant des réactions contradictoires de sidération et de banalisation. Elle redistribue les hiérarchies de puissance entre pays, renforce les fonctions régaliennes des États, bouscule les rapports entre les sexes et accélère les transformations sociales. Elle détruit les paysages, marque les corps et les esprits, et lègue des traumatismes qui peuvent se transmettre sur plusieurs générations. La guerre est un fait social total, ainsi qu’un acte culturel. Elle est l'affaire des chefs d'État et des militaires bien sûr, mais elle engage aussi au plus profond les sociétés et les individus. Dans ces conditions, étudier la guerre (et son pendant, la paix), c'est étudier un élément structurant de la vie des sociétés et l’expérience souvent la plus décisive dans une vie humaine.

Le thème incite à lier les évolutions de la conflictualité et les enjeux diplomatiques pour mettre en avant à la fois les difficultés et le besoin permanent d’une construction de la paix.

Quelles sont les conditions nouvelles de la pratique guerrière et de la construction de la paix ?

L’étude de ce thème a un double objectif : comprendre les logiques des affrontements armés et étudier les modalités de construction de la paix, car on ne peut penser la paix sans penser la guerre.

  • Le premier axe s’appuie sur la définition classique de la guerre par Carl von Clausewitz pour aborder, à travers l’étude du terrorisme, le cas de conflits qui n’entrent pas dans le schéma « classique » des guerres entre États.
  • Le second axe permet de comprendre, à travers les exemples des traités de Westphalie et des actions de l’ONU, la complexité de la construction de la paix et ses enjeux diplomatiques.

Introduction : formes de conflits et tentatives de paix dans le monde actuel

A.    panorama et typologie des conflits armés actuels.

Un conflit (du latin conflictus , « choc ») est une situation de désaccord, entre au moins deux acteurs (groupes sociaux, individus, etc.) ou deux États. Il existe une grande variété de conflits, dont la guerre est la forme la plus grave : les termes « conflit » et « guerre » ne doivent pas être confondus : toute guerre est un conflit, mais la réciproque n’est pas vraie.

Doc.1 p.102. La guerre aujourd’hui- Il y aurait aujourd'hui une vingtaine de guerres à travers le monde, appartenant aux trois types de guerres identifiés par l'ONU : des guerres entre États (Russie / Ukraine), des guerres civiles (Éthiopie), des guerres « asymétriques » (Nigéria / « Boko Haram ») -sachant qu'un même conflit armé peut comporter en même temps plusieurs types de guerres. Quelques « points chauds » se détachent en Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient ; les autres conflits armés se répartissent entre l'Asie (Cf. rébellions ethniques aux Philippines), l'Amérique latine (Cf. guerre civile entre les cartels de la drogue et l'État au Mexique) et les marges de l'Europe (Ukraine / Russie, Azerbaïdjan / Arménie…).

Pour caractériser les conflits armés et en esquisser une typologie, il est nécessaire de croiser plusieurs critères : enjeux (territoire, ressource…), acteurs (conventionnels ou pas), échelles et territoires, durée, armes utilisées, type d’affrontements, nombre et type de combattants mobilisés, de victimes (civiles [4] ou militaires), nombre de réfugiés et déplacés, destructions, tentatives de résolution… La guerre interétatique, qui était la norme jusqu’au XXe siècle, semblait s’effacer au profit des conflits intra-étatiques et de conflits de moins forte intensité, d’où l’expression « nouvelles conflictualités » [5] , mais l’actualité récente a montré la persistance de toutes les formes de conflit armé.

B.    Modes de résolution des conflits armés

De la diversité des types des conflits armés et de leurs acteurs découle la diversité des modes de résolution. On distingue synthétiquement la résolution des guerres par :

  • la victoire militaire d’un des belligérants ;
  • la négociation ;
  • une intervention extérieure.

La paix ne se résume pas à la fin des hostilités. Une guerre civile, par exemple, ne se règle pas comme une guerre interétatique ; elle suppose une projection dans le devenir politique d’un pays qui s’est déchiré et une acceptation de cette projection par les acteurs locaux. Un conflit court est plus aisé à résoudre qu’un conflit enraciné, où se sont accumulés violences et désir de vengeance. Le nombre de protagonistes, les éventuelles ingérences de puissances internationales sont autant de facteurs de complexité.

On débouche sur des situations de paix tout aussi diverses (Paix d’hégémonie, d’équilibre, de directoire, de droit international [6] )… et d’une solidité variable. La paix est à la fois un état, l'absence de guerre, et un idéal -l'aspiration à vivre dans un monde de concorde, théorisé par E. Kant dans son essai Vers la paix perpétuelle (1795). On parle de paix « négative » lorsque l'apaisement résulte de l'hégémonie d’une puissance (« Pax Romana » dans l'Antiquité) ou de l'équilibre entre plusieurs puissances (système westphalien [7] , guerre froide). On parle de paix « positive » pour désigner une situation dans laquelle l'apaisement résulte d'une coopération durable et institutionnalisée entre des États désireux de cohabiter pacifiquement.

I. La dimension politique de la guerre : des conflits interétatiques aux enjeux transnationaux (Axe 1)

Introduction.

Cours p.112- Au XXIe siècle, la guerre correspond de moins en moins aux modèles des siècles antérieurs : plus souvent irrégulière, asymétrique, elle implique des acteurs non étatiques. Leur dimension politique en est fortement affectée.

Les États parviennent-ils encore à encadrer les conflits ? La guerre est-elle encore un moyen pour les États de poursuivre leurs objectifs de politique extérieure ?

A.    La guerre, « continuation de la politique par d’autres moyens » (Clausewitz) : de la guerre de sept ans aux guerres napoléoniennes

Le plus ancien essai connu sur la guerre remonte au VIe siècle av. J. C. avec Sun Tzu et son ouvrage «  L’art de la guerre  » [8] , mais les huit livres de Vom Kriege ( De la Guerre ) écrits entre 1820 et 1831 par le Prussien Carl von Clausewitz continuent d’influencer les doctrines militaires jusqu’à nos jours [9] .

Biographie p.110- Descendant de hobereaux déclassés, Carl von Clausewitz (1780-1831) [10] entre au régiment à 12 ans, et assiste à la campagne face aux Français dès les premières guerres révolutionnaires. Officier de l’armée prussienne, il est capturé par les Français en 1806 lors de la défaite de la Prusse contre Napoléon, et il demeure traumatisé par cette débâcle. Lorsque la France impose à la Prusse un traité d’alliance contre la Russie (1812), Clausewitz se met au service du tsar [11] , et participe à la déconfiture de Napoléon (1812-1815). La campagne de Russie le marque profondément [12] et l’ensemble de son expérience combattante modèle sa pensée, car c’est d’abord un combattant au courage physique avéré, dont la formation s’est faite sur le terrain avant de se poursuivre dans la théorie [13]  ; à partir de 1818, Clausewitz dirige l’école de guerre et devient général d’état-major. Il rédige son œuvre De la Guerre (qui demeure inachevée) entre 1820 et 1831, date de sa mort.

Clausewitz s’est passionné pour deux stratèges, Frédéric II de Prusse et Napoléon Bonaparte. Il développe une théorie selon laquelle, les conflits armés du XVIIIe siècle sont des « guerres limitées », jusqu’à la rupture produite par les guerres napoléoniennes qui s’approchent du modèle de la « guerre absolue ».

1. La guerre de Sept Ans (1756-1763)

Guerre de Sept Ans pour les Français, French and Indian War pour les Étatsuniens, guerre de la Conquête pour les Canadiens, ce conflit possède une indéniable dimension planétaire -Carte 3 p.117. Une première guerre mondiale [14] .

Elle oppose, sur plusieurs continents, les grandes puissances du XVIIIe siècle regroupées en deux grandes alliances. Son issue consacre le leadership britannique des Amériques aux Indes, au détriment de la France -doc.1 p.116. Les objectifs de l’Angleterre . Un monde s’est écroulé le 10 février 1763, date de la signature de la paix de Paris.

a.       Une guerre mondiale qui éclate en Amérique du Nord

C’est en Amérique du Nord que la guerre de Sept Ans éclate, deux ans avant de se propager au Vieux Continent puis au reste du monde, sous l’effet du jeu des alliances. L’étincelle est partie d’une zone stratégique pour la France, l’Ohio : en contrôlant la vallée de cet affluent du Mississippi, les colons français entendent réaliser la jonction du Canada avec la Louisiane. Londres redoute ce projet d’une Nouvelle France d’un seul tenant qui prendrait en tenaille les treize colonies britanniques. Le 28 mai 1754, un détachement français commandé par le capitaine de Jumonville est massacré par une troupe de miliciens virginiens sous les ordres d’un jeune lieutenant-colonel nommé George Washington.

Les deux puissances coloniales se hâtent alors d’envoyer des renforts. En 1755, alors qu’officiellement la France et la Grande-Bretagne sont toujours en paix, l’ordre est donné à la Royal Navy de s’emparer des navires français convoyant les troupes en Amérique du Nord [15] . Il n’empêche : en juillet 1755, fraîchement débarquée au Nouveau Monde, l’armée britannique du général Braddock se fait étriller par les alliés amérindiens des Français. Puis le 14 août 1756, les troupes du marquis de Montcalm, toujours épaulées par les précieux alliés autochtones, se saisissent du fort d’Oswego, point stratégique majeur sur le lac Ontario : les Français ne cessent de renforcer leurs positions.

b.      Renversement d’alliances en Europe

À ce moment, l’Europe est en paix depuis 1748 (Paix d’Aix-la-Chapelle) ; le système européen s’articule toujours, depuis le XVIe siècle, sur la vieille inimitié franco-autrichienne. Or la montée en puissance de la Prusse, alliée de la France, préoccupe Marie-Thérèse d’Autriche. Dans le but de lui reprendre la Silésie, elle engage en 1755 des pourparlers pour s’assurer l’appui de la France, et Louis XV se montre d’emblée enthousiaste. L’Angleterre est elle aussi à la recherche de nouveaux appuis en Europe, car elle craint une offensive française contre ses possessions continentales (Principauté de Hanovre). Pour les sécuriser, George II tente de se rapprocher du roi de Prusse... et Frédéric II répond favorablement à ses avances.

Le rapprochement franco-autrichien, de même que des rumeurs faisant état de velléités de la Russie et de la Saxe, poussent le roi de Prusse, qui se sent encerclé, à lancer une guerre préventive. Le 29 août 1756, sans même déclarer la guerre, Frédéric II envahit la Saxe et fonce sur la Bohême. Louis XV envoie combattre en Westphalie une armée de plus de 100 000 hommes, réduisant Frédéric II à la défensive. Alors que son allié britannique est mobilisé sur les autres théâtres d’affrontement, la Prusse et ses 5 millions d’habitants se trouvent face à des coalisés qui regroupent 90 millions d’habitants. Frédéric II parvient cependant à remporter les victoires de Rossbach (5 novembre 1757) -doc.2 p.116. La bataille de Rossbach , Leuthen (5 décembre 1757) et Zorndorf (25 août 1758). Il subit ensuite des revers, mais la mort de la Tsarine Élisabeth de Russie (le 5 janvier 1762) et son remplacement par le prussophile Pierre III offre le salut à Frédéric II, qui écrase finalement à les Autrichiens à Burkersdorf le 21 juillet 1762. Tout au long de la guerre de Sept Ans, il fait donc preuve d’un mélange de virtuosité stratégique et de coups de chance inespérés face à des adversaires plus nombreux. Quant à Louis XV, il a cru un peu naïvement que la formidable coalition unissant les forces françaises, autrichiennes, russes et suédoises n’allait faire qu’une bouchée du petit roi de Prusse. Il en est donc pour ses frais [16] .

c.       Naufrage français, triomphe britannique

La guerre d’Allemagne sonne le glas du premier empire colonial français. Au mois de janvier 1758, le choix a été fait de tourner le dos au Nouveau Monde [17] , tandis que le ministre de la Guerre britannique, William Pitt, met au contraire les bouchées doubles en Amérique… et étend même le conflit à l’Afrique (conquête de Saint Louis du Sénégal en mai et de Gorée en décembre 1758) puis aux Antilles (prise de la Guadeloupe en mai 1759), et enfin aux Indes (chute de Pondichéry en janvier 1761). Le 19 août, au large du Portugal, puis le 20 novembre, près de Quiberon, la Royal Navy met en pièces la marine de guerre de Louis XV. En empêchant l’envoi de renforts français au Nouveau Monde, ces deux défaites ont scellé le sort du Canada. Le 8 septembre 1760, c’en est fini. Parvenus à Montréal, les Britanniques en contrôlent la totalité.

Fraîchement entrée en guerre aux côtés de la France (1761), l’Espagne enchaîne les revers humiliants : perte de Cuba et des Philippines (1762). Volant de victoire en victoire, l’Angleterre s’impose sur le globe tout entier.

d.      Un ordre mondial appelé à durer

Signés en 1763, les traités de Paris et d’Hubertsbourg bouleversent l’équilibre des puissances qui prévalait depuis la fin des guerres de Louis XIV :

  • La paix de Paris règle la partie coloniale et maritime du conflit : la Nouvelle-France est rayée de la carte. Louis XV cède la totalité du Canada aux Anglais, et la Louisiane à Charles III d’Espagne, en compensation de la Floride devenue britannique. En Inde, la France ne conserve que cinq comptoirs, laissant la voie libre aux Britanniques -Mais les îles des Antilles sont conservées.
  • À l’échelle européenne, le traité d’Hubertsbourg marque l’avènement d’une pentarchie composée de la France, de la Grande-Bretagne, de l’Autriche, de la Prusse et de la Russie. L’ordre international nouveau est appelé à se maintenir bon an mal an jusqu’en 1914. Chateaubriand a tristement pris la mesure des conséquences du premier conflit planétaire de l’Histoire, qui ne sont pas uniquement diplomatiques et militaires, mais aussi culturelles : le XIXe siècle ne sera pas français.

e.      La guerre de Sept Ans, une guerre limitée ?

En dépit de sa durée et de son extension, la guerre de Sept Ans reste une guerre limitée au sens clausewitzien du terme. Elle n’en présente pas moins certains aspects (certaines prémices ?) de la guerre absolue -doc.4 p.117. Une nouvelle guerre « à outrance » .

2.     Les guerres napoléoniennes (1803-1815)

A.       un objet de fascination et d’étude.

Doc.5 p.118. La bataille de Valmy, début d’une nouvelle ère + doc.7 p.118. L’engagement des volontaires dans les armées révolutionnaires-

La vraie naissance de Clausewitz à la stratégie date de l’effondrement de la Prusse en 1806 face à la France -doc.3 p.111. Le tournant de la Révolution française . Bouleversé par la débâcle prussienne, Clausewitz veut contribuer à la renaissance de sa patrie. Il déteste Napoléon, mais il le considère comme le « dieu la guerre », et estime que les guerres napoléoniennes se rapprochent de la « guerre absolue » -doc.5 p.111. Vers la guerre absolue + Schéma p.111 . En effet, selon le modèle clausewitzien, le spectre des formes de guerre s’étendrait entre deux bornes : l’une, inférieure, marquée par la guerre limitée ; l’autre, supérieure, marquée par la guerre quasi-absolue pratiquée par Napoléon.

77 batailles emportées sur 86 livrées, des effectifs engagés infiniment supérieurs à ceux des guerres antérieures…

 Clausewitz produit un considérable effort intellectuel pour analyser cette rupture. Il est conscient du changement d’échelle qui caractérise les guerres napoléoniennes, mais sa comparaison de Frédéric II, que son père a servi pendant la guerre de Sept ans, et de Napoléon, qu’il a combattu, lui permet de dégager quelques idées directrices : l’importance de la mobilité, la quête de la bataille décisive (« centre de gravité de la guerre »), de l’effet de surprise et du « brouillard de guerre », la supériorité de la défensive sur l’offensive, la recherche de l’anéantissement des forces armées de l’adversaire (« montée aux extrêmes »).

Pour Clausewitz, « la guerre est un caméléon qui change de nature à chaque engagement ». Il ébauche une typologie des guerres, distinguant non seulement la « guerre absolue » de la « guerre limitée » [18] , mais aussi les guerres interétatiques (« grandes guerres ») des « petites guerres » (ou guérillas) -tout en soulignant l’importance des secondes, qu’il décrit comme «  un brasier qui s’étend, dévore le sol où se tient l’armée ennemie ». À son retour en Prusse (1813), il défend avec Gneisenau l’idée de la levée en masse et de la « guerre populaire » [19] à la manière des Espagnols, et pratique lui-même dans le Mecklembourg la guerre d’embuscades -doc.4 p.111. Napoléon et le choc des nations . Clausewitz est en effet conscient du fait que la guerre « déborde » du champ de bataille, et il entrevoit une forme de guerre totale : « chacun sait en un mot, aujourd’hui, que la participation à la guerre de toutes les forces vives d’une nation en augmente prodigieusement la puissance ». Néanmoins, Clausewitz n’envisage jamais l’anéantissement d’une nation : en 1815, au moment du Congrès de Vienne, soucieux des équilibres européens (à la différence de son ami Gneisenau), il ne voulait pas l’écrasement de la France.

b.      Guerre et politique

Doc.1 p.110. Guerre et civilisation- Il définit la guerre comme un « duel à plus vaste échelle », qui ne relève pas d’une décision unilatérale, mais d’une interaction bilatérale. La réciprocité de l’action entre les deux adversaires a plusieurs implications :

  • c’est la défense, et non l’attaque, qui est le facteur des guerres : le choix politique fait par l’agressé de se défendre déclenche la guerre ; elle est terminée quand un des acteurs cesse de recourir à la violence (absence de réciprocité dans l’emploi de la violence) ; d’ailleurs, pour Clausewitz, l’avantage va généralement à la défense, « la forme la plus forte de la conduite de la guerre ».
  • Dans l’affrontement guerrier (« frictions »), chaque belligérant cherche par la violence (moyen) à contraindre l’autre à accomplir sa propre volonté (but) ; il doit donc utiliser intelligemment les différents moyens pour « gagner la relation » : anticipation, contre-attaque, etc.
  • Les formes que la guerre revêt et le niveau de violence qu’elle atteint découlent des équilibres entre les pôles de « l’étonnante trinité » : le peuple, l’État et l’armée (« la passion, la raison et l’action »).

