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Chez Delhaize, la reprise des magasins ne se passerait pas comme prévu : "il n'y a jamais eu autant de malades de longue durée"

Présidente du Setca, Myriam Delmée fait le point sur le plan de franchisation des magasins Delhaize, 18 mois après l'annonce.

• Publié le 17-09-2024 à 08h50
• Mis à jour le 17-09-2024 à 08h51

Le contexte social chez Audi Forest en rappelle un autre : Delhaize. En mars 2023, le groupe annonçait la mise sous franchise de tous ses magasins intégrés . Un changement de stratégie majeur pour l'ensemble des travailleurs de ces 128 magasins. On se souvient des longues semaines de grèves et des fermetures qui avaient parfois nécessité l'intervention des forces de l'ordre pour casser les piquets de grève.

18 mois plus tard, le patron de Delhaize a fait le point sur le dossier auprès de nos confrères de La Libre, ce week-end. "Pour nous, la décision que l'on a prise est définitivement une bonne décision", a répété à plusieurs reprises Xavier Piesvaux , à la tête de Delhaize depuis 2017. " Cela se passe plus vite que prévu, de façon très positive. Les affiliés sont récompensés par les tendances de leur chiffre d'affaires. Le personnel est satisfait. Il a bien fallu rassurer, c'est évident. Le déclic est intervenu lorsque le personnel a pu pour la première fois rencontrer son repreneur, cela a permis de mettre un visage sur le plan et de créer une différence positive ", a-t-il encore déclaré.

Des propos qui n'ont pas plu à Myriam Delmée, présidente du Setca et experte du dossier Delhaize. " Comment qualifier cela ? Il n'a parlé à personne, syndicats comme employés, durant plus d'un an et se permet une telle sortie , souffle-t-elle. J'ai encore eu une réunion il y a quelques jours avec d'anciens délégués syndicaux. Le tableau dépeint n'est pas du tout celui de Mr Piesvaux. Il est difficile d'obtenir des chiffres précis, puisque nous n'avons plus de représentation syndicale dans les magasins, et une très faible présence au CA pour les quelques magasins encore intégrés. Mais je peux vous garantir qu'il n'y a jamais eu autant de malades longue durée ! La pression est extrême sur les travailleurs, les changements d'horaires sont légion, il n'y a pas de respect sur les conditions du travail du dimanche, etc. "

Autre élément qui a de quoi inquiéter, les repreneurs des magasins peinent à trouver la bonne formule pour être rentables. " Il y a des franchisés qui ne s'en sortent pas bien, et on met la pression sur les employés en parlant de faillite. Le retour sur investissement n'est pas aussi bon qu'attendu. Xavier Piesvaux doit arrêter de rire et d'essayer de se donner bonne conscience ! "

Un exemple assez concret avec les caisses automatiques. Dans certains magasins, les contrôles sont presque systématiques, désormais. " On a toujours dit que ce n'était pas la panacée et que les vols coûtaient cher. Mais, jusqu'à présent, cela coûtait moins cher que de payer un employé avec un bon contrat. Aujourd'hui, les franchisés gagnent mieux leur vie à rouvrir des caisses en y mettant des étudiants et des flexi-jobs. "

Elle revient également sur le statut social des travailleurs, et les changements de commissions paritaires qui font partie de ce plan de franchisation. " Xavier Piesvaux affirme également que l'opération n'a pas perturbé d'autres commerces et champs de compétences des commissions paritaires, mais c'est faux. Dans la plupart des cas, on a renvoyé les magasins dans les mains de propriétaires qui avaient déjà plusieurs autres magasins Delhaize. Ils ont donc mis en place des stratégies juridiques pour conserver le statut de petit commerçant, alors que ce n'est plus le cas quand on possède autant de magasins, et qu'on emploie autant de monde. Cela crée un véritable dumping social. "

Elle revient enfin sur l'annonce, il y a quelques mois, de la perte de 400 millions d'euros de Delhaize, pour l'année 2023. " Ce sont surtout les effets des fermetures dues aux grèves, et des actions commerciales au moment de la réouverture des magasins et du passage sous franchise. Je pense aussi à tous ces repreneurs qui ont droit à des années de loyer gratuit dans la convention de reprise , avance-t-elle. Mais, ces 400 millions ne sont rien par rapport à un plan de restructuration qui aurait touché les 9000 employés de Delhaize. "

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