Doc.2 p.110. Guerre et politique- En différenciant la dimension tactique et la dimension stratégique de la guerre [20] , Clausewitz opère une distinction entre l’objectif immédiat ( Ziel ) de l’acte guerrier et le but ultime ( Zweck ) de la guerre, qui est de type politique. Clausewitz visait à « faire comprendre à l’homme d’État les conditions du bon emploi de l’instrument politique qu’est la guerre » [21] .

« L’homme politique ( der Politiker ) ne peut en réalité lier que deux objectifs différents avec la guerre : ou bien il veut détruire complètement son adversaire, c’est-à-dire éradiquer son existence étatique, ou bien il veut simplement lui prescrire des conditions à l’occasion de la paix. » En effet, la guerre est une des formes de la politique, qui a recours à la violence pour soumettre l’autre à sa volonté. Il est important de remettre en perspective la célèbre formule de Clausewitz : « […] les lignes directrices de tout plan stratégique majeur sont largement de nature politique […] D’après ce point de vue, il ne peut être question d’une évaluation purement militaire pour la résoudre […] La guerre n’est rien que la continuation des efforts politiques par d’autres moyens. » [22] Loin de prôner, comme certains voudront le croire [23] , une subordination de la guerre à la politique, Clausewitz fusionne l’une à l’autre : « Nous ne devons pas, prévient-il, nous laisser égarer à regarder la guerre comme un pur acte de force et de destruction, et déduire logiquement de ce concept simpliste une série de conclusions qui n’ont plus rien à voir avec le monde réel. Au contraire, nous devons reconnaître que la guerre est un acte politique qui n’est pas entièrement autonome ; un véritable instrument politique qui ne fonctionne pas de lui-même mais est contrôlé par quelque chose d’autre, par la main de la politique. » [24]

B.    Le modèle de Clausewitz à l’épreuve des « guerres irrégulières » : d’Al Qaïda à Daech

Ce jalon pose la question du terrorisme, que bien sûr Clausewitz n'a pas abordée directement, et de la « guerre irrégulière », théorisée au temps de Clausewitz comme la « petite guerre ».

Les actions menées par Al-Qaida et Daech peuvent-elles être éclairées par la pensée de Clausewitz, ou bien lui échappe-t-ils ?

1.      « Guerre irrégulière » et terrorisme

Al-Qaïda et Daech sont deux mouvements djihadistes qui inscrivent le terrorisme au centre de leur stratégie de la guerre.

 Le mot « terrorisme » a une longue histoire, comme le terrorisme lui-même. Au XIXe siècle, il désigne un usage de la violence par des mouvements politiques contestataires. Jusqu’en 1914, il s’agit surtout de s’attaquer à des responsables politiques, comme en Russie ou en France, en vue d’une déstabilisation politique dans une perspective révolutionnaire. Au XXe siècle, avec l’attentat du 28 juin 1914 contre l’héritier de l’empire d’Autriche-Hongrie, l’acception du terme s’élargit à une dimension géopolitique, en visant toujours à frapper les opinions, et à exploiter la sensibilité des opinions publiques [25] -doc.1 p.120. Définir le terrorisme contemporain .

La « guerre irrégulière », qui à la différence de la guerre régulière, ne s’articule pas autour de la bataille et du front, est une notion englobante : « La guerre irrégulière […] se présente sous une déconcertante multiplicité de figures -guérilla, guerre asymétrique -Repère p.115 , résistance, guerre non-conventionnelle, terrorisme, opérations spéciales » [26] .

Au tournant du XXI e siècle, les conflits interétatiques s’effacent un temps au profit de guerres irrégulières aux enjeux transnationaux. C’est dans ce cadre que s’inscrit la résurgence du djihad après les attentats du 11 septembre 2001. Le monde découvre alors la nébuleuse al-Qaïda puis assiste, dans le cadre des guerres en Irak et en Syrie, à la naissance d’une autre organisation djihadiste, Daech -Chronologie p.121  :

  •  Al Qaïda (« la base ») -Vocabulaire p.152 , organisation fondée en Afghanistan en 1987 par Oussama Ben Laden pour combattre les Soviétiques, s’appuie sur le régime des Talibans pour organiser les attentats du 11 septembre 2001.
  • Daech, État Islamique du levant (EIL) -Vocabulaire p.114 , organisation djihadiste née en 2013 d’une scission de la branche d’al-Qaïda en Irak, qui proclame en 2014 l’instauration du califat sur les territoires qu’il contrôlait en Syrie et en Irak, avec pour chef Abou Bakr al-Baghdadi.

Les deux organisations ont un socle idéologique commun, le salafisme [27] , appellent toutes deux à un retour à la communauté originelle de l’islam [28] sous l’autorité d’un califat [29] , et s’accordent à définir le djihad -Jihadisme. Vocabulaire p.114 comme le devoir individuel de tout musulman, mais elles diffèrent :

  • Dans leur conception du djihad (défensif pour Al-Qaïda, offensif pour Daech)
  • Dans leur approche territoriale (inclusive pour Al-Qaïda, hégémonique pour Daech)
  • Dans leur discours (théorique et « savant » pour Al-Qaïda, mobilisateur et simpliste pour Daesh)

2.     Pertinence et limites de la grille de lecture Clausewitzienne

A.       après le 11 septembre 2001, un nouveau paradigme de la guerre.

Certains ont reproché à Clausewitz de ne plus être vraiment pertinent pour l’analyse des « nouvelles guerres », dans lesquelles la victoire militaire ne suffit plus, et de faire reposer sa théorie sur une conception trinitaire (Gouvernement, Armée, Peuple) trop stato-centrée pour analyser des guerres désormais « non-trinitaires ». En effet, on considère généralement-et un peu schématiquement qu’après le 11 septembre 2001, s’impose le modèle d’une guerre non linéaire, asymétrique et transnationale :

  • Au lieu d’un affrontement entre nations, les armées occidentales sont confrontées à des combattants du djihad recrutés dans le monde entier, y compris dans leurs propres pays. Au-delà des actions terroristes [30] , même les conflits territorialisés relèvent davantage de la guerre civile de la guerre interétatique (Syrie, Irak, zone saharo-sahélienne…)
  • Les forces militaires des islamistes sont des acteurs non étatiques (groupes terroristes, civils armés…), qui ont recours à des armes non conventionnelles (avions détournés, voitures-béliers…) et aux NTIC (Cf. « cyberdjihadisme »).
  • Pour s’adapter, les armées occidentales, particulièrement celle des États-Unis, recourent de plus en plus à des sociétés militaires privées (SMP) comme Blackwater [31] et limitent leur présence au sol à des forces spéciales [32] .
  • De même, les armées occidentales ont modifié leur perception de la guerre mais aussi leur façon de la mener ; c’est ainsi qu’a été théorisé le concept encore peu reconnu de « guerre de quatrième génération » [33] .

b.      Validité des concepts clausewitziens

Sans limite temporelle, spatiale [34] -doc.4 p.121. Les attentats d’Al-Qaïda et de DAECH dans le monde -et encore moins morale (non-respect du droit de la guerre et « montée aux extrêmes » [35] ), les guerres de Daech et d’Al-Qaïda présentent une dimension idéologique justifiant l’éradication de l’ennemi. En effet, le fondamentalisme religieux ne peut concevoir qu’une « guerre absolue » au sens où l’entend Clausewitz : nul compromis n’est possible avec le camp du « Mal » -doc.2 p.120. La stratégie d’Al-Qaïda + doc.5 p.121. La guerre de DAECH contre les « mécréants » .

Ce type de « petite guerre », caractérisée par le recours simultané au terrorisme, à la guérilla et à des formes de combat plus conventionnelles (puisque « la guerre est un caméléon »), relève de l’asymétrie financière, militaire et morale. En proclamant un califat, Daech a territorialisé son action en Syrie et en Irak et mis en place un proto-État, ce qui a abouti à une forme de guerre plus classique (coalition contre Daech, batailles, sièges de villes…), et plus conforme aux thèses clausewitziennes [36] .

Les puissances occidentales sont depuis le 11 septembre 2001 confrontées à une menace complexe qui n’est pas sans évoquer le «  brouillard de guerre » de Clausewitz, peu propice à l’élaboration d’une stratégie efficace. Or, « a pprécier correctement le genre de guerre que l’on entreprend est pourtant « le plus décisif acte de jugement » , rappelle Clausewitz [37] .

Où en sommes-nous aujourd’hui ? Nul n'imaginait que vingt ans après la déclaration de guerre contre le terrorisme par G. Bush (Junior), cette guerre perdurerait. Loin d'avoir été éliminés, les djihadistes ont au contraire proliféré. Ils seraient aujourd'hui deux à trois fois plus nombreux qu'en 2001, particulièrement au Moyen-Orient et en Afrique. L'organisation responsable des attentats de New York et de Washington, Al-Qaida, a muté mais n'a pas disparu. D'autres groupes ont fait leur apparition, à l'instar de Daech. La supériorité technologique et militaire des Occidentaux face aux djihadistes est flagrante, et pourtant, les djihadistes ont ingénieusement pratiqué l'escrime de la stratégie et appris à esquiver, fatiguer, feindre et rompre autant qu'à attaquer et menacer. De guerre lasse, les Occidentaux, eux, souhaitent réduire leur engagement alors que de nouveaux défis frappent à la porte de l’Histoire. La guerre contre le terrorisme entre dans sa troisième décennie et tous se demandent quand elle cessera enfin [38] . Le caractère interminable des « guerres contre le terrorisme » semble confirmer la théorie clausewitzienne de la supériorité de la défensive en guerre, car « il est plus facile de conserver que d’acquérir ».

Ainsi, Clausewitz offrirait donc toujours une grille de lecture encore largement pertinente du phénomène guerrier contemporain. Pour Olivier Zajec [39] , les remises en cause régulières de sa pensée (« The Grand Tradition of Trashing Clausewitz », pour reprendre Christopher Bassford [40] ), aboutissent surtout à mettre en relief la centralité de Clausewitz, qui reste considéré -et à bon droit pour l’essentiel- comme le plus grand stratégiste de l’histoire, en tout cas le plus profond.

Conclusion (Axe 1)

Révisions p.124-125.

Sujets bac p.126-127.

II. Le défi de la construction de la paix (Axe 2)

Une fois perçues la pluralité des formes de conflits et leur caractère politique avec l’axe 1, l’axe 2 invite à penser une action tout aussi complexe, la construction de la paix, à laquelle la seule cessation des combats ne suffit pas. D’autre part, si la guerre « classique » offre une possibilité de négociation tout aussi classique, entre États, les « guerres irrégulières » complexifient ce processus.

À partir du XVIIe siècle, les relations diplomatiques sont régies par le système d’équilibre des puissances établi lors des traités de paix de Westphalie (1648) qui mettent fin à la guerre de Trente Ans. Au XXe siècle, la violence inégalée des guerres mondiales donne naissance à un autre système international [41] et une autre vision de la paix. Fondée sur la sécurité collective, elle aboutit à la création de la Société des Nations (SDN) en 1919 puis de l’Organisation des Nations Unies (ONU) en 1945.

Comment construire la paix entre les États ?

A.    Faire la paix par les traités : les traités de Westphalie (1648)

Cours p.130-131. Faire la paix par l’équilibre des puissances + Jalon p.138-139- Construire la paix est un acte politique qui doit relever plusieurs défis : trouver d’abord un accord acceptable entre plusieurs parties (ce qui suppose une négociation dont le traité est l’aboutissement) puis définir des garanties pour éviter le retour de la violence.

Les traités de Westphalie mettent fin à la guerre de Trente Ans (1618-1648). Les négociations, organisées à Münster et Osnabrück, villes distantes de 45 km en Westphalie, débutent en 1643, alors que les armées continuent à se battre, et durent donc cinq ans.

Les traités de Westphalie, une paix multilatérale [42] ?

1.     Le contexte : une guerre longue et dévastatrice

La Guerre de Trente Ans (1618-1648), nommée en Allemagne jusqu’en 1914 « la grande guerre », est considérée comme une catastrophe européenne et allemande par l’historiographie allemande.

Cette guerre met en jeu le Saint-Empire romain germanique -Repère p.130 , héritier depuis la Restauratio imperii d’Otton I er en 962 de l’Empire carolingien, qui restaure l’Empire romain d’Occident -de manière théorique ; en effet :

  • Le projet d’une prééminence impériale en Europe s’est heurté dès le Moyen Âge à l’affirmation de la monarchie française, les Capétiens estimant que « le roi est empereur en son royaume ».
  • Par ailleurs, le Saint-Empire romain germanique, régi par des institutions complexes [43] , comporte une multitude de principautés aux statuts variés, et l’Empereur est élu par certains princes [44] .

La fracture religieuse entre protestants et catholiques à partir du XVI e siècle fragilise ce subtil équilibre interne, si bien que la guerre de Trente Ans a souvent été présentée comme une guerre de religion… Mais cela est réducteur [45]  : en fait, la guerre est liée à une imbrication de litiges politiques et religieux. La paix d’Augsbourg de 1555 -Repère p.130 avait vu les princes protestants de l’Empire imposer à l’empereur le principe cujus regio, ejus religio (« tel prince, telle religion ») [46] . Ferdinand II, devenu roi de Bohême en 1617, cherche à y rétablir le catholicisme. Les nobles de Bohême se soulèvent (23 mai 1618, défenestration à Prague des représentants catholiques de l’Empereur Matthias I er par les représentants des États de Bohème protestants), mais Ferdinand II est élu empereur en août 1619, et écrase les protestants à la bataille de la Montagne Blanche en 1620.

La guerre se déroule essentiellement sur le territoire de l’Empire, mais l’intervention des Espagnols et des Danois lui donne une dimension européenne, qui s’étend encore à partir de 1631 avec l’entrée en guerre de la Suède, qui se pose en protectrice des protestants et a des ambitions territoriales sur l’Allemagne du Nord et les rives de la Baltique, et celle de la France à partir de 1635, qui, bien que catholique, s’oppose aux Habsbourg qui la prennent en tenaille entre Espagne et Autriche depuis Charles Quint. Cette guerre n’est pas une guerre d’anéantissement, mais elle est longue et dévastatrice [47]  : elle a vraisemblablement coûté la vie à un tiers de la population du Saint-Empire. La mémoire de la violence de la guerre est nourrie par la production de gravures qui circulent ; par exemple, les Grandes Misères de la guerre de Jacques Callot (1633) [48] sont des documents difficiles à interpréter, mais qui montrent l’ampleur de la violence guerrière.

2.     Le temps des négociations

La longueur du conflit, les ravages qu’il entraîne et son coût amènent l’ouverture de négociations à partir de 1643, alors que les armées continuent à se battre. Les diplomates des États belligérants se rassemblent à Münster et Osnabrück en Westphalie, villes distantes de 45 km et transformées en zones neutres : les catholiques (dont la France) à Münster, les protestants (dont la Suède) à Osnabrück [49] .

Les négociations sont longues, menées pour les grands États par des représentants (certains d’entre eux sont « plénipotentiaires »). C’est le premier grand congrès

international, qui accueille des délégations nombreuses : 155 Suédois, 147 Espagnols, 420 Français [50] … Il y a parmi les négociateurs beaucoup de juristes (40% des délégués ont une formation universitaire, généralement juridique), et de diplomates aguerris (40% d’entre eux ont une expérience diplomatique). Le principal représentant de l’Empire, Maximilien de Trauttmansdorff, va et vient entre Münster et Osnabrück ; certaines rencontres ont lieu à mi-chemin, au château de Mark. Les négociations sont ralenties par la poursuite du conflit, la lenteur du courrier, la multiplicité des participants, ou encore les nombreux échanges informels. Ce travail diplomatique colossal aboutit à deux traités, le traité d’Osnabrück entre l’empereur et la Suède, le traité de Münster entre l’empereur, la France et ses alliés, tous deux signés le 24 octobre 1648, France et Suède s’étant engagées à ne pas signer de paix séparée.

3.     Un nouvel ordre international ?

Carte 1 p.138. Les recompositions territoriales en Europe- Les traités de Westphalie créent-t-ils un nouvel ordre international, « l’ordre westphalien » décrit par Leo Gross [51] depuis 1948 ?

Doc.2 p.138. La dimension allemande des traités- Ces traités mettent en place un nouvel équilibre politique entre l’Empire et les États allemands, qui renforcent leur autonomie. Ils obtiennent le droit de conclure des traités mais, s’ils ont leur propre diplomatie -Vocabulaire p.130 , ils ne deviennent pas souverains pour autant, et ne doivent pas en user contre l’empereur et l’Empire. Pour encourager les États d’Empire à maintenir la paix, les traités imposent une forme d’équilibre au sein de la Diète où chaque voix devient égale et la Diète est davantage associée aux décisions politiques.

Par ailleurs, les traités de Westphalie peuvent être perçus comme une paix de religion : ils confirment la paix d’Augsbourg, qui accordait aux princes des États allemands la liberté religieuse, mais ils l’étendent à leurs sujets. Dans les faits la confession du prince est détachée de celle du territoire ce qui crée la mixité religieuse (sauf en Bavière). La paix est proclamée « chrétienne ».

Les traités prévoient peu de recompositions territoriales. Entre États allemands, les changements sont déterminés selon les principes du retour à la situation de 1618 et de la réparation des dommages. La Suède et la France, souvent désignées comme vainqueurs, réalisent des gains territoriaux limités. Les traités mettent cependant en place un nouvel équilibre en Europe, car ils mettent fin aux prétentions hégémoniques des Habsbourg sur l’Europe [52] .

Doc.4 p.139. Un nouveau système international- Tous les États en guerre ont participé à égalité aux négociations de paix, qui deviennent un modèle pour les congrès de paix multilatéraux. Les traités de Westphalie posent les bases d’une diplomatie désormais fondée sur le droit. En effet, outre l’idée d’équilibre des puissances -Vocabulaire p.130 , ils établissent l’inviolabilité de la souveraineté des États et la non-intervention dans les affaires d’autrui. La guerre est considérée par les États comme un recours possible, mais limité et régulé pour maintenir l’équilibre entre les puissances.

 Dans ces conditions, la paix issue des traités de Westphalie est une paix organisée et durable qui codifie les relations diplomatiques et les équilibres géopolitiques par une entente entre grandes puissances.

Des congrès cherchent à régler des conflits, les États cherchent à se donner des règles : les congressistes ont été influencés par l’œuvre d’Hugo de Groot, dit Grotius, auteur du Droit de la guerre et de la paix paru en 1625. Les États signataires sont collectivement garants de la paix de Westphalie. Cet « ordre westphalien » [53] , fruit des traités de Münster et d’Osnabrück, sera considéré à partir du XVIIIe siècle comme un idéal en matière de relations internationales. Les guerres révolutionnaires et impériales rompent cet équilibre, que le Congrès de Vienne s’efforce de rétablir en 1815 en instaurant le « Concert européen »… Au XIXe siècle, les congrès parviennent à empêcher une nouvelle conflagration générale, mais ils sont débordés à plusieurs reprises, impuissants par exemple à empêcher la Première Guerre mondiale. C’est ainsi que, sous l’impulsion du président des États-Unis W. Wilson, le traité de Versailles (1919) substitue au paradigme westphalien, le principe de sécurité collective, avec l’instauration de la Société des Nations (SDN) [54] , à laquelle l’ONU succède en 1945.

B. Faire la paix par la sécurité collective : les actions de l’ONU sous les mandats de Kofi Annan (1997-2006)

Cours p.134-137 + Jalon p.140-141 + Doc1 p.140. Le rôle de l’ONU- La Charte des Nations Unies, adoptée à San Francisco le 26 juin 1945, entreprend la construction d’un nouvel ordre mondial [55] . Il s’agit pour les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale de refonder les relations internationales. Adoptée par 51 États, la Charte des Nations Unies dénonce «  le fléau de la guerre  » (préambule), et se donne pour objectif la «  paix et [la] sécurité internationale  » [56] -Sécurité collective. Vocabulaire p.132 .

L’idée force du système westphalien, selon laquelle les États et la façon dont ils défendent leurs intérêts constituent l’élément central de la politique internationale [57] . Or cette conception est frontalement remise en cause par l’émergence d’organisations internationales pérennes comme la SDN, et surtout l’ONU, qui fonctionne sous la direction d’un exécutif constitué du Conseil de Sécurité, (15 membres dont 5 permanents) et du secrétariat général -Les institutions de l’ONU, p.135 ).

Qui est Kofi Annan ? Biographie p.141- Né au Ghana, il est le septième Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies -le premier sorti des rangs de l’organisation [58] . Il s’est donné comme tâches prioritaires de renforcer l’action traditionnelle de l’ONU dans les domaines du développement et du maintien de la paix et de la sécurité internationales, de promouvoir le respect de la légalité et des valeurs universelles qui figurent dans la Charte des Nations Unies, de revitaliser les Nations Unies par un programme complet de réformes et de rétablir la confiance de l’opinion publique dans l’Organisation en «  rapprochant les Nations Unies des peuples  ». Au terme de son premier mandat (1997-2001), désigné prix Nobel de la Paix (2001), il est reconduit triomphalement par l’Assemblée générale pour un second mandat (2002-2006) [59] .

Étudier les actions de l’ONU sous les mandats de Kofi Annan conduit donc à s’interroger sur le rôle que conservent les États, et à saisir la portée et les limites du multilatéralisme.

1.     Les ambitions de l’ONU sous le secrétariat de Kofi Annan

A.       œuvrer pour la paix et la sécurité collective par le multilatéralisme, « la paix par le droit » et par l’action collective [60].

La Charte prescrit le règlement pacifique des différends en substituant le règne du droit à celui de la force: «  par voie de négociation, d’enquête, de médiation, de conciliation, d’arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d’autres moyens pacifiques de leur choix » (art 3.3). Dans l’esprit de ses concepteurs et en particulier de Roosevelt, la réponse à l’emploi de la force hors légitime défense implique une action « collective » engageant l’organisation entière : le bon fonctionnement de l’ONU repose sur le principe du multilatéralisme -Vocabulaire p.130 , donc sur l’effacement des intérêts des États devant l’intérêt général.

La paix par les opérations de maintien de la paix

Entre 1948 et 2013, l’ONU a déployé 70 opérations de maintien de la paix [61] (57 depuis 1988) -Nombre d’opérations… p.136 . Ces opérations sont impulsées par le Conseil de Sécurité, budgétisées par l’Assemblé Générale, gérées par le Secrétariat et conduites par un représentant spécial de Secrétaire général sur le terrain. Des centaines de milliers de militaires de l’ONU et de civils de plus de 120 pays ont participé à ces opérations [62] . Le Conseil de sécurité a pour objectif l’établissement d’une « paix durable » ( sustainable peace ), dans au moins 4 domaines essentiels : la capacité de l’État à assurer la sécurité et l’ordre public, le respect des droits de l’Homme, la création d’institutions politiques permettant la participation, le redressement et le développement économique et social.

b.      Une ambition portée par Kofi Annan

Doc.2 p.140. Des objectifs pour l’ONU- Dès son arrivée à la tête de l’ONU, Kofi Annan, très marqué par les échecs de l’ONU face aux génocides au Rwanda puis en ex-Yougoslavie [63] alors qu’il était sous-secrétaire général chargé des opérations de maintien de la paix, affiche une volonté de redynamiser et de moderniser l’Organisation [64]  :

  • La cour pénale internationale (CPI), juridiction universelle permanente chargée de juger les personnes accusées de génocide, de crimes contre l’humanité et de crime de guerre, est créée en 1998 et entre en vigueur en 2002, malgré les réticences des États-Unis -entre autres [65] .
  • Les objectifs du millénaire [66] pour le développement sont adoptés en 2000 par les 193 États membres de l'ONU, qui sont convenus de les atteindre pour 2015.
  • En 2004, il préconise une réforme des organes principaux de l’ONU, surtout le Conseil de sécurité, issu du monde d’après-guerre mais insuffisamment représentatif de celui du XXI ème siècle.
  • Convaincu que l’ONU est légitime à intervenir dans un État si ce dernier est incapable de protéger sa population, Kofi Annan fait reconnaître en 2005 le principe de la «  responsabilité de protéger » [67] . Parallèlement, il ouvre l’ONU à des partenaires régionaux (UE, Alliance africaine…) et non-étatiques (entreprises [68] , ONG…), et confie des responsabilités à des médiateurs de plus en plus variés [69] : personnalités (Jimmy Carter), États neutres (Suisse, Suède) placés sous son autorité comme « représentants spéciaux ». Enfin, il obtient la création de la « commission de consolidation de la paix », chargée d’accompagner les pays sortant d'un conflit [70] .

2.     Face à la réalité des relations internationales

Kofi Annan a donc été un secrétaire général ambitieux pour son organisation, mais la complexité du monde post-guerre froide et la realpolitik des États ne lui ont pas toujours permis d’atteindre ses objectifs [71] .

a.       Quels moyens matériels ?

Kofi Annan a voulu multiplier les interventions de l’ONU -doc.4 p.141. Une multiplication des actions de l’ONU et les rendre plus efficaces. Or, les interventions sont coûteuses, surtout quand elles s’éternisent [72] . Tous les États Membres sont juridiquement tenus de s’acquitter de leur part des dépenses, inégalement réparties : six États financent les deux tiers du budget, mais certains, comme les États-Unis, cherchent à réduire leur contribution. De même, les États développés rechignent à fournir des troupes pour les interventions : « les riches payent la note alors que les pauvres versent le sang » [73] .

b.      Quelle légitimité ?

Le « droit d’ingérence » onusien, au nom de la protection des droits de l’Homme et des populations est parfois discuté -Points de vue « Grand oral » p.142-143 . Plus largement, au lieu d’être considérée comme un progrès dans l’histoire des relations internationales, la référence à la sécurité collective est parfois vue comme une rhétorique destinée à manipuler les opinions mondiales et justifier certaines interventions [74] , généralement contre les opposants au monde occidental.

c.       Une organisation figée dans son immobilisme, impossible à réformer ?

Le Conseil de sécurité de l’ONU est représentatif de l’immobilisme institutionnel (composition, droit de véto) : l’adoption des résolutions dépend du bon vouloir des grandes puissances : ainsi, les résolutions concernant Israël sont souvent bloquées par les États-Unis, alors que Russie et Chine s’entêtent à protéger des régimes autoritaires comme la Syrie.

Pour y remédier, on évoque de manière récurrente une réforme du Conseil de Sécurité. Mais beaucoup estiment qu’« il y a peu de chance d’assister à une réforme de l’intérieur de l’ONU » (Rony Bauman, ancien président de l’ONG Médecins sans frontières).

d.      L’ONU face aux « nouvelles conflictualités »

La multiplication des guerres intraétatiques comme celles de l'ex-Yougoslavie [1991-1999] échappent à la logique de l'ONU fondée sur une conception classique des relations internationales, celle des relations entre États. Par ailleurs, les attentats du 11 septembre 2001 ont fait prendre conscience de l'ampleur du risque terroriste et des moyens limités dont disposait l’Onu face à cette menace.

e.      L’ONU, impuissante face aux puissances ?

À aucun moment, les grandes puissances ne semblent désireuses de s’effacer derrière l’ONU : leurs actions demeurant guidées par la défense de leurs propres intérêts [75] , ils cherchent souvent à se soustraire aux contraintes supranationales -Supranationalité. Vocabulaire p.137 [76] .

L’exemple le plus frappant de cette dérive reste l’intervention unilatérale -unilatéralisme. Vocabulaire p.137 en Irak des États-Unis en 2003, sans

autorisation du Conseil de sécurité et malgré l’opposition d’autres membres permanents menés par le ministre français des Affaires étrangères Dominique de Villepin -doc.3 p.140. Une action diplomatique de l’ONU… + doc.5 p.141. L’impuissance de l’ONU . Pour beaucoup, cette intervention marque la mort des Nations Unies face à l’unilatéralisme étatsunien. Kofi Annan n’hésite pas à qualifier la guerre des États-Unis en Irak d’«  illégale  » (interview à la BBC, septembre 2004). Le fiasco irakien, comme l’avait d’ailleurs prédit Dominique de Villepin, conduit au chaos, à la résurgence d’Al-Qaïda et à l’émergence de Daech [77] .

Kofi Annan n’a eu de cesse de rendre à l’Organisation des Nations Unies son ambition et sa force, mais il s’est heurté à la réalité des relations internationales. L’étude des orientations de sa politique montre les conditions difficiles de la construction de la paix, notamment face à la complexité croissante des conflits. Les limites de l’action onusienne sont multiples mais particulièrement flagrantes dans le rapport avec les puissances. Kofi Annan a certes affirmé que « le seul chemin praticable vers la paix et la coopération mondiales passe par l’ONU », y compris pour les États-Unis (« les États-Unis ont besoin de l’ONU et l’ONU a besoin des États-Unis »), mais il s’est heurté à l’hyperpuissance étatsunienne, dont l’adhésion au multilatéralisme est restée conditionnelle [78] .

Cependant, ces limites ne conduisent pas à un aveu d’impuissance : le mandat de Kofi Annan a correspondu à une nette relance des interventions de l’ONU, associant de plus en plus concrètement les pays en développement. Kofi Annan fut un diplomate, un homme de paix mais un homme traumatisé par les échecs de l’ONU. Pour lui, «  si l’ONU n’est pas aussi unie qu’elle devrait l’être, c’est parce qu’elle reflète le monde dans lequel nous vivons  » [79] .

Conclusion (Axe 2)

Révisions p.144-145

Sujets bac p.146-147

III. Le Moyen-Orient : conflits régionaux et tentatives de paix impliquant des acteurs internationaux étatiques et non étatiques (objet de travail conclusif)

Le thème 2 vise à comprendre les logiques des affrontements armés et à étudier les modalités de construction de la paix.

Le premier axe a montré la dimension politique de la guerre, en abordant en premier lieu la question des guerres inter-étatiques dans une approche clausewitzienne où l'État a le monopole de la guerre. Cette approche a ensuite été discutée dans le contexte contemporain des guerres irrégulières menées par des mouvances islamistes à partir du Moyen Orient, et des conflits asymétriques qu’elles ont suscités. Ces deux notions de guerre interétatique et de conflit asymétrique vont être réinvesties dans cet objet de travail conclusif consacré au conflit israélo-arabe et israélo-palestinien, puis aux guerres du Golfe.

Le second axe a montré comment la guerre, paradoxalement, se fixait comme objectif premier la paix. La paix n'est pas conçue comme le retour à un ordre ancien, mais plutôt comme l'imposition d'un nouvel ordre dont les fondements, pour être stables, doivent être partagés par les vainqueurs et les vaincus du conflit -comme avec les traités de Westphalie en 1648. À partir de 1945, ce sont les Nations Unies qui ont pour mission d'assurer la sécurité collective internationale. L'objet de travail conclusif va donc réinvestir à la fois la notion de traité de paix international, et celle de sécurité collective.

Cartes p.150-151. Les lignes de fracture au Moyen-Orient- Le Moyen Orient est un lieu éminemment stratégique, à la fois par sa position géographique, ses ressources naturelles et ses lieux symboliques. Cet espace, riche en hydrocarbures et abritant une mosaïque de peuples et de religions, a été marqué par la domination ottomane puis franco-britannique, avant de connaître l'émergence d'États indépendants, voire pour certains des puissances régionales, sous le pouvoir de dirigeants nationalistes autoritaires ou de monarques à poigne, dans un contexte de guerre froide (monde bipolaire), puis post-guerre froide (monde multipolaire ou « apolaire »). Cours p.152-153. Les multiples facteurs de conflictualité au Moyen-Orient- Il est donc le théâtre de multiples conflits régionaux, impliquant des acteurs internationaux étatiques et non-étatiques intervenant pour prendre parti ou œuvrer à la solution du conflit.

Comment expliquer la densité de conflits qui caractérise cette région et la difficulté à les résorber ?

A.    Du conflit israélo-arabe au conflit israélo-palestinien : les tentatives de résolution, de la création de l’État d’Israël à nos jours

Cours p.154. I. Deux peuples pour une terre : la question palestinienne + Jalon p.158-159. A. La difficile résolution du conflit israélo-arabe

1.     Le conflit israélo-arabe

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la question de la Palestine se pose avec une acuité nouvelle. En effet, la Grande-Bretagne vit une fin de mandat SDN difficile : elle maintient une domination de type colonial et un contingentement de l'immigration juive, sans parvenir à trouver un accord entre Juifs et Arabes. Dans ces conditions, les uns comme les autres se radicalisent : côté arabe, la répression du soulèvement des années 1930 [80] a disloqué la classe politique, laissant le terrain à des groupes plus radicaux ; côté sioniste -Vocabulaire p.155 , le mouvement est de plus en plus dominé par des groupes armés, comme l'Irgoun et le groupe Stern [81] .

Mais les orientations britanniques sont désormais tributaires des États-Unis. Et le président Truman [82] multiplie les déclarations en faveur de la cause sioniste [83] , malgré les réserves d’une partie de son administration [84] . Dans ces conditions, le Royaume-Uni, estimant qu’il n'a plus les moyens de maintenir sa présence [85] , décide de remettre son mandat aux Nations unies (18 février 1947). Le 28 avril 1947, une assemblée générale extraordinaire de l'ONU crée une commission d'enquête, l'UNSCOP, chargée d'élaborer un rapport en vue d’un vote des États membres. Remis le 31 août, le rapport propose l’abolition du Mandat et un partage de la Palestine en trois États : un État arabe et un État juif, qui accéderaient à l'indépendance dans un délai de deux ans, et un État de Jérusalem sous tutelle internationale -doc.2a p.158. Le plan de partage de 1947 . Le plan est finalement approuvé le 29 novembre 1947 par la recommandation n°181 de l'Assemblée générale des Nations unies [86] .

La Grande-Bretagne décide alors d'évacuer unilatéralement la Palestine, sans procédure de transfert de pouvoirs [87] . L'Agence juive accepte le plan de partage, tandis que les Arabes palestiniens le refusent avec le soutien de la Ligue des État arabes, dénonçant une violation du droit à l'autodétermination. Des violences éclatent aussitôt (attaque des quartiers juifs, représailles des groupes sionistes radicaux), tandis que les autorités britanniques laissent le territoire s'enfoncer dans la guerre civile.

a.       La première guerre israélo-arabe (1948-1949) [88]

La guerre civile palestinienne.

Les forces sionistes sont plus nombreuses, mieux équipées et mieux organisées que les forces arabes palestiniennes. Outre l’Irgoun et le groupe Stern, rompus aux actions de guérilla, les sionistes peuvent compter sur la légion juive, formée durant la guerre, et sur la Haganah, force régulière juive en Palestine.

Le plan Dalet vise l'élimination des forces hostiles présentes dans la partie juive et dans les zones connexes de la partie arabe. Déclenché en avril 1948, il se traduit par la destruction de nombreux villages arabes et l'expulsion de leurs populations, voire leur élimination [89] .

Doc.1 p.158. La proclamation de l’État d’Israël- Le 14 mai 1948, l'État d'Israël est officiellement proclamé par David Ben Gourion, sans limite territoriale précise. L’Égypte, la Syrie, la Jordanie, le Liban et l'Irak lui déclarent aussitôt la guerre. Les forces arabes comptent 24 000 hommes, contre 30 000 Israéliens.

L'ONU envoie un médiateur suédois, le comte Bernadotte. Il obtient un cessez-le-feu le 11 juin 1948, mais les deux plans de paix qu’il propose sont refusés. Les armées arabes rompent la trêve le 8 juillet, mais la supériorité matérielle de Tsahal est désormais écrasante, notamment avec l'apparition de l'aviation [90]  : les armées arabes sont repoussées.

Une paix impossible : les armistices de Rhodes et la commission de conciliation (1948-1949)

Les négociations bilatérales (Israël-Égypte, Israël-Syrie, etc.) qui débutent à Rhodes durant l'automne 1948 aboutissent à quatre armistices distincts.

En marge de ces négociations,

la commission de conciliation de l'ONU réunit les différentes parties à Lausanne, pour traiter de la question des réfugiés (le plan Dalet et la guerre ont provoqué l’exil de 800 000 Arabes palestiniens [91] , pour lesquels l’ONU crée l’UNRWA -Vocabulaire p.156 ), et des modifications territoriales. Par exemple, la commission propose la division de Jérusalem en deux zones démilitarisées sous contrôle international. Le projet est rejeté par Israël, qui considère que son territoire comporte désormais les conquêtes de la guerre, et par la Transjordanie, qui annexe la Cisjordanie et Jérusalem-Est [92] -doc.2b p.158. Après la guerre de 1948 .

b.      L’évolution du conflit israélo-arabe (1949-1967)

La poursuite des tensions.

Les lignes d'armistice sont contestées, et une « guerre des frontières » oppose Israël à ses voisins :

  • La Syrie : l'enjeu principal de l'affrontement permanent entre Israël et la Syrie est la possession des eaux de la région, essentiellement celles du Jourdain [93] .
  • La Jordanie : la tension se cristallise sur les nombreuses tentatives palestiniennes d'infiltration, durement réprimées par Israël.

Par ailleurs, un contentieux oppose Israël et l’Égypte sur le golfe d’Akaba et sur le canal de Suez, où l’Égypte impose un embargo sur la navigation commerciale israélienne.

La crise de Suez (1956) [94]

À la tête de l’Égypte depuis 1954, Gamal Abdel Nasser [95] , désireux de moderniser son économie, projette la construction d’un barrage sur le Nil, à Assouan. Il sollicite l’aide financière des puissances occidentales, sans succès [96] . En réponse, Nasser nationalise la Compagnie du canal de Suez, afin que les revenus du canal financent le barrage d'Assouan [97] .

Une conférence des usagers du canal, réunie à Londres le 16 août 1956 [98] , propose l'internationalisation du canal sous l’autorité des Nations unies, projet rejeté par Nasser. Pendant ce temps, les Britanniques préparent avec la France une opération militaire secrète contre l'Égypte, en vue d’une reprise en main de la région, et obtiennent le concours d’Israël : il est convenu que les forces israéliennes attaqueront les premières l'Égypte, et que Français et Britanniques débarqueront au prétexte d’imposer un cessez-le-feu. Le plan « mousquetaire » prévoit un débarquement puis une marche sur Le Caire pour renverser le régime et réoccuper le canal.

L'attaque israélienne commence le 29 octobre 1956. Français et Britanniques envoient leur ultimatum aux belligérants. Le 2 novembre, l’Assemblée générale de l'ONU vote une résolution exigeant l'arrêt des combats et le retrait des forces israéliennes du Sinaï. Le 4 novembre, l'Assemblée générale décide la constitution d'une force internationale d'interposition, rendant l'intervention franco-britannique sans objet... Mais le 5 novembre, des troupes parachutées s'emparent de Port-Saïd et marchent vers le canal. La pression exercée par les États-Unis (menaces sur l’accès au pétrole et sur la livre sterling) et l’Union soviétique (menace de recourir à l'arme nucléaire) aboutit au retrait franco-britannique (6 novembre). C'est une victoire politique pour Nasser, mais la crise de Suez représente surtout la fin de la présence franco-britannique dans l'Orient arabe, et consacre la montée en force des Américains et des Soviétiques dans la région. La confrontation entre les deux grands commence alors au Moyen-Orient, qui tourne la page des dominations coloniales et entre en guerre froide.

c.       La guerre des Six jours (5-10 juin 1967) et ses conséquences

Vers le conflit.

À la veille de la guerre des Six jours, le fait le plus marquant est la division politique de l'Orient arabe, où l’influence de Nasser et le baasisme sont combattus par l'Arabie saoudite, chef de file des pays conservateurs proches des États-Unis.

Pour la Syrie baasiste, le combat contre Israël est associé à celui contre l'impérialisme occidental et contre les régimes arabes conservateurs. Soutenue par l’Union soviétique, la Syrie prône la guerre populaire, sur l'exemple de l'Algérie ou du Vietnam, pour libérer la Palestine, mais aussi pour renverser les régimes « réactionnaires » (Jordanie, Arabie saoudite…). Dans ce contexte, quand Israël obtient le soutien militaire américain [99] , Nasser devient plus dépendant de l'aide soviétique [100] .

Le 15 mai 1967, Nasser déploie l'armée égyptienne dans le Sinaï, d’où les forces onusiennes se retirent. Le 18 mai, Israël mobilise. Le 1 er juin, la Jordanie signe un pacte de défense commune avec l'Égypte [101] , rejoint par l’Irak le 4 juin.

Les opérations militaires

Le 5 juin 1967, l'aviation israélienne détruit en quelques minutes l’aviation égyptienne. Tsahal envahit Gaza et le Sinaï et atteint le canal le 8 juin. À la suite de cette déroute [102] , Nasser annonce sa démission (9 juin), avant d’accepter de revenir au pouvoir [103] .

Côté jordanien, le potentiel aérien est aussitôt détruit par l'aviation israélienne (5 juin). L'offensive israélienne se concentre sur Jérusalem et le nord de la Cisjordanie, avec un appui aérien décisif. Le 6 juin au soir, Hussein ordonne le repli de son armée à l'est du Jourdain. Les forces israéliennes occupent Jérusalem-Est et l'ensemble de la Cisjordanie [104] .

Dès le 5 juin, l'aviation israélienne attaque les installations aériennes syriennes. La conquête du plateau du Golan commence : 120 000 Syriens fuient ou en sont expulsés dans les six mois qui suivent.

Les conséquences du conflit [105]

Doc.2c p.158. Après la guerre des Six-jours- Occupant Gaza et le Sinaï, Israël considère par ailleurs Jérusalem-est [106] , la Cisjordanie, la bande de Gaza et le Golan comme définitivement acquis.

Le 22 novembre 1967, les membres du Conseil de sécurité adoptent la résolution 242, qui demande la cessation des affrontements, le « retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés » -Vocabulaire p.156 , le respect et la reconnaissance de l'intégrité territoriale de tous les États de la région. Elle rappelle la liberté de navigation sur les voies d'eau internationales et demande le règlement de la question des réfugiés. Israël estime que la résolution 242 demande le retrait israélien « de territoires occupés » et non « des territoires occupés » -doc.4 p.159. Une situation bloquée .

d.      La guerre d’octobre 1973

Dès 1968, l'Égypte entreprend son réarmement avec du matériel soviétique. Tandis qu’Israël consolide sa ligne de position devant le canal (ligne « Bar Lev »), Nasser met en place le plan « granit » (1969), destiné à neutraliser l'aviation israélienne pour reconquérir le Sinaï. À partir de 1970, Israël multiplie les bombardements stratégiques sur l’Égypte, auxquels seule l’apparition d'avions pilotés par des Soviétiques mettra un terme. Cette guerre d'usure a fait autant de victimes que la guerre de 1967.

A. Sadate [107] et H. el Assad adoptent un plan contre Israël. Le 6 octobre 1973 [108] , l’armée égyptienne franchit le canal et attaque la ligne Bar Lev. Simultanément, l'armée syrienne lance une offensive sur le Golan. Les lignes de défense israéliennes sont au bord de l'effondrement.

Israël obtient des États-Unis de nouvelles fournitures de matériel (pont aérien établi le 14 octobre), qui lui permettent de repousser l’armée égyptienne sur le canal, et Ariel Sharon, commandant des forces israéliennes, tente alors de l’encercler. L'URSS organise à son tour des ponts aériens avec la Syrie et l'Égypte, et annonce son intention d’intervenir directement. Les négociations soviéto-américaines qui s'ouvrent le 20 octobre à Moscou aboutissent le 22 à la résolution 338 du Conseil de sécurité des Nations unies : cessez-le-feu immédiat, application de la résolution 242, ouverture de négociations.

e.      Camp David

Les négociations d'après-guerre.

Une négociation générale s'ouvre en décembre 1973 à Genève, sous une coprésidence américano-soviétique. Mais H. Kissinger, le secrétaire d’État du président Nixon (1969-1974), parvient à établir entre Israël et les États arabes une médiation se passant des Soviétiques. Il renonce à un accord global, privilégiant un rapprochement progressif des positions par la politique des « petits pas » :

  • En janvier 1974 un accord israélo-égyptien [109] décide du retrait des forces israéliennes à 20 kilomètres du canal. Entre les deux armées, une zone tampon est occupée par la FUNU.
  • La question du Golan est plus délicate, car Israël y a multiplié les colonies et entend annexer une grande partie de ce territoire. Fin mai néanmoins, un accord syro-israélien est signé.
  • Refusant toute représentativité aux Palestiniens, Kissinger se montre favorable à un retrait israélien de la Cisjordanie au profit de la Jordanie, mais Israël s'y oppose [110] .

Les accords de Camp David

Le 4 septembre 1975, Israël et l'Égypte s'engagent à régler leurs différends par des moyens pacifiques. Les responsables israéliens sont disposés à se retirer du Sinaï, et Sadate se dit prêt à négocier un accord séparé avec Israël. C’est dans ce contexte que la nouvelle administration Carter, arrivée au pouvoir aux États-Unis en 1976, relance la conférence de Genève (février 1977). Pour Carter, à l’opposé des « petits pas » de Kissinger, les négociations doivent impliquer Israël, l’Égypte et la Jordanie, et porter sur trois points : la paix, les frontières et les réfugiés.

Le 19 novembre, Sadate se rend à Jérusalem et s’exprime devant le Parlement israélien -Sujet bac p.170-171 , où il exprime son désir de paix et défend les droits des Palestiniens. Les accords conclus dans la foulée à Camp David (5-17 septembre 1978) -doc.3 p.159. L’Égypte fait la paix avec Israël en 1978 conservent la résolution 242 comme cadre de référence des négociations et comportent deux parties : 1) le « cadre pour la paix au Moyen-Orient » concerne la Cisjordanie et la Bande de Gaza ; 2) le « cadre pour un traité de paix israélo-égyptien ». Israël, officiellement reconnu par l'Égypte, se retire du Sinaï et obtient la liberté de navigation dans le canal de Suez. Pour la Cisjordanie et Gaza, Israël accepte l'instauration d'une « autorité autonome » arabe élue dans les territoires, associant la Jordanie... Mais en même temps, M. Begin [111] relance la politique de colonisation juive à Gaza et en Cisjordanie. Quand le traité de paix israélo-égyptien est signé à Washington le 26 mars 1979, c’est un indéniable succès, mais il demeure partiel : les pourparlers sur l'autonomie palestinienne reprennent le 29 mai 1979, puis s’interrompent le 30 juillet 1980, quand le Parlement israélien vote l'annexion de Jérusalem-Est.

Conclusion : entre tensions et normalisation

Dans le monde arabe, la condamnation de l'Égypte est unanime. Le IX e sommet arabe, rejette à l’unanimité les accords de Camp David. Dès lors, la normalisation des relations israélo-arabes se fera très progressivement, à partir des années 1990.

Le Maroc, puis la Tunisie décident en 1994 d'établir des relations diplomatiques avec Israël, tandis que les pays du Golfe lèvent partiellement le boycott économique sur Israël et que la Jordanie signe à son tour un accord de paix (1994). En 2020, certaines monarchies du Golfe normalisent leurs relations avec Jérusalem pour renforcer leur alliance tacite contre Téhéran [112] , sous le patronage du président Trump.

Aujourd’hui, à bien des égards, le conflit israélo-arabe s’est transformé en un affrontement israélo-iranien et un grand jeu régional impliquant Arabes, Israéliens, Iraniens, Turcs, Kurdes, Occidentaux et Russes, et plus récemment Chinois [113] . Les Palestiniens font figure de grands perdants de cette recomposition géopolitique, même si leur situation continue d’interférer sur les velléités de « normalisation », par exemple des relations entre Arabie saoudite et Israël.

2.     Le conflit israélo-palestinien

A.       le conflit israélo-palestinien avant camp david, l'émergence politique des palestiniens après la première guerre israélo-arabe.

Lassée de voir les États arabes instrumentaliser la question de Palestine à leur profit, la génération palestinienne des camps de réfugiés se détache du panarabisme et du nassérisme. Quand Yasser Arafat fonde en 1959, à Koweït, le Mouvement de libération de la Palestine, le Fatah (ouverture), il lui donne comme slogan : « l'unité arabe passe par la libération de la Palestine » -slogan exactement inverse de celui de Nasser. En réaction, celui-ci crée en 1964 l’Organisation de libération de la Palestine (OLP -Vocabulaire p.156 ) sous la direction d’Ahmad Shuqayri. L’OLP est panarabiste et proche de Nasser : sa charte de 1964 affirme que « la Palestine est une terre arabe unie par des liens nationaux étroits aux autres pays arabes. Ensemble, ils forment la grande nation arabe ». Yasser Arafat affiche son opposition en se rendant à Alger et obtient l'aide de Ben Bella pour mener des actions de guérilla contre Israël. A l-Asifa (la tempête), branche militaire du Fatah, mène des opérations armées contre Israël dès la fin 1964.

Les conséquences de la guerre des six jours

Peuplés d'un peu plus d'un million d'Arabes dont la moitié sont des réfugiés de 1948, les territoires occupés (Cisjordanie, Jérusalem Est et Gaza) -Vocabulaire p.156 après la guerre des six jours sont conçus, sur le plan militaire, comme des zones tampons, dont Israël favorise l’intégration économique, autorisant la main-d'œuvre arabe à venir travailler en Israël.

Née dans les camps des pays voisins, la résistance palestinienne cherche à s'implanter dans les territoires occupés, mais elle est mise en échec par la répression israélienne (arrestations, destructions d'habitations…). En 1968, les organisations de résistance entrent dans l'OLP -doc.5 p.160. La Charte de l’OLP (1968) , dont Yasser Arafat prend la tête en 1969. Financée par les Palestiniens de la diaspora et par les pétromonarchies -Vocabulaire p.155 , l’organisation développe un ensemble de services civils (santé, enseignement, finances), et verse des pensions aux familles des « martyrs », se rapprochant de la forme d’un État. Parallèlement, elle cherche à impliquer la communauté internationale dans le règlement du conflit [114] .

b.      Le conflit israélo-palestinien après Camp David

Après Camp David, c’est le mythe de l'unité arabe qui sombre. C’est également un tournant pour la question de Palestine, puisque le conflit devient plus étroitement israélo-palestinien.

De Camp David au processus de paix

Le rejet jordanien des accords de Camp David a entraîné un rapprochement entre le roi Hussein et l'OLP, qui affiche une nouvelle modération en proposant la « terre contre la paix » : en dépit de fortes oppositions, Arafat se montre favorable à la création d'un État palestinien dans les seuls territoires occupés. Mais de nouveaux acteurs plus radicaux émergent : les organisations islamistes [115] .

En décembre 1987, des émeutes populaires éclatent à Gaza et se propagent à la Cisjordanie. C'est le début de l’ Intifada (soulèvement) pour l'édification d'un État palestinien indépendant. En plus de la « guerre des pierres », affrontement qui symbolise le caractère asymétrique du conflit israélo-palestinien -doc.6 p.160. L’intifada + Vocabulaire p.154 , l' Intifada s'organise autour de comités populaires, qui impulsent les grèves, le boycott des marchandises israéliennes, etc. Une partie des islamistes se rallie tandis que les plus radicaux forment le Mouvement de la résistance islamique ( Hamas en arabe -Vocabulaire p.156 ), dont l’objectif est la disparition totale de l'État d'Israël.

La répression du soulèvement fait plus d’un millier de morts, et 15 000 Arabes sont emprisonnés.

 En même temps qu’elle ternit l’image d’Israël [116] , l’ Intifada permet à l'OLP de déclencher une offensive diplomatique. À la conférence des Nations unies de Genève, du 13 au 16 décembre 1988, Yasser Arafat reconnaît l’État d'Israël, admet les résolutions 242 et 338 et dénonce l'action terroriste. Dans ces conditions, Washington accepte d'ouvrir le dialogue avec l'OLP [117]  : la nouvelle administration Bush (1988-1992) souhaite favoriser l'émergence d'une autorité politique palestinienne acceptant la coexistence avec Israël. Côté israélien, le gouvernement Y. Shamir, premier ministre depuis le 11 mars 1990, accepte l'ouverture de négociations sur l’autonomie des territoires… mais annonce qu'il poursuivra l’implantation de colonies. C'est l'impasse.

Le processus de paix israélo-arabe

Jalon p.160-161. Le processus de paix israélo-palestinien- Mais le président américain, dont la popularité est au sommet au lendemain de la première guerre du Golfe (1990-1991), relance le processus. En avril 1991, Israël accepte l'idée d'une conférence régionale avec des Palestiniens mais sans représentant de l'OLP. Yasser Arafat déclare que l'OLP ne permettra jamais ni à Israël, ni aux États-Unis, de désigner une délégation palestinienne. Finalement, des « experts » désignés par l'OLP encadreront la délégation. La conférence de la paix s'ouvre à Madrid le 30 octobre 1991, mais échoue rapidement. Il faudra attendre l’élection de nouveaux dirigeants israéliens [118] qui acceptent le principe d’une autonomie palestinienne, pour que les négociations reprennent à Washington fin 1992.

Dans le même temps, une négociation parallèle réunit des proches de Shimon Pérès et des responsables de haut niveau de l'OLP. Elle se tient à Oslo, où le gouvernement norvégien assure la confidentialité des discussions et offre sa médiation. Les négociateurs rédigent une Déclaration de principes, soutenue par les États-Unis, qui proposent sa signature officielle à Washington. Doc.7 p.160. Les accords d’Oslo- Signée le 13 septembre 1993 à la Maison blanche, la « Déclaration de principes sur les arrangements intérimaires d'autogouvernement » fait souffler un vent d’espoir sur la région, mais s’avère un document complexe qui se prête à différentes interprétations possibles. La période intérimaire de cinq ans commence le 4 mai 1994 et les négociations doivent s'achever le 4 mai 1999.

L'application difficile des accords israélo-palestiniens

La violence dans les territoires occupés se poursuit : le Hamas, qui mène l'opposition aux accords de paix, multiplie les attentats contre les colons israéliens ; ceux-ci, soutenus par le Likoud (la droite israélienne) et son nouveau chef, Benjamin Netanyahou, lancent des représailles contre la population arabe [119] . Il incombe à l’autorité palestinienne d’empêcher la poursuite des attentats. Une force de police palestinienne est créée, chargée du maintien de l'ordre en coopération avec l'armée israélienne. En août 1994, à la suite d’un nouvel attentat, l’épreuve de force éclate entre l'autorité palestinienne -Vocabulaire p.154 et le Hamas, dont plusieurs responsables sont arrêtés.

Fin 1994, le processus de paix est suspendu, et les négociations qui reprennent début 1995 s'ouvrent dans un climat tendu. En effet, Israël a donné aux colonies le droit de s'étendre, ce qui entraîne de nouvelles manifestations et de nouveaux attentats. Les négociations règlent néanmoins la question des élections [120] et aboutissent aux « accords Oslo II », signés à la Maison blanche le 28 septembre 1995, qui découpent les territoires occupés en trois zones :

  • Une zone A, qui comprend toutes les agglomérations palestiniennes, sauf Hébron, qui seront sous la responsabilité directe de l'autorité palestinienne.
  • Une zone B, qui regroupe les villages administrés conjointement.
  • Une zone C rassemble les régions peu peuplées et les colonies, sous contrôle israélien exclusif.

L'accord entraîne le développement des contestations en Israël.

L’opposition israélienne adopte une ligne de plus en plus violente, et des personnalités religieuses appellent au meurtre de Y. Rabin. Le gouvernement réplique par une grande manifestation pour la paix, à Tel-Aviv le 4 novembre 1995. Ce soir-là, Y. Rabin est assassiné en public par un extrémiste israélien. Cet évènement marque la fin des espoirs du processus de paix.

La paix impossible ?

La droite israélienne revient au pouvoir en 1996 avec, à sa tête, Benyamin Netanyahou [121] , hostile aux négociations. Une dernière tentative du président Clinton pour relancer le processus de paix échoue en 2000, et une seconde Intifada éclate.

Israël, dirigée depuis 2000 par Ariel Sharon (Likoud), ne donne pas suite à l’initiative de paix de la Ligue des États arabes (mars 2002) [122] poursuit en Cisjordanie [123] parallèlement au démantèlement des colonies juives de Gaza (2005) -Repère p.161. Les colonies israéliennes + doc.9 p.161. Israël et les territoires palestiniens en 2019 . Les Palestiniens, divisés entre une Cisjordanie administrée par le Fatah de Mahmoud Abbas, le successeur de Yasser Arafat et la bande de Gaza, tenue par le Hamas à partir de 2007 -doc.8

p.161. L’évolution du Hamas , voient leur territoire diminuer sous la pression de la colonisation et des « murs de sécurité ». Les tensions à Jérusalem, en Cisjordanie et à Gaza sont récurrentes -et meurtrières [124] .

Pour l’Autorité palestinienne, il s’agit de ramener le dossier au sein des Nations-Unies [125] . En 2011, l’Autorité palestinienne demande à l’ONU d’enregistrer l’État palestinien comme membre à part entière, mais la démarche échoue du fait des pressions exercées par les États-Unis sur le vote. Finalement, en 2012, l’Autorité palestinienne obtient la reconnaissance de la Palestine comme État observateur non-membre. L’ONU a exprimé à maintes reprises sa préoccupation au sujet de la question palestinienne, par exemple en 2002, quand le Conseil de sécurité vote la résolution 1397, ou en 2016, avec la résolution 2334 exigeant qu’Israël arrête « immédiatement et complètement » toutes ses activités de peuplement dans le territoire palestinien, y compris Jérusalem-Est. Il souligne qu’il ne reconnaîtra « aucune modification aux frontières du 4 juin 1967 », y compris en ce qui concerne Jérusalem, et exige qu’Israël arrête « immédiatement et complètement » ses entreprises expansionnistes.

Mais d’une manière générale, Israël semble avoir choisi de tourner le dos à l’ONU [126] , et se contenter du seul soutien des États-Unis [127]  : c’est dans cette logique qu’il faut analyser, sous le mandat de Donald Trump, le statut de Jérusalem, ou encore les projets d’annexion du Golan et de la Cisjordanie [128] .

 Dans ces conditions, pour bien des observateurs, le conflit israélo-palestinien pourrait bien être « un conflit sans fin » -Cours p.156-157. Une paix impossible ?

B.    Les deux guerres du Golfe (1991 et 2003) et leurs prolongements : d’une guerre interétatique à un conflit asymétrique

L'invasion du Koweït par l'Irak de Saddam Hussein en 1990 suscite une vaste réprobation mondiale. Les États-Unis dirigent une coalition internationale pour y mettre un terme en 1991. En 2003, le président américain George W. Bush « junior » lance une nouvelle campagne contre l'Irak. Malgré l'opposition de l'ONU, il y déclenche une guerre dont les conséquences se paient encore aujourd’hui.

Pourquoi l'Irak est-il devenu au tournant du XXIe siècle l'épicentre des conflits moyen-orientaux ?

1.     La première guerre du Golfe et ses retombées

Jalon p.162-163. La première guerre du Golfe

a.       Irak vs reste du monde

L’Irak de Saddam Hussein sort de la guerre contre l'Iran (1980-1988) à la fois surendetté et surarmé. Il exige du Koweït voisin une remise de dettes et une correction de frontières qui renforcerait sa position face à l'Iran, ainsi que l'arrêt des pompages pétroliers excessifs dans le champ de Roumeila, situé sur la frontière irako-koweïtienne. Le Koweït ne cède rien.

Doc.1 p.162. L’Irak justifie l’invasion du Koweït- Le 2 août 1990, les troupes irakiennes envahissent le Koweït. La riposte occidentale, à l'initiative des États-Unis, favorisée par l’effacement de la puissance soviétique, marque le spectaculaire lâchage d'un régime dictatorial pourtant soutenu sans scrupule depuis ses débuts en 1979 [129] . Doc.2 p.162. George Bush senior justifie l’intervention des États-Unis- L'intervention de la vaste coalition [130] est légitimée par une série de résolutions de l’ONU. Doc.3 p.163. Les forces en présence- Elle aboutit au débarquement de 500 000 hommes en Arabie Saoudite, puis à une campagne éclair en janvier-février 1991 [131] , qui chasse l'armée irakienne du Koweït.

Encouragée par les Occidentaux, la révolte kurde au Nord de l'Irak est pourtant écrasée dans le sang [132] , ainsi que les rébellions chiites au Sud. Si, pour les Kurdes, les pays occidentaux installent au Nord de l'Irak une zone où il est interdit à l'armée irakienne de pénétrer, le sud est abandonné à son sort, à la demande des pays arabes membres de l'alliance, effrayés par la perspective de l'émergence d'un État chiite irakien qui serait sous la coupe de l'Iran. L'armée de Saddam Hussein déchaîne alors une répression impitoyable sur les chiites du Sud de l'Irak -doc.4 p.163. L’encombrant Saddam Hussein .

b.      Le Moyen-Orient dans les années 1990 : une poudrière

Rapidement, les espoirs nés de la fin de la guerre froide et de la victoire de la coalition s'évaporent. Le président George Bush avait promis un ordre international nouveau où le droit international ne serait plus bafoué [133] . Loin s’en faut, et le Moyen-Orient fait plus que jamais figure de poudrière :

  • Sur le conflit israélo-palestinien, les États-Unis, forts de leur victoire face à l’Irak, organisent un processus de paix qui aboutit aux accords d’Oslo (1993), mais celui-ci s’enlise bientôt [134] .
  • Si la guerre civile qui ensanglante le pays depuis 1975 s'arrête en octobre 1990, c'est au prix d'une mise sous tutelle du pays par la Syrie [135] . L’accord conclu en Arabie Saoudite dans la ville de Taëf [136] entre les factions combattantes libanaises se traduit par des réformes constitutionnelles majeures, qui vont favoriser le développement d'une corruption d'une ampleur inégalée, dont le Liban est encore victime aujourd’hui.
  • Israël continue d'occuper le Sud du Liban jusqu’à son retrait en mai 2000, sous la pression du Hezbollah. Fort de ce succès, le Hezbollah devient un élément-clé de la politique intérieure libanaise, et intègre pour la première fois le gouvernement en 2005.
  • L'irruption de l'armée américaine en Arabie Saoudite, pays des Lieux saints musulmans, a suscité l'indignation des milieux rigoristes islamiques (NB. Après leur victoire, ces troupes ne se sont pas retirées). Un retournement lourd de conséquences se produit : les groupes terroristes se réclamant d'Oussama Ben Laden [137] retournent leurs armes contre les États-Unis, dont les ambassades au Kenya et en Tanzanie subissent des attentats sanglants en 1998, avant de commettre les attentats du 11 septembre 2001.

2.     La Seconde guerre du Golfe et ses prolongements : d’une guerre interétatique à un conflit asymétrique

Jalon p.164-165. La deuxième guerre du Golfe et ses conséquences

a.       La démocratisation par la force ?

Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, l’équipe de « faucons » néoconservateurs autour du nouveau président rêve en effet de remodeler le Moyen-Orient, région du monde qui apparaît rebelle au nouvel ordre international. G. W. Bush et ses « faucons » sont sensibles à la thèse de l'universitaire

Samuel Huntington sur un conflit de civilisation opposant l'Occident à l'islam (et éventuellement, au confucianisme asiatique [138] ). À leurs yeux, les vrais problèmes du Moyen-Orient sont le terrorisme, l'Iran et les armes de destruction massive de l'Irak. Les attentats du 11 septembre ouvrent pour les États-Unis le chemin de l’intervention militaire en Afghanistan, où s’abritait Al-Qaïda [139] (« guerre contre le terrorisme », 2001), mais aussi en Irak (« Axe du Mal », 2003). Au-delà du prétexte fallacieux de la présence d'armes de destruction massive en Irak [140] , le président George W. Bush affirme vouloir reconstruire le Moyen-Orient sur des bases démocratiques et stables [141] .

b.      Une guerre interétatique… préventive

Si la « communauté internationale » se rallie sans réserve à l’intervention en Afghanistan (sous les couleurs de l’OTAN), la perspective d’une Seconde guerre du Golfe n’obtient pas l’adhésion de tous. En janvier 2003, Colin Powell tente de rallier le Conseil de sécurité aux vues de Washington, mais il se heurte à l'opposition de la France, représentée par son ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin, qui croit en une solution pacifique -doc.5 p.164. L’opposition de la France à la guerre [142] . Qu'à cela ne tienne : Washington obtient l’appui de huit membres de l'OTAN emmenés par la Grande-Bretagne et bientôt rejoints par dix pays d'Europe centrale et orientale (Groupe de Vilnius). Le 16 mars 2003, le président George W. Bush rencontre les Premiers ministres britannique (Tony Blair), espagnol (José Maria Aznar) et portugais (José Manuel Barroso). Le 17 mars, les quatre dirigeants lancent un ultimatum à l'Irak de Saddam Hussein en se passant de l'accord des Nations Unies -Doc.7 p.165. Britanniques et Américains justifient le recours à la force + Repère p.164. L’Europe fracturée .

La guerre est déclarée le 20 mars 2003. Après une courte campagne, les Américains s'attendent à être accueillis à Bagdad en libérateurs chargés de construire une démocratie modèle, comme au Japon ou en Allemagne en 1945. Il n’en est rien. L'arrestation de Saddam Hussein dans une cave de sa ville natale de Tikrit le 13 décembre 2003 et son exécution le 30 décembre 2006 closent l’épisode de la guerre interétatique, et marquent le basculement dans la guerre asymétrique.

En se fourvoyant dans une guerre d'agression, fondée sur des preuves erronées, les États-Unis se discréditent dans le monde arabe et bien au-delà - « Grand oral » p.122-123. Peut-on encore penser la guerre juste ? Certains aspects de la « guerre globale contre le terrorisme » (« croisade du Bien contre le mal » du président G. W. Bush, bombardements des populations civiles, actes de torture [143] , emprisonnements arbitraires,

assassinats ciblés [144] …) suscitent des critiques [145] et servent la propagande des organisations terroristes. Al-Qaida continue à exister en rassemblant sous sa bannière d'autres groupes djihadistes, sur des terrains de lutte où la pression militaire américaine est moins forte, en Asie du Sud-Est, dans le Caucase, en Afrique, et bien entendu à travers le monde arabe.

En Irak, les conséquences de l'invasion étatsunienne sont catastrophiques. Elle a achevé l'œuvre de déstructuration de la société irakienne entamée par treize années d'embargo économique, le délabrement des infrastructures et l’appauvrissement généralisé de la population venant se surajouter aux exactions de la dictature de Saddam Hussein. Pour l’historien Georges Corm [146] , la façon dont les États-Unis ont dissous l'armée, la police et tous les services de sécurité ne peut être attribuée qu'à une légèreté criminelle ou, beaucoup plus probablement, à la volonté d'empêcher que l'Irak puisse un jour redevenir vraiment souverain. Encore plus accablant est selon lui le fait que l’envahisseur ait joué des divisions communautaires, ethniques et régionales pour asseoir sa domination : la minorité sunnite, dont Saddam Hussein et son clan sont issus, est désignée comme source unique de tous les malheurs. Même si une grande partie de la communauté sunnite était également opprimée par la dictature baasiste, les chiites et les Kurdes sont considérés comme les seules victimes, et la minorité sunnite dans son ensemble comme l’ennemi des États-Unis. Les sunnites sont victimes de la politique de « débaasification » initiée à partir de mai 2003 : destitués de leurs fonctions dans l’armée et l’administration ils sont aussi exclus du Conseil de gouvernement irakien formé en juillet 2003, au bénéfice des Kurdes et des chiites, seuls jugés capables de bâtir la démocratie.

c.       L’heure de la guerre asymétrique

Sur le plan militaire, les affrontements continuent sous la forme d’un conflit asymétrique dans cette région après le renversement du régime de Saddam Hussein : des insurgés sunnites luttent contre l’occupation états-unienne. Une région au Nord-Ouest de Bagdad, nommée « triangle sunnite » par les militaires américains, est le lieu des opérations les plus violentes [147] . C’est là que les États-Unis remportent la bataille de Falloujah [148] (6-29 novembre 2004).

À l’issue des élections législatives de 2005, boycottées par les sunnites, la formation d’un gouvernement chiite soutenu par les États-Unis ouvre la voie à la radicalisation d’une partie des sunnites : les courants salafistes se développent, au détriment des courants sunnites traditionnels, plutôt nationalistes et opposés au communautarisme. Ils affirment une identité sunnite opposée à l’État irakien et au pouvoir chiite jugé

illégitime, voire mécréant. Les attentats contre la coalition se multiplient et les violences entre sunnites et chiites se déchaînent. Nouri Al-Maliki arrive au pouvoir en mai 2006, à la tête d’un gouvernement composé essentiellement de chiites, mais promettant la réconciliation nationale. Il n’en fera rien : au printemps 2006, après un attentat contre le mausolée chiite de Samarra revendiqué par Al-Qaida -doc.8 p.165. La guerre civile , la marginalisation des sunnites, collectivement accusés de soutenir Al-Qaida par le gouvernement Maliki, s’aggrave encore.

Le 15 octobre 2006, des djihadistes sunnites, en partie issus des rangs d’Al-Qaïda, proclament l’État islamique d’Irak, qui devient État islamique (« Daech ») en juin 2014 sous la direction d’Abou Bakr Al-Baghdadi, qui prétend établir un califat sur toute la communauté des croyants, sur le modèle du califat abbasside tel qu’il existait au IX ème siècle [149] . Son emprise s’étend alors sur une grande partie des provinces sunnites d’Irak et sur la Syrie voisine, à la faveur du chaos de la guerre civile syrienne. La capture d’infrastructures pétrolières et les pillages lui assurent des revenus qui lui permettent de se procurer des armes et de mener des opérations de propagande [150] .

Maliki est finalement lâché par les alliés internationaux de l’Irak appelés à l’aide face à l’État islamique à partir de 2014 : la politique du Premier ministre est devenue incompatible avec la nouvelle position de Washington et de la coalition occidentale, qui fait désormais de l’inclusion des sunnites une condition de son intervention. Début septembre 2014, Haïder Al-Abadi lui succède au poste de Premier ministre [151] et affirme alors sa volonté d’offrir une meilleure représentativité aux minorités sunnite et kurde. Bagdad espère désormais pouvoir s’appuyer sur les tribus sunnites pour contrer la progression de l’État islamique.

La « chute » de l’État islamique en 2019, sous les assauts conjoints des régimes de Damas et de Bagdad, de l’Armée syrienne libre, des milices kurdes, de la coalition occidentale, de la Turquie, de l’Iran, de la Russie, etc., semble devoir mettre un terme provisoire à la guerre. Néanmoins, les conditions d’une stabilité retrouvée en Irak [152] et au Moyen-Orient en général sont encore loin d’être remplies et l’avenir demeure lourd d’incertitudes et de menaces [153] .

Conclusion (objet de travail conclusif)

Révisions p.168-169

Sujets bac p.170-171

Conclusion du thème

Révisions du thème p.172

Exemples de sujets et approfondissements p.173

Grand oral p. 174-175

[1] En France, la dernière déclaration de guerre remonte au 3 septembre 1939. Pourtant, l'armée française s'est battue ensuite en Indochine, et toute une génération a été appelée à combattre en Algérie -la « guerre d'Algérie », euphémisée par l'expression « événements d'Algérie », a longtemps fait l'objet d'un déni officiel. Depuis les années 1960, la France a participé à une trentaine d'opérations militaires dans ses anciennes colonies africaines. Plus de 11 000 soldats français sont actuellement déployés de l'Afrique au Moyen-Orient.

[2] …d'où l'étonnement de voir en France des hommes armés de fusils d'assaut patrouiller dans les rues pour protéger la population contre des attentats terroristes.

[3] NB : à l'exception des attentats terroristes.

[4] …le cas extrême étant les génocides, qui ont toujours eu lieu durant des guerres.

[5] L’effondrement de l’URSS et la fin de la guerre froide (1991) ont fait proliférer les pouvoirs faibles et les États-nations instables, dans un contexte de résurgence ou d’émergence des nationalismes.

[6] Cf. les opérations de maintien de la paix de l’ONU sur le site officiel de l’institution .

[7] Cf. ci-après, II. A .

[8] Envie d’en savoir plus ? Visionnez l’excellent épisode de la chaîne YouTube Nota Bene qui lui est consacré !

[9] Colin Powell, futur secrétaire d’État de George Bush Jr., étudiant au War College de Washington, découvre Clausewitz : « Ce fut comme si un rayon de lumière avait surgi du passé, illuminant toujours les dilemmes des militaires d’aujourd’hui. »

[10] La dernière biographie de Clausewitz est l’œuvre de l’historien Bruno Colson en 2016. Nous nous appuyons ici sur l’analyse de cet ouvrage, consultable en ligne , par Olivier Zajec, « Carl von Clausewitz en son temps : ‘die Natur des Mannes’ », Stratégie , 25 mars 2018

[11] Pour le roi de Prusse Frédéric-Guillaume III, c’est une trahison ; mais Clausewitz est convaincu d’agir pour sa patrie.

[12] « Je t’écris […] parmi les cadavres et les mourants et les ruines fumantes, et des milliers d’êtres, tels des spectres errants, passent et crient et supplient et pleurent en demandant vainement du pain. Dieu veuille que ces scènes changent très bientôt ! Embrasse cordialement mille fois tous nos amis ! Je mets tout le monde sous ce nom ; car en cet instant mon cœur est si rempli de la souffrance humaine que je ne connais aucune distinction de rang. » (Clausewitz à Marie, près de Borissov sur la Bérézina,

[13] « À rebours de certaines des interprétations (Aron par exemple), il faut bien revenir au fait que Clausewitz est un guerrier, et que rien de ce qu’il écrit n’est compréhensible si l’on ne retourne à la source sanglante et vécue de son inspiration. Et en le lisant, il faudrait se servir d’une baïonnette comme marque-page, afin de ne pas être tenté de l’oublier. » (O. Zajec)

[14] Deux chaînes Youtube, Nota Bene et Les arènes du savoir consacrent une vidéo à la guerre de Sept Ans, ainsi que la chaîne YouTube Sur le Champ ( épisode 1 , épisode 2 ). Si vous préférez lire, rendez-vous sur le site du magazine Diplomatie .

[15] L’image des Britanniques en pâtit, d’autant plus qu’ils ont également recours aux services de corsaires.

[16] Cette victoire, acquise au prix d’un effort de guerre monstrueusement cruel, laisse néanmoins un goût amer. Tordons le cou à un mythe : s’il est bien un conflit qui dément avec éclat la légende de « la guerre en dentelles » au XVIIIe siècle, c’est bien cette guerre de Sept Ans qui tua, selon les estimations, près de 800 000 soldats et 600 000 civils à travers le monde.

[17] Le secrétaire d’État des Affaires étrangères, l’abbé de Bernis, écrit ceci : « Si nous voulons suivre notre affaire de terre, il faut renoncer à celle de mer ; nous ne pourrons encore deux ans soutenir le fardeau de l’une et de l’autre. »

[18] Cf. Hervé Drévillon, «  Guerre totale / guerre limitée : une lecture limitée  »

[19] Avec lui et son mentor Gerhard von Scharnhorst, qu’il a rencontré en 1801 à l’institut pour jeunes officiers de Berlin, Clausewitz souhaite favoriser une prise de conscience de l’unité des peuples allemands bien au-delà de la Prusse.

[20] « La tactique est la théorie de l’emploi des forces au combat, alors que la stratégie est celle de l’emploi des combats en vue de la décision finale »

[21] E. Weil, “Guerre et politique selon Clausewitz”, Revue française de science politique, vol. 5, n° 2, avril-janvier 1955

[22] Célébrissime, la formule n’est pas si originale. Lossau , prestigieux militaire contemporain de Clausewitz, écrivait aussi que « La guerre est le moyen extrême des États pour obtenir par la force ce qui ne peut l’être par des moyens pacifiques ». Toute la génération de Clausewitz a cherché à « penser la guerre » de manière non dogmatique.

[23] Comme le philosophe Raymond Aron, par exemple. Cf. cet entretien télévisé de 1976 ( INA ). Cf. également cette série d’entretiens , plus longs et plus étayés.

[24] Lettre adressée par Clausewitz à Roeder en décembre 1827, citée par B. Colson, Clausewitz , 2016.

[25] La « mort spectacle » se trouve effectivement et malheureusement adaptée à nos sociétés de l’information où le recours aux images est constant, notamment sur les chaines d’information continue -doc.3 p.120. Les attentats du 11 septembre 2001 .

[26] KROLIKOWSKI Hubert, «  L'origine et les caractéristiques de la guerre irrégulière  », Stratégique , 2012/2-3, p. 13-28. Cf. également la présentation sur le site de l’IFRI du livre d’E. Tenenbaum, Partisans et centurions , 2018

[27] Le salafisme ramène à un islam des al-salafs (« les pieux ancêtres ») et s’appuie sur une lecture rigoriste des textes saints.

[28] Leur cadre de référence est l’oumma, la communauté des croyants -d’où leur rejet commun de l’État-nation et le caractère transnational des actions conduites.

[29] NB : Al-Qaïda n’a pas adhéré à la proclamation unilatérale du califat en juin 2014 par DAECH. Cf. D. Thomas, «  État islamique vs Al-Qaïda : autopsie d’une lutte fratricide  », Politique étrangère, 2016/1

[30] Cf. les frères Kouachi pour Al-Qaïda, Amedy Coulibaly ou Mohammed Mogouchkov pour Daesh.

[31] Cf. «  Blackwater, saga d’une armée privée  », Le Monde , 11 février 2018

[32] Certains dénoncent cette « privatisation de la guerre », mais l’historien Walter Bruyère-Ostells affirme que se passer de ces entreprises est impossible « parce que les États ont réduit le format de leurs armées. (Elles) se professionnalisent, leurs budgets sont sous pression et on estime que les tâches simples peuvent être externalisées. Et puis l’opinion publique ne supporte plus de voir ses soldats mourir au combat  » (Émission de RFI du 9 février 2016, «  L e boom des sociétés privées  » ) .

[33] François-Bernard Huyghe, «  L’impureté de la guerre  », Revue internationale de la Croix-Rouge , mars 2009 ; William S. Lind et al. “The changing face of war : into the fourth generation”, Marine Corps Gazette , 1989

[34] Emboîtement des échelles de la guerre (mer, terre, air, cyberespace, infosphère), réseaux d’allégeances à travers le monde.

[35] Cf. les exécutions de prisonniers, comme celle du pilote jordanien Maaz Al-Kassasbeh brûlé vif dans une cage en 2015, après laquelle la Jordanie avertit : « Tout membre de Daech est une cible pour nous. Nous les pourchasserons et nous les éradiquerons » (Nasser Joudeh, chef de la diplomatie jordanienne, à la chaîne de télévision américaine CNN, février 2015).

[36] Cf. l’« étonnante trinité », qui redevient dès lors opérante.

[37] HECKER Marc, «  Al Qaïda et le brouillard de la guerre contre le terrorisme » , tribune publiée le 12 septembre 2011.

[38] Marc Hecker & Élie Tenenbaum, La guerre de vingt ans. Djihadisme et terrorisme au XXIe siècle , 2021

[39] Olivier Zajec, « Carl von Clausewitz en son temps : ‘die Natur des Mannes’ », Stratégie , 25 mars 2018

[40] Christopher Bassford, “John Keegan and the Grand Tradition of Trashing Clausewitz : a Polemic” in Sage Journal

[41] Cf. https://www.vie-publique.fr/fiches/269786-systeme-international-du-modele-westphalien-nos-jours

[42] Multilatéralisme -Vocabulaire p.130 .

[43] Cf. la Diète, le Conseil impérial aulique, le Tribunal de la Chambre Impériale, les Cercles…

[44] La couronne impériale n'est pas héréditaire, l'empereur est élu par des princes-électeurs (sept depuis la Bulle d'or de 1356 : les archevêques de Trèves, de Cologne et de Mayence, le comte palatin, le duc de Saxe, le margrave de Brandebourg et le roi de Bohème). NB. Depuis 1438, l’Empereur est toujours un Habsbourg.

[45] L’historien Michael Kaiser a montré qu’il y a peu de signes religieux sur les bannières, peu de clercs, et que les armées ne sont pas confessionnelles.

[46] Selon cette paix signée en 1555, les sujets doivent adopter la confession de leur prince ou émigrer ; la liberté religieuse est accordée aux États impériaux, non aux individus. L’expression cujus regio, ejus religio , « tel prince, telle religion », est utilisée pour résumer la paix d’Augsbourg ; mais en réalité, la mixité religieuse existe partout sauf dans la Bavière catholique.

[47] La ville de Magdebourg perd la moitié de sa population lors de son siège par les armées impériales en 1631. Ville luthérienne qui s’est associée à la Suède, elle ne compte plus que 20 000 habitants. Ce sac marque les contemporains.

[48] Cf. également Les aventures de Simplicius Simplicissimus (1669) de Grimmelshausen.

[49] Les représentants de l’empereur et des puissances belligérantes sont rejoints en 1645 par ceux de 194 États de l’Empire.

[50] Il en résulte que parfois, les représentants d’un même pays peuvent parfois ne pas s’entendre entre eux : ainsi, Mazarin envoie à Münster le duc de Longueville (Henri II d’Orléans) pour mettre fin à la mésentente qui oppose Claude de Mesme, le comte d’Avaux, un diplomate polyglotte, dévot, ambitieux qui incarne un ancien type d’ambassadeur à Abel Servien, issu de la noblesse de robe provinciale, pragmatique, serviteur du roi très efficace.

[51] « Les politologues puis les hommes d'État ont, à la suite du spécialiste des relations internationales Leo Gross (1948), présenté les traités de Westphalie comme la naissance d'un ordre international fondé sur le concours d'États désormais souverains et égaux en droits. » (Claire Gantet, « Enquête sur une catastrophe européenne », L'Histoire , 2018).

[52] Les projets d’une monarchie catholique unissant la chrétienté occidentale paraissent définitivement enterrés : le Saint-Empire ne sera pas catholique, et les Habsbourg renoncent aux Provinces-Unies et aux cantons suisses qui voient leur indépendance reconnue. La papauté, qui a participé aux négociations entre puissances catholiques, condamne d’ailleurs la paix de Westphalie par la bulle Zelo Domus Dei du 26 novembre 1648.

[53] Cf. fiche repère sur geolinks.fr .

[54] À écouter, sur la chaîne YouTube Entertainment-Education WebTV .

[55] Succédant à la SDN issue de la Première Guerre mondiale, elle prolongeait la « Déclaration des Nations Unies » (1942), par laquelle les représentants de 26 États en lutte contre l'Axe proclamaient leur appui à la Charte de l'Atlantique (1941). Ce document marque la première utilisation officielle de l'expression « Nations Unies » suggérée par le Président des États-Unis Franklin D. Roosevelt.

[56]  NB : le besoin de sécurité est peut-être plus puissant que celui de paix, comme en témoigne le principe de légitime défense et le droit de s’armer et de se défendre des États.

[57] Cette idée se prolonge au XXe siècle, au sein de l’école dite « réaliste ». Cf. « Quelles sont les grandes théories en matière de relations internationales ? », viepublique.fr .

[58] Après avoir étudié aux États-Unis et en Suisse grâce à des bourses des fondations Ford et Carnegie (pour cela, il a longtemps été considéré par certains comme l’homme des États-Unis), Kofi Annan a exercé comme fonctionnaire à l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) avant de devenir sous-secrétaire général auprès de son prédécesseur Boutros Boutros-Ghali…

[59] « L e seul chemin praticable vers la paix et la coopération mondiales passe par l’ONU » ( Discours de Kofi ANNAN lors de la remise de son Prix Nobel de la Paix en 2001).

[60] CORTEN O., «  La paix par le droit », QI, n°100, Sept-Déc 2019.

[61] Site officiel de l’ONU.

[62] Site officiel de l’ONU.

[63] Cf. Thème 3, « Histoire et mémoire », Axe 2, « Histoire, mémoire et justice » .

[64] En 2002, il fait publier : «  Renforcer l’ONU : un programme pour aller plus loin dans le changement  » ( site officiel de l’ONU )

[65] Trente-deux États, dont la Russie et les États-Unis, ont signé le Statut de Rome mais ne l'ont pas ratifié. La CPI compte à ce jour 123 signataires.

[66] Site officiel de l’ONU.

[67] Devant l’Assemblée Générale de l’ONU en 1999 : «  Si l’intervention humanitaire constitue effectivement une atteinte inadmissible à la souveraineté, comment devons-nous réagir face à des situations dont nous avons été témoins au Rwanda ou à Srebrenica, devant des violations flagrantes, massives et systématiques des droits de l’homme, qui vont à l’encontre de tous les principes sur lesquels est fondée notre condition d’êtres humains ? » . Forgée par le philosophe Jean-François Revel en 1979, la notion de « devoir d’ingérence » est popularisée dans les années 1980 par le fondateur de Médecins sans frontières, Bernard Kouchner, et le juriste Mario Bettati (Cf. viepublique.fr ).

[68] Cf. « Pacte 2000 », initiative qui ne va pas sans susciter des débats.

[69] En 2004, il publie le rapport «  Nous, les peuples : la société civile, les Nations unies et la gouvernance mondiale », sur l’élargissement de la démocratie, la capacité d’influence des acteurs non-étatiques, le pouvoir de l’opinion publique mondiale.

[70] Cf. Site officiel de l’ONU.

[71] MAUREL Chloé, «  Kofi Annan, une vie au service de l’ONU », The Conversation , 2018.

[72] Par exemple, la mission Inde Pakistan en place depuis 1949 (UNMOGIP -Groupe d’observateurs militaires des Nations Unies).

[73] « Contribution des États aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, 2018 », SciencesPo.fr .

[74] CHAVILLON Fréd., «  Paix et sécurité humaine : défis à venir  », QI, n°100, Sept-Déc 2019

[75] Cf. l’action de la Russie en Syrie, soutien indéfectible du régime de Bachar el-Assad qui lui offre l’accès à une « mer chaude » (cet objectif a guidé la diplomatie russe depuis les Tsars).

[76] BONA Morgane, «  Pourquoi l’ONU ne fonctionne pas ?  », MARIANNE, 20 août 2014.

[77] BONODOT Cécile, « La Guerre d’Irak (2003-2011) : une guerre gagnée, une paix perdue », École de guerre .

[78] Cf. la Madeleine Albright Secrétaire d’État du président Clinton de 1997 à 2001 : « multilatéraux quand nous le pouvons, unilatéraux quand nous le devons ».

[79] Pour poursuivre la réflexion, vous lirez avec intérêt l’article de Chloé Maurel sur le site de l’IRIS : «  L’ONU, un mécanisme imparfait mais indispensable  ».

[80] En 1946, le mufti de Jérusalem revient en Orient et s'installe au Caire.

[81] Le 22 juillet 1946, l’Irgoun fait sauter une partie du quartier général de l'armée britannique à l'hôtel King David de Jérusalem, faisant 92 morts.

[82] Vice-président de F. D. Roosevelt, il lui succède à son décès en avril 1945.

[83] Comme il n'est pas question d'ouvrir le territoire américain à l'émigration des Juifs d'Europe, et comme Truman compte sur le soutien de l'électorat juif lors des élections de 1948, il prend parti pour un État juif en Palestine.

[84] La diplomatie américaine y est hostile car elle veut ménager les pays arabes en raison de l’enjeu pétrolier.

[85] Alors qu'il accorde l'indépendance à l'Inde et qu’il vient de transférer la gestion des dossiers turc et grec aux États-Unis, le Royaume-Uni doit stationner 80 000 hommes dans ce Mandat grand comme un département français, et l'opinion britannique ne supporte plus les pertes humaines causées par les attentats sionistes.

[86] Pour s’assurer de la majorité des deux tiers des voix à l’Assemblée générale de l’ONU, les États-Unis font pression sur les États d'Amérique latine, ainsi que sur les Européens, dans la dépendance américaine pour leur reconstruction.

[87] Le retrait définitif est prévu au 15 mai 1948.

[88] À lire pour approfondir sur le site Les clés du Moyen-Orient , et celui du Monde Diplomatique .

[89] Cf. massacre du village de Deir Yassin , 9 avril 1948

[90] Un embargo sur les ventes d'armes est décidé, mais l'URSS envoie des armes à Israël via la Tchécoslovaquie.

[91] De ces exils naît la notion de Nakba , encore très sensible aujourd’hui, et un ensemble de litiges autour du droit au retour des réfugiés. À découvrir sur le site de France-Culture et dans cet article du journal Le Monde .

[92] C’est à cette occasion que la Transjordanie devient la Jordanie.

[93] …particulièrement la zone du lac de Tibériade, sous contrôle israélien mais menacée par l’artillerie syrienne postée sur les hauteurs du Golan. Le 10 décembre 1955, un raid israélien contre des villages syriens fait 56 morts et 30 disparus.

[94] À approfondir sur le site Les clés du Moyen-Orient .

[95] Biographie à consulter sur le site Les clés du Moyen-Orient .

[96] Si la France et la Grande-Bretagne refusent, les Etats-Unis conditionnent leur aide à un accord avec Israël. Contre toute attente, Nasser accepte, mais le 19 juillet 1956, les États-Unis se déclarent opposés à la construction du barrage.

[97] Nasser annonce sa décision le 26 juillet 1956 au cours d'un célèbre discours à Alexandrie, devant une foule surchauffée. La liesse populaire est à son comble, et Nasser devient en quelques heures le héros de la nation égyptienne, et plus encore.

[98] L’Égypte refuse d'y assister et se fait représenter par l'URSS et l'Inde.

[99] En effet, à l'automne 1962, pour la première fois, les États-Unis livrent des armes à Israël…

[100] … Aide accordée en échange de facilités navales à la flotte soviétique : en février 1966, l'Égypte signe un accord avec l'URSS qui permet la visite de navires soviétiques dans les ports de Salloum et de Port-Saïd.

[101] …sous la pression populaire des Palestiniens du royaume qui n'accepteraient pas une abstention jordanienne en cas de conflit.

[102] Les opérations ont causé la mort de 10 000 Égyptiens et la destruction de la plus grande partie du matériel militaire.

[103] De gigantesques manifestations se déroulent alors dans tout le pays afin qu'il revienne sur sa décision.

[104] 6 000 morts et 30 000 blessés sur une armée de 50 000 hommes côté jordanien, 300 morts et 1 400 blessés côté israélien.

[105] À lire, sur le site Orient XXI , cet entretien avec l’historien Henry Laurens consacré à la guerre de six-jours ( en vidéo ).

[106] Le 27 juin 1967, la partie est de Jérusalem est annexée.

[107] Anouar el-Sadate a succédé à Gamal Abdel Nasser en 1970.

[108] Jour de la fête de la victoire du Prophète Mahomet sur les Mecquois, c’est également le jour de la fête juive du Yom Kippour.

[109] L’accord dit du « kilomètre 101 ».

[110] Une sorte de cogestion jordano-israélienne se met en place : les fonctionnaires arabes de Cisjordanie sont salariés par Amman, et la nationalité jordanienne est accordée aux Arabes de Cisjordanie et de Gaza.

[111] Menahem Begin est porté au pouvoir par les élections de 1977.

[112] Cf. l’accord signé par Israël avec les Émirats arabes unis en août 2020, et avec Bahreïn en septembre 2020.

[113] Cf. Jean Pierre Filiu, « 2020, l’année où le Moyen-Orient a basculé » ( Blog sur lemonde.fr )

[114] Cf. le célèbre discours de Yasser Arafat devant l’Assemblée générale de l’ONU le 13 novembre 1974.

[115] L'organisation la plus célèbre est alors le Jihad islamique.

[116] Le 22 décembre 1987, la résolution 605 du Conseil de sécurité des Nations unies déplore « les politiques et pratiques d'Israël qui violent les droits du peuple palestinien dans les territoires occupés »

[117] C’est nouveau : auparavant, le plan Schultz (1988) s’adressait à la Jordanie.

[118] Le 23 juin 1992, le parti travailliste emmené par Yitzhak Rabin remporte les élections législatives.

[119] Cf. l’attentat commis par un colon juif d'Hébron qui ouvre le feu sur des musulmans priant dans le caveau des Patriarches 25 février 1994. Y. Rabin adresse alors des excuses officielles à Arafat, mais il refuse toute évacuation de colons.

[120] Israël accepte la formation d'un conseil législatif de 88 membres qui désignera un conseil exécutif.

[121] Ce dirigeant controversé exerce le pouvoir de 1996 à 1999, puis de 2009 à 2021, et à nouveau depuis 2022.

[122] À lire sur le site Les clés du Moyen-Orient .

[123] 1993 : 110 000 colons juifs, 2010 : 280 000, 2021 : 465 000.

[124] Cf. « Plomb durci » (hiver 2008-2009), « Pilier de défense » en novembre 2012 et « Barrière protectrice » pendant l’été 2014, ainsi que les affrontements liés à la « marche du retour » en 2018.

[125] Depuis Oslo, les Américains ont largement montré qu’ils n’étaient pas des intermédiaires neutres et que leur intervention visait essentiellement à soutenir le projet israélien.

[126] La liste des résolutions de l’ONU non respectées par Israël est longue, comme le montre cet article du Monde diplomatique .

[127] Cf. « Proche-Orient : Trump présente un « plan de paix » favorable à Israël », Le Monde , 28 janvier 2020.

[128] Pour approfondir, un article à lire sur le site de France info et un autre sur le site de France Culture .

[129] L’Irak « laïc » de Saddam Hussein était présenté en Occident comme un rempart contre l’extrémisme iranien, et bénéficiait de livraisons d’armes soviétiques comme occidentales.

[130] États-Unis, France, Royaume-Uni, Canada, Pays-Bas, mais aussi une bonne partie des États du Moyen-Orient, dont l'Arabie Saoudite, la Turquie, l'Égypte et la Syrie.

[131] Opération « Tempête du désert » pour l’état-major étatsunien

[132] …et à une extension des désordres et de la répression dans le Kurdistan turc.

[133] De même, en 1992, dans un ouvrage intitulé The New Middle East , l’Israélien Shimon Peres avait esquissé de grands espoirs, appuyés par l'administration américaine, de créer une zone de libre-échange et de prospérité au Moyen-Orient. L'ouvrage a été traduit en français sous le titre Le Temps de la paix , Odile jacob, Paris, 1993.

[134] Cf. III.A.2. Le conflit israélo-palestinien

[135] Pour l’historien George Corm, la Syrie est ainsi récompensée de son soutien à la coalition contre l’Irak.

[136] Le Liban tombe alors sous la domination de Rafic Hariri, milliardaire saoudo-libanais, proche de la Syrie et du roi d'Arabie Saoudite (et du futur président français Jacques Chirac). Rafic Hariri est Premier ministre du Liban de 1992 à 1998 puis de 2000 à 2004 -il est assassiné en 2005 par un attentat suicide attribué au Hezbollah.

[137] Cf. I.B. D’Al-Qaïda à Daesh .

[138] Cette thèse, lancée d'abord dans un article de la revue américaine Foreign Affairs en 1992, puis reprise et développée l'année suivante dans un ouvrage devenu célèbre, acquiert une notoriété mondiale.

[139] La « transition démocratique » annoncée par les États-Unis n’aura jamais lieu : le nouveau gouvernement afghan, porté à bout de bras par les États-Unis, miné par la corruption et une absence totale de légitimité populaire, cède la place en août 2021 aux talibans, redevenus maîtres du pays à la faveur du retrait étatsunien (négocié par l’administration Trump, opéré par l’administration Biden).

[140] …en fait inexistantes, comme le montrera un rapport officiel américain neuf mois après l'invasion.

[141] Le 6 novembre 2003, en effet, soit six mois environ après l'invasion et l'occupation de l'Irak, il annonce officiellement une initiative pour promouvoir la liberté et la démocratie au Moyen-Orient (« Greater Middle East »). Cette initiative deviendra en juin 2004 « Broader Middle East and North Africa Initiative ».

[142] Cf. II.B.2. L’ONU, impuissante face aux puissances ?

[143] Par exemple, la prison d'Abou Ghraïb, à 20 km à l'Ouest de Bagdad, est devenue en 2004 le symbole honni de l'occupation américaine après la révélation des sévices infligés aux prisonniers par des soldats américains.

[144] Cf. Oussama Ben Laden (2011), Abou Bakr al-Baghdadi (2019)…

[145] Le président syrien Bachar al-Assad en 2015, qui critique cette approche occidentale du terrorisme : «  il s’agit de terrorisme quand il les frappe, mais de révolution, de liberté, de démocratie et de droits humains quand il nous frappe. Ses auteurs sont des terroristes chez eux, mais des révolutionnaires et des opposants modérés chez nous  » (Discours du 26 juillet 2015).

[146] Georges Corm, Histoire du Moyen-Orient , La Découverte, 2012.

[147] Saddam Hussein et la plupart des dirigeants de l’époque baasiste sont issus de cette région, notamment de Tikrit, la ville natale de Saddam Hussein où il est capturé en décembre 2003.

[148] Opération « Phantom Fury » pour les forces armées des États-Unis.

[149] Cf. I.B. D’Al-Qaïda à Daesh

[150] Cf. I.B. D’Al-Qaïda à Daesh

[151] Jusqu’en 2018, date de son remplacement par Adel Abdel Mehdi. Moustafa al-Kazimi est l’actuel premier ministre irakien depuis mai 2020.

[152] Cf. « Les éléments d’actualité » concernant l’Irak sur le site de France Diplomatie .

[153] Cf. « Syrie : deux ans après la chute de son califat, le groupe État islamique continue d’étendre son influence en Syrie » sur le site de France Info .

Guerre de sept ans

En relation, pourquoi pas.

es Pourquoi Pas ? I, II, III et IV sont quatre navires du commandant Charcot (1867–1936), célèbre navigateur, explorateur et océanographe français, dont le dernier fut un navire océanographique. Ce nom est de nouveau donné à un navire océanographique de l’IFREMER et du SHOM en 2005, Pourquoi Pas ?, en hommage aux précédents. Navires de Charcot Dans son enfance, Jean-Baptiste Charcot s’est passionné très tôt pour les bateaux et l’exploration polaire, bien qu’il n’y ait eu aucun marin dans sa famille.….

La guerre otto dix

La iodopsine 3 2. La perception des couleurs 3 2.1. La lumière 3 2.2. La photoréception 3 2.3. Le message nerveux 3 3.….

La guerre d'otto dix

Nous allons vous présentés un triptyque avec prédelle d'Otto dix peintre allemand (1891-1969) qui s'intitule la "Guerre".(triptyque: œuvre peinte sur un support de trois panneaux. Prédelle :panneau inférieur du triptyque).Cette œuvre a été peinte entre 1929 -1932 b) Dimensions Les dimensions de l'oeuvre sont également imposantes: Le panneau central mesure 204x204 cm, les panneaux latéraux 102x204 cm et le panneau inférieur 204 x 60cm. Les personnages sont donc représentés à taille réelle ce qui intensifie la force de l'oeuvre. Il n'y a pas d'écart d'échelle entre le spectateur et l'œuvre.….

Guerre d'otto dix

 OTTO DIX, La guerre, triptyque de 1929- 1932 INTRODUCTION: La Guerre est une œuvre qu’on peut qualifier d’expressionniste d'Otto DIX, peintre allemand, engagé volontaire au début du conflit de la première guerre mondiale et qui en revient révolté et pacifiste. Cette œuvre est donc celle d'un homme qui a vécu l'horreur et l'inhumanité de la "Grande Guerre" et qui témoigne de son expérience de soldat en représentant un champ de bataille où la mort et la cruauté règnent en maîtres. Otto DIX réalise La Guerre entre 1929 et 1932 c'est à dire plus de dix ans après l'armistice, à une période où les idées nationalistes trouvent de nouveau une place en Allemagne et où les gens commencent à oublier les terribles souffrances apportées par la guerre. C'est dans ce contexte particulier que le peintre réalise cette œuvre afin de rappeler l'extrême brutalité et la sauvagerie vécues pendant le conflit.….

Otto dix la guerre

II-Description de l’œuvre. Otto DIX, La Guerre, 1929-1932 (panneau central 204x204 cm, panneaux de côté 204x102 cm) Cette œuvre est un polyptique. Un polyptique est une œuvre peinte ou sculptée réalisée sur un support composé de plusieurs panneaux, dont les deux volets extérieurs peuvent se replier sur le panneau central.….

Description : Panneau de gauche : On voit des soldats en armes portant un sac à dos. Ils tournent le dos au spectateur et marchent dans la brume, ils forment une armée humaine sans visage et sans identité, masse aveugle avançant d'un même pas vers le front et ses atrocités. Panneau central : - L'arrière plan du panneau central est occupé par la représentation de ruines : restes de maisons écroulées ou calcinées, paysage désertique avec aucune trace de présence humaine, évocation des ravages causés par les bombardements. - Au premier plan c'est la tranchée dans toute son horreur et son inhumanité qui est évoquée : (en bas à droite) corps déchiquetés et mutilés (bombardements) surplombé par un cadavre aux yeux vides, à la bouche ouverte d'où jaillit un vers et à la peau parsemée de pustules qui évoquent encore une fois le Christ de Mathias GRÜNEWALD mais aussi les conditions d'hygiène….

Histoire des arts Année 2012-2013 I-Présentation de l'oeuvre et de son artiste. A-L'oeuvre: "La Guerre" C'est un triptyque avec prédelle, une peinture sur bois réalisé par le peintre allemand Otto Dix entre 1929 et 1932 et qui se trouve actuellement à la Gemäldegalerie Neue Meister à Dresde en Allemagne. Son panneau central mesure 204x204 cm et les panneaux latéraux 204x102 cm.….

La guerre de otto dix

INTRODUCTION La Guerre est une oeuvre d'Otto DIX, peintre allemand, engagé volontaire au début du conflit de la première guerre mondiale et qui en revient révolté et pacifiste. Cette oeuvre est donc celle d'un homme qui a vécu l'horreur et l'inhumanité de la "Grande Guerre" et qui témoigne de son expérience de soldat en représentant un champ de bataille où la mort et la cruauté règnent en maîtres. Otto DIX réalise La Guerre entre 1929 et 1932 c'est à dire plus de dix ans après l'armistice, à une période où les idées nationalistes trouvent de nouveau une place en Allemagne et où les gens commencent à oublier les terribles souffrances apportées par la guerre. C'est dans ce contexte particulier que le peintre réalise cette oeuvre afin de rappeler l'extrême brutalité et la sauvagerie vécues pendant le conflit.….

DESCRIPTION I. Les éléments iconiques (ce qui est représenté) Panneau de gauche : des soldats en armes portant sac au dos (il est possible d'identifier là les armes et l'uniforme portés par les poilus) tournent le dos au spectateur et marchent dans la brume, ainsi ils forment une armée humaine sans visage et sans identité, masse aveugle avançant d'un même pas vers le front et ses atrocités. Panneau central : Alors qu'aucun décor n'est représenté dans le panneau de gauche, l'arrière plan du panneau central est occupé par la représentation de ruines : restes de maisons écroulées ou calcinées, paysage désertique au sein duquel aucune trace de présence humaine ne subsiste, évocation des ravages causés par les bombardements (Cf. Verdun).….

La guerre «La guerre » , fais entre 1929 et 1932, «triptyque» ( souvent dans les églises ) , panneau central 204x204, autres paneau 204x102 –peinture a l'huile réalisées sur des panneaux en bois - conservé dans la ville de dresde au stadtmuseum Otto Dix – célèbre peintre allemand – né en 1891 mort en 1969 – combattu pour l'allemagne pour la 1ère guerre mondiale – reste très marqué par la guerre, c'est pour cela qu'il peint plusieurs tableau pour essayer d'oublier les images horribles qui lui sont réster en tête. Il a réalisé cette oeuvre plus de 10 ans après l'armistice (11nov1918), une période ou les gens commencent a oublier les terribles souffrances de cette guerre. C'est dans ce contexte qu'il réalise cette oeuvre, pour rappeler l'extrême brutalité et la sauvagerie vécues pendant la guerre. Sur le panneau de gauche, on voit des soldats portant un sac, ils tournent le dos et donc leurs identité n'est pas identifiable, ils marchent dans la brûme.….

Galerie Neue Meister de Dresde, le triptyque n’a pas été composé sur commande mais fait partie de la démarche libératrice et dénonciatrice qu’effectue Otto Dix en transmettant ses souvenirs hérités de la Grande Guerre (quand on lui demanda pourquoi il avait réalisé « La Guerre », il répondit « Je voulais me débarrasser de tout ça ! [1]). On y découvre tour à tour la montée au front, le champ de bataille (et la mort), le retour du front. L’œuvre, entièrement figurative, est imposante : 204 cm x 204 cm pour le panneau central, 204 cm x 102 cm pour les panneaux latéraux et 60 cm x 204 cm pour la prédelle ; le spectateur s’y sent ainsi d’avantage intégré (elle se présente comme une sorte de paysage dans son champ de vision).….

I. Identité de l’œuvre - Le tableau a été peint par Otto Dix entre 1929 et 1932. - Cette œuvre n’a été exposée qu’une seule fois à Berlin en 1938. Considérée comme « dégénérée » par les nazis, elle a ensuite été….

Avec l'arrivée, en 1874 et 1875, de deux paquebots plus modernes, le Britannic et le Germanic, le Republic devient le navire de réserve de la compagnie. Il poursuit sa carrière en occupant cette fonction pendant une quinzaine d'années, ponctuées par de nombreux incidents et collisions. En 1888, une refonte vise à le moderniser. Cependant, l'arrivée, l'année suivante, du Teutonic, et celle annoncée du Majestic le rendent inutile pour la White Star Line.….

Faire la guerre sous louis xiv

Mais c’est surtout à partir de la mort de Mazarin, en 1661, et du début du règne personnel qu’il fonde sa politique sur la guerre et sur l’extension du territoire français. La guerre apparait alors comme le vrai « métier du roi ». Il participe activement à sa préparation ainsi qu’à son déroulement, tout en s’appuyant sur ce qu’on appellerait les ingénieurs de la guerre, autrement dit ses ministres. Il la mène véritablement à son gré, et est très actif diplomatiquement.….

Guerre de 7 ans

tps peut prendre la forme d’une histoire des origines glissant dans le mythe. Scholie : nom donné dans l’Antiquité à une brève note explicative destinée à élucider une difficulté du texte Les scholies sont utilisées pr désigner les commentaires de textes classiques écrits en marge des manuscrits par des savants antique et recopiés en même temps que le texte d’un manuscrit . sous cette forme, elles constituent une compilation fortement abrégée et souvent mal transmise, faite à partir de commentaires antérieurs et + complets.….

« La bataille des Cardinaux » ou bataille de Quiberon de 1759, entre marines anglaise et française ; au premier plan, le vaisseau français le Thésée est en train de sombrer. Tableau peint par Richard Paton après 1759, National Maritime Museum, Greenwich, Londres. © Wikimedia Commons, domaine public

La guerre de Sept Ans a-t-elle été la première guerre mondiale ?

Époque moderne

question réponse

au sommaire

La guerre de Sept Ans se déploie sur deux tableaux, terrestre et maritime : de 1756 à 1763, un conflit continental européen oppose Prusse et Autriche avec leurs alliés respectifs, et cette fois-ci la France est alliée de l'Autriche (une première depuis François I er ). De 1755 à 1763, le conflit extraeuropéen se répartit sur deux grands ensembles : Amérique du Nord et archipel archipel antillais d'une part, Afrique, océan Indien et Inde d'autre part. L'affrontement franco-anglais devient une guerre maritime et coloniale à l'échelle mondiale.

Bataille navale entre l’escadre anglaise des amiraux Osborne et Saunders et l’escadre française de Duquesne, au large de Carthagène (Espagne), le 25 février 1758. Collection Hennin, Estampes relatives à l’Histoire de France, tome 103, période 1758-1759, BNF. © BNF, domaine public

En dépit des nombreux succès militaires anglais de l'année 1762, c'est le gouvernement du roi George III qui demande à engager des préliminaires de paix, signés à Fontainebleau en novembre 1762. Le traité définitif est celui de Paris, signé entre Angleterre, France et Espagne, le 10 février 1763 : il va servir à redéfinir leurs domaines coloniaux respectifs.

Des négociations à l’échelle mondiale

Du côté français, la négociation porte porte essentiellement sur la conservation des intérêts économiques : Louis XV et son ministre Choiseul s'efforcent de maintenir les bases du grand commerce colonial, c'est-à-dire « l'empire sucrier » français, le commerce triangulaire (la traite esclavagiste) et les comptoirs des Indes. Ils ne vont pas hésiter à sacrifier les possessions continentales d'Amérique du Nord.

Les premières discussions concernent le sort des colonies américaines, Nouvelle-France et Antilles . George III et son Premier ministre ne veulent pas conserver toutes les conquêtes : ils craignent que la Guadeloupe et la Martinique fassent de la concurrence aux intérêts commerciaux de la Jamaïque (possession anglaise). Par contre, sous la pression des colons de Nouvelle-Angleterre, ils désirent garder le Canada , ce qui coïncide avec la position française. En effet l'économie de la Nouvelle-France, comparée à celle de la métropole, est jugée sans grand intérêt hormis la traite des fourrures, seul commerce d'exportation considéré comme rentable. Les « îles à sucre sucre  » (Antilles ainsi surnommées) constituent un enjeu majeur pour le commerce colonial français et doivent être récupérées à tout prix.

Succès diplomatique pour la France

Louis XV et Choiseul n'hésitent pas entre Canada et Antilles : ils estiment qu'en récupérant les Antilles, ils remportent un succès diplomatique. L'analyse des clauses du traité montre que l'abandon de l'Amérique du Nord est total : la France renonce au Canada, à la Louisiane à l'est du Mississippi sauf la Nouvelle-Orléans. En fait, elle s'est engagée secrètement à rétrocéder la Louisiane occidentale à l'Espagne, en dédommagement de la cession de la Floride espagnole à l'Angleterre. La France conserve uniquement la liberté de pêche pêche sur la côte nord de Terre-Neuve et les îles de Saint-Pierre-et-Miquelon : ces concessions faites pour raison économique aux pêcheurs normands et basques vont être à l'origine de conflits réguliers entre pêcheurs français et anglais à Terre-Neuve !

En Afrique, la France perd ses établissements commerciaux à Saint-Louis du Sénégal mais conserve l'île de Gorée pour le maintien de la traite esclavagiste. Le domaine des Indes, après avoir représenté les deux tiers du sous-continent indien, est désormais constitué de cinq comptoirs : Pondichéry  dévasté par les Anglais en 1761, Chandernagor, Yanaon, Karikal et Mahé. La France conserve les Mascareignes (îles la Réunion, Maurice, Rodrigues) dans l'océan Indien.

Combat naval de Port Mahon en mai 1756 : l’escadre française du marquis de La Galissonière remporte la victoire sur l’escadre anglaise de l’amiral Byng, pour le contrôle de l’île de Minorque. Collection Hennin, Estampes relatives à l’Histoire de France, tome 172, période 1643-1824, BNF. © BNF, domaine public

Le gouvernement français est très satisfait du succès de sa diplomatie qui, selon lui, a permis de limiter les effets désastreux de la guerre. Voltaire approuve dans une lettre écrite à Choiseul : « Je suis comme le public, j'aime beaucoup mieux la paix que le Canada, et je crois que la France peut être heureuse sans Québec.  » Les ports français qui ont pratiqué un important négoce avec la Nouvelle-France, comme La Rochelle, ont tenté de protester durant les négociations du traité de Paris mais leurs plaintes apparaissent comme la défense d'intérêts privés, donc de peu d'intérêt au regard de ceux de la Compagnie des Indes , à préserver en priorité selon la monarchie française.

Première page du traité de Paris du 10 février 1763. À Paris, par l’Imprimerie royale, 1763, Bibliothèque nationale de France. © BNF, domaine public

Un bilan plutôt contrasté

La guerre de Sept Ans est considérée comme la première guerre mondiale par de nombreux historiens historiens . Le bilan humain, uniquement militaire, varie entre 600.000 et 700.000 morts. Les civils ont payé un tribut encore plus élevé au conflit : le nombre de morts dépasse certainement le million. Sur le plan économique, le coût est exorbitant : plus d'un milliard de livres pour la France, le montant de sa dette est multiplié par deux ; l'Angleterre voit également son endettement doubler entre 1755 et 1763. Sur le plan politique, la Prusse et la Russie se posent désormais en puissances émergentes de l'Europe centrale alors que l'Angleterre se constitue un véritable empire colonial aux dépens de sa rivale française. La France subit un affaiblissement politique en Europe mais son empire colonial constitue, au XVIII e siècle, une période de fort dynamisme économique que le traité de Paris de 1763 ne va pas arrêter. L'après-guerre de Sept Ans se caractérise par l'exploitation intégrale des Antilles (grâce à la traite des esclaves !) ; l'économie coloniale contribue largement à l'économie nationale jusqu'à la Révolution de 1789.

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Publié hier à 20h00 Temps de Lecture 3 min.

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C ’était il y a cinquante ans, le 2 avril 1974, à 22 h 15 : l’ORTF interrompait le film des « Dossiers de l’écran » pour annoncer la mort du président de la République, Georges Pompidou, emporté par une maladie de Waldenström qu’il avait cachée jusqu’à la fin. Avec lui disparaissait l’homme dont le nom, associé à celui du général de Gaulle, symbolise encore une certaine idée d’une France sur la voie de la prospérité, portée par un pragmatisme économique où l’Etat stratège cohabitait avec un libéralisme assumé. Que reste-t-il de ce septennat écourté, le dernier avant que le pays ne plonge dans ce que les Français ressentent encore comme une interminable crise ?

Une nostalgie. Celle des « trente glorieuses » finissantes, certains parlent des « dix bienheureuses », quand la France affichait un taux de croissance insolent de 6 % et un endettement de 15 % du produit intérieur brut. Celle d’un pays ignorant encore le chômage de masse, augmentant le pouvoir d’achat (souvent au prix de nombreuses grèves) et étendant le filet de la protection sociale. Celle d’une République des ingénieurs qui lançait des programmes aussi ambitieux que le Concorde, Ariane, le nucléaire civil ou le TGV. Celle qui créait de puissants groupes industriels avec l’appui des grands corps de l’Etat.

Des temps idylliques ? Le monde est alors à un point de bascule, après la fin des accords de Bretton Woods en 1971, qui oblige la France à s’adapter aux changes flottants. Depuis la décennie précédente, elle est entrée dans une « guerre économique mondiale » , expression forgée par le conseiller déjà chargé de l’industrie à Matignon, Bernard Esambert. « En acceptant le marché commun, en souscrivant à l’esprit du “Kennedy round” tendant à un abaissement général des droits de douane, la France a choisi d’entrer dans la concurrence internationale et donc d’en accepter les risques et les lois » , écrit Pompidou dans Le Nœud gordien (Plon, 1974), publié peu avant sa mort.

Priorité à l’industrie

Elle le fait sans être totalement préparée à cette ouverture au grand large. Depuis les années 1960, elle s’efforce de rattraper son retard industriel face aux Etats-Unis, mais surtout à l’Allemagne et au Japon. Tracée à Matignon à partir de 1962 et accentuée à l’Elysée, une ligne directrice va guider l’action de Pompidou : moderniser et développer l’appareil productif, un impératif catégorique pour prendre la tête de l’Europe communautaire et garder une influence dans les affaires du monde.

Dans le VI e plan, lancé en 1971, priorité est donnée à l’industrie. Le président multiplie les conseils des ministres restreints, suivis de décisions parfois stratégiques, comme sur le nucléaire, se souvient Esambert. Il prend le pouls des patrons en les recevant à l’Elysée, en associe certains à ses voyages à l’étranger. Non sans rencontrer, déjà, les résistances d’un Etat profond à l’œuvre dans les administrations.

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  • André Bouilhol, décoré 62 ans après la fin de la Guerre d’Algérie

Monistrol-sur-Loire André Bouilhol, décoré 62 ans après la fin de la Guerre d’Algérie

La cérémonie décorant André Bouilhol a eu lieu à la date anniversaire du cessez-le-feu en Algérie, en présence du maire Jean-Paul Lyonnet et de Norbert Bernard (à gauche) président des AFN de Monistrol/La Chapelle-d’Aurec.  Photo fournie par André Bouilhol

Il n’est jamais trop tard pour être décoré. André Bouilhol en témoigne avec humour. À 84 ans, cet ancien combattant de la Guerre d’Algérie a reçu, le 19 mars, la médaille commémorative AFN (Afrique française du Nord), 62 ans jour pour jour après le cessez-le-feu de la Guerre d’Algérie.

« À nous trois, on a fait sept ans de...

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COMMENTS

  1. Guerre de Sept ans

    Tout d'abord, nous verrons que des tensions européennes génèrent des alliances à l'échelle mondiale, puis nous nous intéresserons au poids de la dimension politique dans la conduite de la guerre de Sept Ans et enfin nous aborderons les conséquences géopolitiques de ce conflit.

  2. La guerre de Sept Ans (1756-1763) : premier conflit mondialisé

    Cette guerre s'inscrit dans un contexte de rivalités entre les nations européennes. D'abord, entre la France et l'Angleterre. En effet, à cette époque les deux puissances possèdent notamment des colonies en Amérique du Nord, et souhaitent s'y imposer.

  3. La guerre de Sept Ans (1756-1763)

    La guerre de Sept Ans est la première guerre véritablement mondiale : on se bat sur plusieurs fronts, en Europe, en Amérique et en Inde. C'est un renversement des alliances qui voit s'opposer principalement la France, alliée à l'Autriche, contre la Prusse, alliée à l'Angleterre. Le Prussien Frédéric II est en infériorité ...

  4. Guerre de 7 ans

    La Guerre des 7 (sept) ans fut une série de conflits armés qui s'étendirent de 1756 à 1763 , auxquels participèrent les principales puissances du XVIIIe siècle et plusieurs de leurs colonies d'Asie, d'Amérique et d'Afrique. Dans cette guerre, deux grandes factions se sont affrontées :

  5. La guerre de Sept Ans (1756-1763)

    La guerre de Sept Ans est un conflit qui dura de 1756 à 1763 et qui opposa d'une part la France et l'Angleterre dans leurs ambitions coloniales, et d'autre part la Prusse et l'Autriche. À la suite d'un « renversement des alliances», les armées françaises, devenues les alliées des Autrichiens, se trouvèrent engagées à la fois sur mer et sur le co...

  6. La guerre de Sept Ans (1756

    De 1756 à 1763, la Guerre de sept ans a embrasé l'Europe, l'Amérique du Nord et le sous-continent indien. Ce conflit opposa deux blocs : Le premier était composé de la France, l'Autriche, la Suède, la Russie et plus tard l'Espagne. Le deuxième de la Prusse alliée à la Grande-Bretagne.

  7. Guerre de Sept Ans

    Guerre de Sept Ans. Dans le sens des aiguilles d'une montre à partir d'en-haut à gauche : la bataille de Plassey (23 juin 1757) ; la bataille de Fort Carillon (6-8 juillet 1758) ; la bataille de Zorndorf (25 août 1758) ; la bataille de Kunersdorf (12 août 1759). 500 000 à 800 000 civils tués. 990 000 à 1 300 000 morts au total 1. Guerre de Sept Ans

  8. La Guerre de Sept ans (1756-1763)

    La Guerre de Sept ans (1756-1763) Lecture. Résumé. Sommaire. Extraits. page: sur 6. Résumé du document. La Guerre de Sept ans a peut-être été la première guerre mondiale avant la lettre, puisqu'elle s'est jouée en même temps au cœur du continent européen et dans les lointaines colonies d'Amérique et des Indes.

  9. La guerre de Sept ans en schéma pour la dissertation

    LA GUERRE DE SEPT ANS- SCHÉMATISATION. Pour aborder la Guerre de Sept ans de manière originale, j'ai tenté une approche géographique en traduisant la guerre sous la forme d'un schéma de dissertation, celui-ci étant valorisé par les correcteurs lors de l'épreuve de spécialité.

  10. Citoyenneté et éducation par la société

    Introduction Premier conflit mondial de l'histoire selon Winston Churchill1, la guerre de Sept Ans (1756-1763) confirme de manière éclatante la suprématie maritime et coloniale de la Grande-Bretagne. Comme l'a montré la recherche anglo-saxonne, ce conflit inaugure également l'ère des révolutions démocratiques de la fin du xviiie ...

  11. La guerre de Sept Ans : première guerre mondiale

    Dans cette seconde guerre de Cent Ans, entrecoupée de guerre froide et de conflits de plus en plus violents, toutes les périodes ne se ressemblent pas. De 1690 à 1740 , la guerre des rois se construit sur des alliances classiques dont le traité d'Utrecht a fixé la ligne en 1713.

  12. PDF La guerre de Sept Ans

    Alain Roy, 2006, Q03-891. La guerre de Sept Ans. Par Jacques Mathieu. L'événement qui marque la fin de la Nouvelle-France, la guerre de Sept Ans, a laissé des traces aussi profondes que nombreuses en Amérique du Nord, au Canada et au Québec en particulier. Cependant, ce trauma-tisme majeur n'a pas laissé de traces équivalentes en Poitou-Charentes.

  13. La dimension politique de la guerre : des conflits ...

    L'analyse de la guerre de Sept Ans (1756-1763) et des guerres révolutionnaires et napoléoniennes (1792-1815) permet de comprendre des conflits interétatiques et de saisir la rupture fondamentale opérée par la Révolution française. Carl von Clausewitz, militaire prussien, propose un ouvrage majeur sur la guerre et sur cette rupture. La ...

  14. PDF CHAPITRE 4

    La guerre de Sept Ans (17561763) est la première guerre - mondiale. Deux coalitions Deux coalitions (Grande-Bretagne, Prusse et Portugal d'un côté, France, Autriche, Russie et Espagne

  15. Terminale spécialité

    1. La guerre de Sept Ans (1756-1763) 2. Les guerres napoléoniennes (1803-1815) B. LE MODÈLE DE CLAUSEWITZ À L'ÉPREUVE DES « GUERRES IRRÉGULIÈRES » : D'AL QAÏDA À DAECH. 1. « Guerre irrégulière » et terrorisme. 2. Pertinence et limites de la grille de lecture Clausewitzienne. II. LE DÉFI DE LA CONSTRUCTION DE LA PAIX (AXE 2)

  16. PDF Thème 2 Faire la guerre, faire la paix : formes de conflits et modes de

    ou d'objets, la nature de la guerre et ses manifestations y sont présentées. Encart : la Guerre de Sept Ans L'ouvrage classique pour saisir les implications politiques, sociales et militaires de ce conflit mondial est à lire chez Edmond Dziembowski, La guerre de Sept Ans. 1756-1763, Paris, Perrin, 2015.

  17. Fiche d'oral La guerre de Sept ans (1756-1763)

    La guerre de Sept ans (1756-1763) Introduction : La guerre de sept ans est souvent le premier conflit qui peut être qualifié de « guerre mondiale » au sens où les combat se déroulent dans le monde entier et implique toutes sorte de peuples.

  18. PDF Hggsp Theme 2

    La guerre de Sept Ans (1756-1763), à lauelle le pèe de lausewitz a patiipé dans l'amée de la Pusse, est souvent citée dans son ouvrage pour illustrer sa théorie. PROBLÉMATIQUE - Dans quelle mesure la guerre de Sept Ans correspond-t-elle au modèle de la « guerre réelle » tel que le définit Clausewitz ?

  19. Guerre de sept ans

    Résumé du conflit. Bien que la guerre de Sept-Ans débute officiellement en 1756, en Europe, les hostilités sont déclenchées dès 1754 dans la vallée de l'Ohio, en Amérique du Nord, lorsqu'un major de la milice de Virginie, George Washington, se fait prendre dans une embuscade par un petit détachement français, qui est l'élément déclencheur.

  20. PDF Thème 2 Axe 1 LA DIMENSION POLITIQUE DE LA GUERRE Introduction

    La guerre de Sept Ans reste une guerre « classique » : les Etats s'arrêtent quand ils ont atteint leur objectif politique, le conflit est interétatique et symétrique. L'objectif n'est pas d'annihiler son adversaire, mais de défendre au mieux ses intérêts.

  21. La guerre de Sept Ans a-t-elle été la première guerre mondiale

    La guerre de Sept Ans se déploie sur deux tableaux, terrestre et maritime : de 1756 à 1763, un conflit continental européen oppose Prusse et Autriche avec leurs alliés respectifs, et cette...

  22. « Que reste-t-il du septennat écourté de Georges Pompidou ? Une nostalgie

    CHRONIQUE. Disparu il y a tout juste cinquante ans, le 2 avril 1974, le nom du deuxième président de la Vᵉ République symbolise encore une certaine idée d'une France industrielle et prospère.

  23. André Bouilhol, décoré 62 ans après la fin de la Guerre d'Algérie

    Il n'est jamais trop tard pour être décoré. André Bouilhol en témoigne avec humour. À 84 ans, cet ancien combattant de la Guerre d'Algérie a reçu, le 19 mars, la médaille ...